En analyse, la méthode de Frobenius[ref 1], du nom du mathématicien allemand Ferdinand Georg Frobenius, est une technique d'obtention du développement en série entière des solutions d'une équation différentielle linéaire de la forme :
la variable z étant en général complexe, au voisinage du point z = a, sous réserve que p(z) et q(z) soient analytiques, ou possèdent un point singulier dit régulier en ce point. Si ces conditions sont respectées, la méthode de Frobenius permet alors de déterminer au moins une solution de la forme :
Cette méthode se généralise à une équation différentielle linéaire d'ordre p quelconque, sous réserve des conditions de régularité suffisantes sur les fonctions p k ( z ) {\displaystyle p_{k}(z)} apparaissant devant chacune des dérivées y ( k ) , k = 0 , … , p − 1 {\displaystyle y^{(k)},\quad k=0,\dots ,p-1} [ref 2].
Il est fréquent qu'il ne soit pas possible d'intégrer directement les équations différentielles, même linéaires, et d'en exprimer les solutions à partir de polynômes ou de fonctions transcendantales "ordinaires" (par exemple exponentielle, logarithme, fonctions trigonométriques…). Par ailleurs, même si une solution analytique peut être obtenue, celle-ci peut avoir une forme très complexe, et peu utilisable en pratique.
Pour toutes ces raisons, il est utile de disposer de méthodes permettant d'obtenir des formes approchées[1] des solutions d'une équation différentielle. Ces méthodes peuvent être classées en deux grandes catégories[ref 2] :
La méthode de Frobenius appartient à la première catégorie de méthodes. Comme indiqué en introduction, elle s'applique aux équations différentielles linéaires du second ordre de la forme générale :
et permet d'obtenir au voisinage d'un point z = a un développement d'au moins une solution en série entière de la forme u ( z ) = ∑ n = 0 + ∞ a n ( z − a ) n + r , ( a 0 ≠ 0 ) , r ∈ R . {\displaystyle u(z)=\sum _{n=0}^{+\infty }{a_{n}(z-a)^{n+r}},\qquad (a_{0}\neq 0),r\in \mathbb {R} .}
Le principe sera de substituer cette expression dans l'équation différentielle, et par identification terme à terme de déterminer r puis une expression des coefficients an, qui fait généralement intervenir une relation de récurrence liant entre ceux-ci.
Si du fait de la linéarité de l'équation différentielle il est toujours possible, formellement, d'effectuer cette substitution, la question de la convergence de la série, et du rayon associé, se pose. Il est utile de se placer pour cette question dans le plan complexe.
En effet, une fonction u de variable complexe (et uniforme) dérivable au voisinage d'un point z = a ∈ C {\displaystyle z=a\in \mathbb {C} } est en fait indéfiniment dérivable dans ce voisinage. Elle est alors dite analytique autour de ce point, et pour tout point contenu dans le domaine autour de a où u est analytique, elle est développable en série entière[2],[ref 3], avec une convergence uniforme dans tout le domaine considéré.
De façon générale, pour un point z = a ∈ C {\displaystyle z=a\in \mathbb {C} } une fonction de variable complexe, analytique dans un domaine r < | z − a | < R {\displaystyle r<|z-a|<R} autour de ce point, est développable en série de Laurent :
ce développement étant unique, et la convergence uniforme dans tout le domaine considéré[ref 3]. La série ∑ n = 0 n = + ∞ u n ( z − a ) n {\displaystyle \sum _{n=0}^{n=+\infty }{u_{n}(z-a)^{n}}} est la partie régulière du développement, la série ∑ n = − ∞ n = − 1 u n ( z − a ) n {\displaystyle \sum _{n=-\infty }^{n=-1}{u_{n}(z-a)^{n}}} étant la partie principale de celui-ci.
Si u est analytique en a, tous les coefficients de la partie principale de son développement de Laurent sont nuls : ce type de point est dit régulier. Dans le cas contraire, le point est dit singulier, et il est possible de distinguer :
Les notions précédentes permettent de préciser les conditions d'existence d'au moins une solution de l'équation différentielle admettant, dans un domaine de rayon non nul autour du point considéré, un développement en série entière de la forme proposée plus haut.
De fait, il est possible de démontrer alors le théorème suivant[ref 3] relatif à l'existence d'une telle solution :
Si alors p(z) et q(z) sont en plus analytiques sur le domaine | z − a | < R {\displaystyle |z-a|<R} incluant z = a, ce point sera dit ordinaire. Si ce n'est pas le cas, le point sera qualifié de singulier. Si cependant il existe, pour toute solution de l'équation différentielle, un réel s tel que lim z → a ( z − a ) s u ( z ) = 0 {\displaystyle \lim _{z\to a}{(z-a)^{s}u(z)}=0} , le point singulier est dit régulier[ref 3]. Dans le cas contraire, il sera irrégulier.
Le théorème de Fuchs (en)[ref 3],[ref 1] précise alors que z = a {\displaystyle z=a} sera un point singulier régulier si ( z − a ) p ( z ) {\displaystyle (z-a)p(z)} et ( z − a ) 2 q ( z ) {\displaystyle (z-a)^{2}q(z)} sont analytiques dans tout le domaine | z − a | < R , R > 0 {\displaystyle |z-a|<R,\quad R>0} [3].
Il est aussi possible d'étudier le caractère régulier ou singulier à l'infini, en effectuant dans l'équation différentielle le changement de variable (transformation de Möbius) w = 1 / z {\displaystyle w=1/z} , et d'étudier le comportement en w = 0.
Par suite, si en z = a {\displaystyle z=a} les fonctions p et q sont analytiques, ou sont telles que ce point soit un point singulier régulier, alors il existera au moins une solution de la forme générale u ( z ) = ( z − a ) r f ( z ) {\displaystyle u(z)=(z-a)^{r}f(z)} , avec r réel et f analytique[5] dans un voisinage a < | z − a | < R , R > 0 {\displaystyle a<|z-a|<R,\quad R>0} . Il est clair d'après ce qui précède que ce rayon de convergence R sera égal au minimum à la distance au point singulier le plus proche de z = a {\displaystyle z=a} [ref 2]. Tout ceci justifie la forme du développement proposé dans la méthode de Frobenius.
La méthode de Frobenius comporte les étapes suivantes :
Deux exemples permettent d'illustrer la méthode :