Nicolas Durand de Villegagnon est né à Provins vers 1510. Il est le fils d’un procureur du roi au bailliage de Provins. Il est élève aux collèges de La Marche et de Montaigu à Paris, en compagnie de Calvin[2]. Il obtient ensuite sa licence de droit à Orléans.
Porte principale du fort Coligny sur l’île Villegaignon.Carte de la France Antarctique.
Il reçoit en 1554 le commandement de la flotte mise par Henri II à la disposition de Gaspard II de Coligny pour installer une colonie au Brésil où les protestants français pourraient exercer librement leur religion.
Il part du Havre le [3],[4], piloté par le capitaine de navire Nicolas Barré, sur deux navires chargés de 600 marins et passagers. Il a avec lui son neveu et adjoint Legendre de Boissy, seigneur de Bois-le-Comte. Il arrive dans la baie de Guanabara, le 10 novembre, et débarque dans l’île de Serigipe, qui porte aujourd’hui son nom, où il fait élever le fort Coligny, voulant appeler Henryville la bourgade qu’il compte créer sur la terre ferme, sur la côte qu’il nomme la « France antarctique ». Mais le ravitaillement s’épuise vite et une conspiration est montée contre lui. Celle-ci étant découverte à temps, les conspirateurs se réfugient parmi les Indiens et les montent contre les Français, qui partent chercher du renfort en Europe.
Des protestants de Genève débarquent alors à Fort Coligny, le [5]. Catholiques et protestants ne tardent pas à s’opposer, et les derniers, dirigés par Philippe de Corguilleray, avec deux pasteurs, Pierre Richer et Guillaume Chartier, s’installent fin octobre 1557 sur la terre ferme en un lieu appelé la Briqueterie où s’étaient déjà établis d’autres Français dissidents. Controversé, Villegagnon quitte fort Coligny pour la France en 1559. En 1560, le fort Coligny est attaqué par les Portugais et les Français qui l’occupent en sont chassés. Réfugiés dans les forêts environnantes où ils s’installent avec les Indiens, ils parviennent à maintenir une relation commerciale avec la France jusque vers 1567, période à laquelle les Portugais se décident à une occupation véritable de la région. Aujourd’hui appelée Ilha Villegaignon, cette île est le site de l’École navale brésilienne.
Le récit de l’expédition a été écrit en 1578 par l’un de ses membres, le cordonnier puis étudiant en théologie Jean de Léry : Histoire d’un voyage faict en la terre du Brésil[6].
Fin de carrière
Le , Nicolas Durand de Villegagnon devient le seigneur du domaine de Torcy par don du roi Henri II pour le rembourser des travaux de fortifications du château de Ponteflures du marquisat de Montferrat[7].
De retour en France, Villegagnon poursuit sa polémique avec les calvinistes et prend part aux guerres de Religion dans le camp catholique. Il fut notamment blessé au siège de Rouen en 1562.
↑Jean Amsler, La Renaissance (1415-1600), tome II de Histoire Universelle des Explorations publiée sous la direction de L.-H. Parias, Paris, Nouvelle Librairie de France, 1957, p. 347
↑Annie Charon, Thierry Claerr et François Moureau, Le livre maritime au siècle des Lumières : édition et diffusion des connaissances maritimes (1750-1850), Paris, Presses Paris Sorbonne, , 265 p. (ISBN978-2-84050-363-7, lire en ligne)
↑Ou le 12 juillet 1555 selon Pierre Pluchon dans son Histoire de la colonisation française, Fayard, 1991 p. 46
↑Abel Hugo, France historique et monumentale : Histoire générale de France depuis les temps les plus reculés jusqu’à nos jours, vol. 4, Delloye, (lire en ligne)
↑Jean de Léry, Lambert Daneau, P. Melet et Gabriel Poinsard, Histoire d’un voyage faict en la terre du Bresil, autrement dite Amerique : contenant la navigation, et choses remarquables, veues sur mer par l’auteur. Le comportement de Villegagnon en ce pays-là. Les mœurs et façons de vivre estranges des sauvages bresiliens : avec un colloque de leur langage. Ensemble la description de plusieurs animaux, arbres, herbes, et autres choses singulieres, et du tout inconnues par-deça : dont on verra les sommaires des chapitres au commencement du livre. Avec les figures, reveue, corrigée et bien augmentée de discours notables en ceste troisiesme edition. Le tout recueilli sur les lieux par Jean de Lery, natif de la Margelle, terre de sainct Sene, au duché de Bourgongne, Genève, Antoine Chuppin, , 427 p. (lire en ligne).
↑Jean Lebeuf, Histoire de la ville et de tout le diocèse de Paris : contenant les paroisses et terres du Doyenné de Lagny, t. 15e, Paris, Prault père, , 469 p. (lire en ligne), p. 232.
Annexes
Sources et bibliographie
(la) De bello Melitensi, & eius euentu Francis imposito, ad Carolû Cæsarem V. Nicolai Villagagnonis Commentarius, Parisiis, Apud Carolum Stephanû, , 30 p. (lire en ligne)
Édition originale du texte latin. Elle a été publiée en même temps que la version française, également chez Charles Estienne, afin d’avoir la diffusion la plus large dans la Chrétienté. Il fait le récit de la guerre de Malte en 1551 et de la prise par les Turcs de l’île et de Tripoli qu’il avait été secourir à la demande des chevaliers de l’ordre de Saint-Jean de Jérusalem. Les Impériaux rendaient les Français coresponsables du sac de Gozo, une île près de Malte, et de la perte de Tripoli. Il est témoin des graves défaites subies par l’ordre de Saint-Jean de Jérusalem en 1551, en rejette la responsabilité sur le Grand Maître et sur les éléments espagnols de la garnison de Tripoli. Il disculpe les Français, en particulier l’ambassadeur d’Aramon, le gouverneur Vallier et lui-même.
Jean-Pierre Niceron, Mémoires pour servir à l'histoire des hommes illustres, chez Briasson, Paris, 1733, tome 22, p. 306-325(lire en ligne)
Mickaël Augeron, « Célébrer les Martyrs de la Guanabara : Rio de Janeiro, lieu de mémoire pour les communautés presbytériennes du Brésil », Les huguenots et l’Atlantique, vol. 2 : Fidélités, racines et mémoires, dans Mickaël Augeron, Didier Poton et Bertrand Van Ruymbeke, dir., Paris, Les Indes savantes, 2012, p. 404-419.
Arthur Heulhard, Villegagnon roi d’Amérique : un homme de mer au XVIe siècle (1510-1572), Paris, Ernest Leroux, (lire en ligne).
Frank Lestringant, « Tristes tropistes : Du Brésil à la France, une controverse à l’aube des guerres de religion », Revue de l’histoire des religions, (lire en ligne).
Louis-Henri Parias (4 volumes), Histoire universelle des explorations, t. 2, Paris, Nouvelle Librairie de France, (lire en ligne), p. 348.
Thierry Wanegffelen, « Rio ou la vraie Réforme : La « France Antarctique » de Nicolas Durand de Villegagnon entre Genève et Rome », « Aux temps modernes : naissance du Brésil », actes du colloque franco-brésilien de l’Université de Paris IV-Sorbonne les 4 et 5 mars 1997, Paris, Presses de l’Université de Paris-Sorbonne, , p. 161-175 (lire en ligne).