Informellement, le k-ième nombre de Betti correspond au « nombre de surfaces k-dimensionnelles indépendantes »[1]. Les premiers nombres de Betti sont définis intuitivement par :
Supposons une galette dans laquelle on a percé n trous disjoints, de manière suffisamment régulière pour qu'on puisse considérer que ce qu'on a obtenu est une variété de dimension p = 2. Cette variété est connexe, donc b0 = 1. Le nombre de courbes fermées indépendantes est 2n. Enfin, b2 = b0 = 1, comme on le voit directement, ou par le théorème de dualité de Poincaré, suivant lequel bn = bp-n. Ce théorème implique que le nombre de Betti b1 est toujours pair en dimension p = 2, et b1/2 = g est le genre de la variété[3]. Dans l'exemple considéré, g est le nombre n de trous qu'on a percés. Un bretzel (à condition de l'idéaliser) illustre ce propos.
Pour tout entier naturel k, le k-ième nombre de Betti bk(X) d'un espace topologique X est le rang(en) de son k-ième groupe d'homologie, Hk(X) = Ker(∂k)/Im(∂k + 1), c'est-à-dire la dimension (entière ou infinie) du ℚ-espace vectorielHk(X) ⊗ ℚ.
On peut définir plus généralement, pour tout corpsK, le k-ième nombre de Betti de X à coefficients dans K comme la dimension bk(X, K) du K-espace vectoriel Hk(X,K). Un cas simple du théorème des coefficients universels montre en effet que bk(X, ℚ) = bk(X).
On appelle polynôme de Poincaré de X (ou plus généralement série de Poincaré, si X est de dimension infinie) la série génératrice des nombres de Betti de X :
Exemples
Les groupes d'homologie du cercle sont H0(S1) = ℤ, H1(S1) = ℤ et Hk(S1) = 0 pour k > 1 donc son polynôme de Poincaré est PS1(x) = 1 + x.
Pour le tore T2 de dimension 2, on a H0(T2) = ℤ, H1(T2) = ℤ2, H2(T2) = ℤ et Hk(T2) = 0 pour k > 2 donc PT2(x) = 1 + 2x + x2.
La série de Poincaré de l'espace projectif complexe de dimension infinie est la série géométrique
L'homologie des espaces projectifs réels comporte de la torsion, qui est « masquée » dans leurs polynômes de Poincaré : PPn(ℝ)(x) = 1 + xnsi n est impair et 1 si n est pair.
Les polynômes de Poincaré des groupes de Lie simples compacts sont
En théorie topologique des graphes, le premier nombre de Betti d'un graphe à n sommets, m arêtes et k composantes connexes est m – n + k (on le démontre par récurrence sur m : une nouvelle arête augmente le nombre de 1-cycles ou diminue le nombre de composantes connexes). Voir « Nombre cyclomatique » pour une application en génie logiciel.
Le polynôme de Poincaré d'un produit de deux espaces est le produit de leurs polynômes de Poincaré respectifs, d'après le théorème de Künneth.
Si X est une n-variété orientable fermée, d'après le théorème de dualité de Poincaré, bk(X) = bn – k(X) et les nombres de Betti donnent les dimensions des espaces vectoriels de la cohomologie de De Rham.
Les nombres de Betti à coefficients dans un corps K ne dépendent de K que par sa caractéristique. Si les groupes d'homologie de l'espace sont sans torsion (comme au début des exemples ci-dessus), les nombres de Betti sont indépendants de K. Le lien entre la p-torsion et les nombres de Betti en caractéristique p est donné par le théorème des coefficients universels.