Hippone (en latin Hippo Regius) est le nom antique de la ville d'Annaba, se trouvant au nord-est de l'Algérie. Elle devint l'une des principales cités de l'Afrique romaine. Saint Augustin est évêque de la ville de 395 jusqu'à sa mort en 430 alors que les Vandales assiègent la ville[1].
Histoire
Hippone est « le golfe du roi » dont le nom remonte à la Préhistoire, à la suite d'un affaissement dans la masse cristalline du massif de l'Edough. Elle abrite un comptoir phénicien au XIe siècle av. J.-C., une agglomération punique prospère alliée de Carthage. Au IIIe siècle av. J.-C. c'est une métropole numide du roi berbère Massinissa. En 46 av. J.-C., Juba Ier, allié de Pompée, est défait par les troupes de Jules César à la bataille de Thapsus. Hippone est annexé à la province romaine d'Africa Nova, créée par Jules César.
Dans l'Empire romain, Hippone connaît la richesse et le faste. Elle est l'une des grandes villes de l’Africa Nova et son marché le plus opulent. Au Ve siècle, Hippone devient le foyer du christianisme sous l'épiscopat d'Augustin d'Hippone, évêque de la ville de 395 à sa mort en 430, qui sera canonisé par Rome en 1248.
Hippone, assiégé par les Vandales de Genséric en 430, résiste pendant quatorze mois. Les Vandales sont inexpérimentés dans l'art d'assiéger une place bien défendue[2],[3] et Genséric lève le siège[4],[5], peut-être poussé par des problèmes de ravitaillement ou de maladies[6].
Après que les renforts envoyés par l'Empire d'Orient et d'Occident ont été battus par les Vandales en 431[7], Hippone est finalement prise par ceux-ci la même année[8],[5] et intègre l'éphémère royaume vandale. Le général byzantin Bélisaire reprend la ville en 533 lors de la guerre des Vandales, et la ville retourne dans le giron romain de l'Empire byzantin. Elle assiste à l'expansion de l'islam, et, en 705, Hippone tombe alors sous la coupe des Omeyyades et sera baptisée "bilâdou el anâb (pays des jujubiers).
Au XIe siècle, les Sanhajas bâtissent la ville de Madinat Zaoui distante de trois kilomètres, occupée quelques années par les Espagnols et les Français au XVIe siècle.
Cette ville, devint plus importante qu'Hippone. Les grandes familles andalouses qui s'y fixèrent après avoir été chassées d'Andalousie la baptisèrent Bouna, et dont le théologien protecteur, qui y est enterré, est Sidi Boumarouane Charif. En 1522, le corsaire ottoman Khayr ad-Din « Barberousse » s'empare de la ville et la renomme Annaba, la ville du jujubier, « العناب » en arabe.
Le dossier archéologique d'Hippone s'ouvre au début du XIXe siècle avec la redécouverte de quelques mosaïques et épitaphes dans le quartier de la villa dite "du front de mer"[9].
Le site archéologique prend de l'importance grâce à Erwan Marec, qui parvient à convaincre le préfet de Constantine de stopper le développement du faubourg industriel qui menaçait d’engloutir d’éventuelles ruines antiques. Il est parvenu ainsi à sauver 25 ha du site antique de la destruction[à vérifier]
Basilique chrétienne
L'un des grands chantiers d'Erwan Marec sur le site archéologique d'Hippone est celui du quartier chrétien et de la recherche de la Basilique de la Paix (Basilica pacis), c'est-à-dire l'église cathédrale dans laquelle Augustin d'Hippone était évêque entre 395 et 430.
En 1958 Erwan Marec publiait un article dans lequel il attribuait sa découverte d’un édifice à trois nefs à l’antique Basilique de la Paix[10],[11].Cette basilique est d'un plan basilical, jouxtée d'un baptistère. Mais d'autres historiens et archéologues émettent des doutes sur cette attribution (Serge Lancel, Henri-Irénée Marrou, Noël Duval). Pour ces derniers, le manque de sources et de sépulture épiscopale autour de la basilique, infirme l'hypothèse de E. Marec. Il se peut néanmoins que cette basilique chrétienne soit celle des donatistes présents dans la ville à l'époque de l'épiscopat de saint Augustin[9].
Par ailleurs, les archéologues pensent qu'une seconde basilique située au sud du site archéologique, pourrait être la Basilica pacis d'Augustin. Ils y ont trouvé une grande quantité d'objets d'aspects religieux (fragments d'arceaux timbrés anépigraphes comportant une croix, une table en marbre pouvait être un autel, des épitaphes épiscopales…) et des inscriptions épigraphiques d'époque byzantine témoignant d'une forte activité religieuse permettant de conclure qu'il s'agit vraisemblablement de la Basilique antique d'Augustin à laquelle aurait succédé une importante cathédrale byzantine sur le même site[12],[13],[14].
Forum
Le forum est le lieu central de la vie politique d'une cité romaine. Celui d'Hippone comporte une vaste esplanade rectangulaire bordée par des galeries sur les côtés est, ouest et nord. Son area mesure 42m x 75m et elle est recouvert par un dallage constitué de blocs de calcaire gris bleu. Une grande dédicace "C. Paccius Africanus, pontife consul, proconsul, patron du municipe d'Hippone" permet de dater le revêtement des années 78-79 (époque flavienne).
Le forum présente les traces d'un petit temple de 9,60m x 9,10m entouré d'une colonnade.
Dégagé en 1955, le marché (macellum) constitue également un élément typique de la vie romaine. Présentant en son centre une rotonde (tholos) et bordé d’une colonnade, c’est un lieu central de la vie artisanale d’Hippone.
Thermes
On recense une dizaine d’ensembles thermaux répartis dans les différents quartiers, dont deux sont des ensembles publics. Un de ces complexes thermaux, est surnommé les «grandes thermes du nord». Avec un frigidarium d’une superficie de 450m²
Un système de canalisations permet à la ville d’alimenter en continu les thermes et les nombreuses fontaines publiques dont nous avons des traces par la présence de bouches de fontaines retrouvées sur le site archéologique. De grandes citernes construites sous Hadrien permettent de stocker l'eau en grande quantité[9].
Notes et références
↑Fernand Braudel, Grammaire des civilisations (1963), Flammarion, 2008, chap. II-Christianisme, humanisme, pensée scientifique, p. 453.
↑Erwan Marec, Monuments chrétiens d’Hippone, ville épiscopale de saint Augustin, Paris, Arts et métiers graphiques, , 260 p.
↑Jean-Pierre Laporte, « Hippone: à la recherche de la basilique de saint Augustin », Revue d'études augustiniennes et patristiques, vol. 61, , p. 299-324 (lire en ligne)
↑Henri-Irénée Marrou, « Epitaphe chrétienne d'Hippone à réminiscences virgiliennes », Publications de l'École Française de Rome, vol. 35, no 1, , p. 129–144 (lire en ligne, consulté le )
↑Anne Michel, « Aspects du culte dans les églises de Numidie au temps d’Augustin : un état de la question », dans Serge Lancel, Saint Augustin : La Numidie et la société de son temps, Ausonius Éditions, coll. « Scripta Antiqua », , 67–108 p. (ISBN978-2-35613-297-0, lire en ligne)
Voir aussi
Bibliographie
: document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.
André Mandouze, Prosopographie chrétienne du Bas-Empire, 1 : Prososopographie de l’Afrique chrétienne (303-533), Paris, Éditions du Centre National de la Recherche Scientifique, (ISBN978-2-222-02174-2, lire en ligne).
(en) Andy Merrills et Richard Miles, The Vandals, Wiley-Blackwell, , 368 p. (ISBN978-1-4051-6068-1).
(en) Andreas Schwarcz, « The Settlement of the Vandals in North Africa », dans A. H. Merrills, Vandals, Romans and Berbers. New Perspectives on Late Antique North Africa, Burlington, VT, Ashgate, (ISBN9781138252684), p. 49-57.
(en) Jeroen W. P. Wijnendaele, The Last of the Romans, Bonifatius, Warlord and Comes Africae, London, Bloomsbury Academic, (ISBN978-1-78093-717-5).