Article premier de la Déclaration universelle des droits de l'homme (voir le texte en français) Matukaay bu jëkk bi: Doom aadama yépp danuy juddu, yam ci tawfeex ci sag ak sañ-sañ. Nekk na it ku xam dëgg te ànd na ak xelam, te war naa jëflante ak nawleem, te teg ko ci wàllu mbokk.
Le wolof possède le statut de langue nationale au Sénégal, en Mauritanie et en Gambie. Il est compris par près de 90 % de la population du Sénégal alors que les Wolofs représentent moins de la moitié des habitants du pays. Il joue ainsi un rôle de langue véhiculaire interethnique. 13 % des locuteurs parlent cette langue en Gambie, soit trois points de plus que l'ethnie du même nom[pas clair]. En Mauritanie, environ 22 % de locuteurs sont estimés[pas clair], principalement à Nouakchott et dans la région du fleuve Sénégal. Des communautés wolofones sont établies dans d'autres pays d'Afrique occidentale comme la Guinée et le Mali. En outre, le wolof sert de langue de communication dans la diaspora en Europe et aux États-Unis[2]. Une étude statistique de 1975 montrait que la grande majorité de la population la parlait comme première, deuxième ou troisième langue[3].
Les variétés dialectales du Sénégal correspondent en partie à la localisation d'anciens royaumes, ne posent pas de problèmes d'intercompréhension, à l'exception du parler lébou[4].
Histoire de l'étude du wolof
Les premiers ouvrages écrits de grammaire et de lexicologie du wolof sont élaborés au début du XIXe siècle par des colons. L'instituteur français Jean Dard publie le premier dictionnaire français-wolof en 1825 puis une grammaire l'année suivante[5]. Son but est essentiellement pédagogique et destiné à faciliter l’écriture, alors que la grammaire du gouverneur Jacques-François Roger, parue en 1859, vise à saisir la logique profonde de cette langue. Ces deux travaux initient l'étude systématique de la grammaire wolof[6]. Toutefois, il existe des compilations lexicales antérieures, comme celles du missionnaire écossais John Hill, présent à Gorée en 1807 et auteur de quatre vocabulaires, qui n'offrent cependant aucune explication de la syntaxe[7]
Six ans après son installation en France en 1858, David Boilat, prêtre catholique franco-sénégalais, auteur de nombreux ouvrages illustrés sur les cultures du Sénégal, publie une Grammaire de la langue woloffe qui reçoit le prix Volney de l'Institut de France[8]. Arrivé au Sénégal en 1852, le militaire et homme politique français Louis Faidherbe publie un lexique français d'environ 1 500 mots en 1864, avec leur traduction en wolof, en soninké et en peul. Il note l’« impureté » du wolof parlé à Saint-Louis, mâtiné de nombreux emprunts à la langue française[9]. En 1943, l'homme politique sénégalais Armand-Pierre Angrand publie un manuel français-wolof, qui ne prétend pas être un travail de linguiste mais une introduction à la langue[7].
Description
Le wolof a longtemps été écrit avec un alphabet arabe complété appelé wolofal[10]. Cette écriture reste parfois utilisée par des textes religieux, mais le wolof utilise désormais l'alphabet latin avec des conventions particulières pour respecter les sons particuliers du wolof.
Système de numération
Le système de numération wolof est décimal mais utilise un système quinaire auxiliaire. Par exemple, vingt-six s'écrit « ñaar fukk ak juróom benn » en wolof (« deux [fois] dix et cinq [et] un » : (2×10) + 5 + 1 = 26).
Contrairement à la plupart des langues africaines mais à l'image du peul, le wolof n'est pas une langue à tons.
Dans l'orthographe du wolof, une suite de deux voyelles identiques correspond à une voyelle longue. Le à correspond à un aa (a long) devant une prénasalisée ou une géminée.
L'alphabet wolofal a été standardisé en 1990 dans une directive de la Direction de la promotion des langues nationales (DLPN), dans le contexte des efforts du ministère sénégalais de l'Éducation. Environ 20 000 personnes, pour la plupart des enseignants et des élèves des écoles islamiques, ont appris cet alphabet[11],[12].
L'alphabet wolof est composé de 23 lettres. Les lettres comme "ص" et "ث" qui sont utilisées en arabe, n'existent pas en langue wolof. Dans cet alphabet, il y a aussi des digrammes avec le meem "م" et noon "ن" pour montrer les consonnes pré-nasales (comme "مبـ" (mb-), "نجـ" (nj-)).
L'alphabet wolof comprend également 9 signes diacritiques pour représenter les voyelles (alors que l'arabe et le persan n'ont que 3 signes diacritiques). Les voyelles peuvent aussi être courtes ou longues. Les voyelles longues sont écrites avec une combinaison de neuf signes diacritiques et l'une des lettres alif (ا), waw (و) ou yeh (ي).
Dans l'écriture vélophale, il est obligatoire de montrer tous les signes diacritiques, y compris les signes diacritiques de voyelle nulle (◌ْ) et de gémination (tachdid) (◌ّ). La signification des mots peut être modifiée par signes diacritiques de voyelle nulle ou de gémination. Par exemple, le mot "دَگْ" (en latin dag) signifie serviteur royal, et le mot "دَگّ" (en latin dagg) signifie couper.
Le alif a deux fonctions : la première est de servir comme un porteur des signes diacritiques de voyelle au début des mots, et la deuxième est d'indiquer la voyelle longue "-aa".
Le waw a deux fonctions : la première est de servir comme sa propre consonne ayant le son [w], et la deuxième est d'indiquer les voyelles longues "-oo" "-óó", et "uu".
heh هࣹهْ
ه
ـه
ـهـ
هـ
[h]
h
اَهَکَايْ
ahakaay
yeh يࣹهْ
ي
ـي
ـيـ
يـ
[j]
y
يَايْ نجِيتْ
yaay njiit
Le yeh a deux fonctions : la première est de servir comme sa propre consonne ayant le son [j], et la deuxième est d'indiquer les voyelles longues "-ee" "-éé", et "ii".
Dans l'orthographe du wolof, une suite de deux consonnes identiques correspond à une géminée. Toutes les occlusives, nasales et latérales peuvent être géminées. Il faut cependant noter que le q est toujours géminé bien que noté comme une consonne simple.
La pénétration de l'islam au Sénégal explique l'influence de la langue arabe sur le wolof, qui lui emprunte notamment son vocabulaire religieux[13]. Le français a également eu une influence avec la colonisation et la scolarisation dans cette langue. Si l'origine francophone de certains termes est transparente, comme l'illustrent les mots « oto » ou « almet », d'autres cas sont plus surprenants, comme « fok nga » pour « il faut que tu »[14]. Quelques mots sont d'origine berbère, le fameux « tabaski » du berbère tafaska signifiant la fête musulmane du mouton, en est un exemple.
Culture en langue wolof
Littérature
Une traduction en wolof du Nouveau Testament a été publiée en 1987 et a connu une seconde édition en 2004, légèrement corrigée en 2008[15].
L'écrivain sénégalais Boubacar Boris Diop publie son roman Doomi Golo en wolof en 2002[16]. Il en donne une traduction libre en français sous le titre Les Petits de la guenon en 2009.
Dans son quatrième livre, La Porte du voyage sans retour, paru aux éditions du Seuil en 2021, l'écrivain David Diop met en scène un jeune botaniste qui vers 1750 explore le Sénégal[17], où à l'île de Gorée il découvre un peuple, une langue, et l’horreur de l’esclavage[17]. L'histoire s'inspire du manuscrit, tenu secret jusqu’à sa mort en 1806[18] du célèbre botaniste Michel Adanson[17], ce dernier ayant rendu hommage à la langue wolof, dans laquelle les Sénégalais selon lui « entassent tous les trésors de leur humanité : leur croyance dans l’hospitalité, la fraternité, leurs poésies, leur histoire, leur connaissance des plantes, leurs proverbes et leur philosophie du monde »[18].
Le groupe sénégalais Lemzo Diamono, actif entre 1990 et 1998, fait parfois usage de paroles en wolof. On peut entendre du wolof dans la chanson à succès 7 Seconds de Youssou N'Dour et Neneh Cherry, sortie en 1994. La chanson Tassez-vous de d'là, du groupe Les Colocs, sortie dans les années 1990, fait aussi usage de paroles en wolof. La chanteuse sénégalaise Julia Sarr chante en wolof dans son album Set Luna en 2005[19]. Actif dans les années 2000 et 2010, le chanteur et percussionniste sénégalais Latyr Sy chante en plusieurs langues dont le wolof.
Le cinéma des pays de langue wolof (cinéma sénégalais et cinéma mauritanien comprend des films tournés dans cette langue. Le réalisateur Ousmane Sembène évoque le Sénégal dans plusieurs de ses films : Emitaï (1971) revient sur le traitement des Sénégalais par les Français durant la seconde guerre mondiale ; Faat Kiné évoque la société sénégalaise de l'an 2000.
Mais le wolof s'entend aussi dans des films d'autres pays évoquant des personnages de langue wolof un peu partout dans le monde. Little Senegal, film franco-germano-algérien réalisé par Rachid Bouchareb en 2001, a pour personnage principal un Sénégalais qui part aux États-Unis sur les traces de ses ancêtres esclaves et découvre la communauté sénégalaise de Harlem. Biutiful, film mexicano-espagnol réalisé par Alejandro González Iñárritu en 2010, se déroule à Barcelone en Espagne mais met en scène des immigrés pauvres, notamment sénégalais. L'un des personnages principaux du docu-fiction politique Indignados, en 2012, est de langue wolof.
Série télévisée
Maîtresse d'un homme marié, un feuilleton télévisé sénégalais en wolof, est diffusé depuis le et est devenu un phénomène de société au Sénégal et dans la diaspora sénégalaise.
↑J. Blondé (dir.), Résultats d'un sondage sociologique en milieu analphabète, CLAD, Dakar, 1975, cité dans le chapitre d'Ismahan Diop consacré au Sénégal dans l'ouvrage dirigé par Yolande Govindama, Temps et rites de passage, Karthala, 2011. Lire en ligne
↑Robert Cornevin, « L'œuvre de Bourguignons (Les Javouhey et Jean Dard) au Sénégal et à la Réunion », Revue française d'histoire d'outre-mer, tome 54, no 194-197, 1967, pp. 227-246, p. 237, Lire en ligne
↑Emilio Bonvini, « Les deux premières grammaires françaises du Wolof (Sénégal) : une systématisation contrastée, Histoire Épistémologie Langage, tome 23, fascicule 2, 2001,. pp. 101-116, p.103-104, Lire en ligne
↑ a et bPatricia Mirrlees, « John Hill and the Early Attempt to Study a West African langage », dans Sowing the Word: The Cultural Impact of the British and Foreign Bible Society, 1804–2004, Sheffield Phoenix, 2004. xii + 381 pp., p. 115, Lire en ligne
↑Bernard Mouralis, « Les Esquisses sénégalaises de l'abbé Boilat, ou le nationalisme sans la négritude », Cahiers d'études africaines, vol. 35, no 140, 1995, pp. 819-837, p. 821, Lire en ligne
↑Fiona Mc Laughlin, « Tracing Language Movement in Africa », dans Ericka A. Albaugh et Kathryn M. de Luna (dir.), Tracing Language Movement in Africa, Oxford University Press, 2017, pp. 213-232, p. 221, Lire en ligne
↑ ab et cCritique par Nathalie Crom dans Télérama le 18/08/2021 [1]
↑ a et b« La Porte du voyage sans retour », de David Diop : dans les pas du botaniste Michel Adanson :
Critique dans La Croix par Jean-Claude Raspiengeas, le 14/10/2021 [2]
Abbé P.D. Boilat, Grammaire de la langue Woloffe, Paris, Imprimerie Impériale, 1858
Jean Dard, Dictionnaire français-wolof et français-bambara, suivi du dictionnaire wolof-français, Paris, Imprimerie royale, 1825
Jean Dard, Grammaire Wolofe ou méthode pour étudier la langue des noirs en Sénégambie suivie d'un appendice, Paris, Imprimerie royale, 1826
L. Descemet, Recueil d'environ 1.200 phrases françaises usuelles : avec leur traduction en regard en Ouolof de Saint-Louis, Saint-Louis, Imprimerie du gouvernement, 1864
Louis Léon César Faidherbe, Vocabulaire d'environ 1,500 mots français avec leurs correspondants en ouolof de Saint-Louis, en poular (toucouleur) du Fouta, en soninké (sarakhollé) de Bakel, 1864, Saint-Louis, Imprimerie du Gouvernement, 1864, 70 p.
Louis Léon César Faidherbe, Langues sénégalaises : wolof, arabe-hassania, soninké, sérère, notions grammaticales, vocabulaires et phrases, E. Leroux, 1887, 267 p.
V.J. Guy, Grand Dictionnaire français-volof, Saint Joseph de Ngasobil, Imprimerie de la Mission, 1890
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Ouvrages contemporains
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Cheikh Tidiane Ndiaye, L’alternance codique wolof-arabe au Sénégal : approche sociolinguistique, 2019. Lire en ligne
Filmographie
Léopold Sédar Senghor à propos du bilinguisme au Sénégal, extrait d'interview diffusé par l'ORTF le (54 s.), en ligne sur le site de l'INA[3]