En 1977, il revient à Paris pour donner les cours de Talmud au SIF que son père malade ne peut plus assurer. Après le décès de celui-ci, en , il y poursuit son enseignement et passe les examens de sortie par dérogation sans avoir suivi les études du Séminaire Israélite de France. Il entreprend également des études universitaires, spécialisant ses recherches sur la Halakha et la bioéthique.
Depuis les années 1980, il est rabbin de la synagogue Michkenot Israël, dans le 19e arrondissement parisien. Il devient directeur du SIF en 1992, poste qu'il occupe jusqu'à son élection comme Grand-rabbin de Paris, en 2012.
Du au , il assure avec le rabbin Olivier Kaufmann l'intérim du grand-rabbin de France, à la suite de la démission forcée de Gilles Bernheim.
Le , il s'indigne des défilés avec des banderoles antisémites à Paris, en concluant « c'est un tabou qui tombe »[11].
La bioéthique
Il participe aux débats en 2005 sur la loi de bioéthique, dite Loi Leonetti.
Sur l'euthanasie, il souligne que « La Torah compte 365 interdits dont 362 peuvent être l’objet de transgressions quand les circonstances et le respect de la vie l’exigent. L’interdit de tuer, étendu aux atteintes indirectes à la vie ne souffre pas d’exception, sauf le fait justificatif de la légitime défense. La souffrance ne constitue pas une exception. » Cependant il refuse l’acharnement thérapeutique : « le refus de l’acharnement thérapeutique, en lui-même excusable. Si la vie peut être prolongée, elle ne doit pas l’être au prix d’une obstination déraisonnable »[12].
Il approuve la recherche sur les embryons surnuméraires[13],[14]
Il approuve les procédés de procréation médicalement assistée : « La maîtrise de la procréation de l'homme ne va pas à l'encontre de la foi, car toutes les techniques de procréation existant aujourd'hui utilisent la nature[15],[16]. »
Élu grand-rabbin de Paris
Le ont lieu les élections pour le grand-rabbinat de Paris. Michel Gugenheim est élu au troisième tour.
Au deuxième tour Michel Gugenheim ne gagne qu'une voix pour un total de 25, Chalom Lellouche ne progresse pas avec 9 voix et le rabbin Sénior reçoit 3 voix de plus avec 8 voix.
Au troisième tour, Michel Gugenheim reçoit les 8 voix de Sénior et Lellouche ne progresse pas avec toujours 9 voix.
Gugenheim est élu avec 33 voix sur 42 voix, avec 78,57% des voix contre 21,42% pour Lellouche.
Michel Gugenheim élu pour 7 ans déclare ne pas briguer un second mandat[17].
Ni Michel Gugenheim, ni Joël Mergui, président du Consistoire central, ne soutiennent Gilles Bernheim dans l'affaire qui mène à sa démission forcée[18].
L'égalité homme-femme dans le judaïsme
Les rapports en Homme et Femme dans le judaïsme sont sujets de débats entre les différentes mouvances du judaïsme français contemporain.
Le prédécesseur de Michel Gugenheim, Gilles Bernheim et sa femme Joëlle Bernheim, très impliquée dans l'égalité entre hommes et femmes, veulent s'attaquer à ce problème[19]. Il est pour cela vivement contesté par la partie ultra conservatrice du judaïsme[20].
L'équipe de direction actuelle, principalement Michel Gugenheim qui cumule trois postes importants, est considérée comme plus conservatrice voire « réactionnaire » que ses prédécesseurs[21]. Cette nouvelle direction n'a pas renouvelé « la journée des agounot » instaurée en 2012 par Gilles Bernheim[22].
Dans les années 2000, le Conseil des rabbins européens invite les rabbinats européens à adopter un accord prénuptial standardisé ainsi que leur enjoignant de refuser tout service religieux aux maris récalcitrants. Michel Gugenheim refuse de relayer cette résolution à l’échelle locale[23].
Certains le taxent de misogynie : Il s'oppose, par exemple, à la célébration publique des bat-mitsvot des jeunes filles dans les synagogues du consistoire[24] car à partir de 3 ans, elles ne doivent plus être entendues de chanter car la voix féminine correspond une « erva » (nudité)[25]. Il répond « Cela me scandalise, car c’est tellement faux. C’est de la désinformation dans le seul but de nuire à la Torah et à ceux qui la représentent. Ceux qui me connaissent savent quelle haute opinion j’ai des femmes. Ceux qui me lisent savent l’importance que les femmes ou la femme occupent dans mes articles et ouvrages. Je mets cela sur le compte de la malveillance de certains qui ne me connaissent pas vraiment[26]. » Il s'oppose également à la lecture de la Torah par des femmes dans un minian de femmes[27].
En 2008, Michel Gugenheim préface un guide de l'association Wizo où il traite le cas des refus de guett par le mari. Ce guide explique, de manière didactique, comment le Beth din procède pour conduire l'ex-époux, divorcé civilement, à accepter de donner le guett[28].
Concernant l'homosexualité masculine, il écrit : « La personne qui commet le péché de l'homosexualité masculine ne le fait que pour irriter Dieu »[29],[30]. Il conçoit l'homosexualité comme un mauvais penchant (Yetser hara), qui n'a rien à voir avec le concept d'orientation sexuelle et contre lequel l'individu doit lutter[31].
L'affaire du chantage allégué au divorce religieux
Le rabbin Moché Lewin, directeur exécutif de la Conférence des rabbins européens, propose d'« instaurer les mesures préconisées au Congrès de Berlin en , telles que la rédaction d'un contrat prénuptial ou des sanctions religieuses contre les maris récalcitrants. Mais le rabbin Gugenheim s’y oppose »[32]. Ces solutions sont pourtant appliquées au Royaume-Uni, en Israël, au Canada[33].
Au printemps 2014 éclate en France une affaire concernant un divorce religieux. Dans la tradition juive, le divorce est soumis à l'autorisation du mari qui doit par un acte écrit, le guett, permettre le divorce. En l'absence de ce document, la femme, dite agounah, ne peut se remarier religieusement.
Le rabbin Michel Gugenheim est accusé d'avoir, avec le groupe de rabbins chargés du traitement des divorces au consistoire, servi d'intermédiaire à un mari demandant 90 000 euros (avec une promesse de reçu CERFA) à sa femme pour donner le guett[34]. Dans un enregistrement effectué à son insu et rendu public, il demande à cette femme de revenir sur son témoignage effectué lors du divorce civil[34].
Ces faits causent un émoi dans la communauté juive française et la société française en général[35], le rabbin Gugenheim dénonce alors « une manipulation grossière visant à nuire à l'institution consistoriale »[36].
Cette affaire secoue les instances religieuses juives, un an après la démission forcée du grand rabbin Gilles Bernheim, à la suite d'accusations de plagiat, et un mois avant l'élection de son successeur[37], Michel Gugenheim, dont la candidature est attendue, décide, en conséquence, au début du mois de , de ne pas se présenter à cette élection[38],[39].
(en) Letters from Mir. A Torah World in the Shadow of the Shoah. The Correspondence of Ernest Gugenheim. Edited by Claude-Annie Gugenheim. Associate Editor: Martine Bendavid. Traduction de l'ouvrage paru en France sous le titre Lettres de Mir... d'un monde de Tora effacé par la Shoah. Traduit en anglais par Ken Ritter. OU Press, New York, 2014. (ISBN978-1879016569)
Notes et références
↑Elle est inhumée le même jour, vendredi 20, juin 2014, veille de Shabbat
↑Michel Gugenheim, HaMoré, Revue des enseignants et éducateurs juifs, no 157, décembre 1999, page 267
↑Le fait que Gugenheim condamne avec force l'homosexualité masculine mais n'évoque pas l'homosexualité féminine découle de la différence de traitement de ces deux types de sexualité dans la halakha. Le rapport anal masculin est considéré comme une abomination (toeva) dans la torah. La condamnation de l'homosexualité féminine n'y est pas mentionnée directement et découle des interprétations rabbiniques. Walter Homolka, Das jüdische Eherecht, Walter de Gruyter, 2009 p. 207. Sur les différences entre les règles issues de la torah et du corpus rabbinique voir De'oraita and derabanan)