Dirigé par le nouveau président du Conseil des ministres indépendant Giuseppe Conte, ce gouvernement est constitué et soutenu par une alliance politique inédite, dite « antisystème » ou « jaune-verte », et ou « governo del cambiamento » (gouvernement du changement selon le programme commun adopté par les deux partis[1]), entre le Mouvement 5 étoiles (M5S) et la Ligue (Lega). Ensemble, ils disposent de 353 députés sur 630, soit 56 % des sièges de la Chambre des députés, et 170 sénateurs sur 320, soit 53 % des sièges du Sénat de la République.
Le mandataire présidentiel Giuseppe Conte présente sa liste de ministres le au président de la République, Sergio Mattarella[2]. Le cabinet est investi le lendemain, après une crise politique de 88 jours, ce qui en fait la plus longue de la République italienne[3],[4].
Il compte 18 ministres, dont cinq femmes et six personnalités indépendantes. Deux nouveaux postes sans portefeuille sont créés, pour la Famille et pour les Affaires européennes, tandis que celui pour le Sport est supprimé. Pour le ministre chargé du développement des régions méridionales du pays, le terme de « Sud » est préféré à « Mezzogiorno ». Il s'agit de la première équipe depuis à compter deux vice-présidents du Conseil. L'un d'eux — Luigi Di Maio — assume d'ailleurs la direction de deux ministères, celui du Développement économique et celui du Travail. Riccardo Fraccaro devient le tout premier ministre de la démocratie directe[5].
D’après le journaliste Matteo Pucciarelli, « le M5S prend la direction des ministères dotés d’un fort poids socio-économique, tandis que la Ligue obtient ceux qui revêtent une dimension symbolique et identitaire. [...] Mais la formation du gouvernement est, depuis le début, soumise à la surveillance de l’« État profond » italien : la présidence de la République (M. Sergio Mattarella), la Banque d’Italie, la Bourse et, surtout, la Banque centrale européenne. Celui-ci veille à ce que les ministères qui comptent vraiment en matière d’économie (les finances et les affaires européennes) échappent aux deux partis. » Aussi, le président Sergio Mattarella emploie son droit de véto pour empêcher la nomination de ministres jugés défavorables aux orientations de l’Union européenne (c'est notamment le cas de Paolo Savona, initialement nommé au ministère de l’Économie et finalement remplacé par Giovanni Tria)[6].
Votes de confiance
Le , après un discours de Giuseppe Conte devant le Sénat d'une durée de 1 h 15, le plus long de l'histoire parlementaire italienne[7], le gouvernement obtient la confiance par 171 votes pour, 117 contre et 25 abstentions[8]. Le résultat final confirme les prévisions antérieures au vote : les 167 élus des deux partis de l'alliance (respectivement 109 M5S et 58 Ligue) ont voté pour, ainsi que deux ex-M5S (Maurizio Buccarella et Carlo Martelli) et deux élus de l'étranger, ceux du MAIE et de l'USEI (Ricardo Merlo et Adriano Cario). Le , le gouvernement remporte le vote de confiance à la Chambre des députés avec 350 voix pour, 236 contre et 35 abstentions[9].
Principales mesures
Le , Giuseppe Conte annonce que l'Italie ne modifiera pas son projet de budget pour 2019 malgré le non-respect des critères européens en matière de réduction de la dette publique mis en avant par la Commission européenne (elle réclame au pays quatre milliards d’euros d’économies en plus de 7,5 milliards déjà consentis)[10]. En , l'ouverture d'une procédure de sanction à l'égard de l'Italie est alors justifiée par l'Union européenne pour ces manquements[11]. Le déficit prévu pour l'année 2019 (2,4 %) s'inscrit cependant dans la continuité des années précédentes (2, 5 % en 2016 et 2,3 % en 2017)[12].
Finalement, le gouvernement italien accepte de reporter de six mois la mise en place du revenu universel, proposé par le M5S, et l’abaissement de l’âge légal de départ à la retraite, défendu par la Ligue[13],[14]. La loi de finances pour 2019 prévoit ainsi un déficit public de 2,0 % du PIB (contre 2,4 % initialement) et une croissance ramenée à 1 % (contre 1,5 % auparavant)[15]. Le , les députés italiens approuvent ce nouveau budget 2019, revu à la baisse[16]. Le gouvernement promet des privatisations massives à la Commission européenne. Les actifs cessibles devraient être essentiellement immobiliers, les gouvernements précédents ayant déjà privatisé la plupart des entreprises publiques[17].
Une amnistie fiscale, mesure défendue par la Ligue, est adoptée afin d'éponger les contentieux dans la limite de 500 000 euros. Une baisse de la fiscalité pour le petit patronat et les travailleurs indépendants est également décidée. Elle devrait par la suite concerner l’ensemble de l’impôt sur les sociétés, selon un mécanisme de flat tax (système d’imposition à taux unique) tout en avantageant principalement les revenus les plus élevés[12].
Le , alors que des dissensions commencent à apparaître entre les deux partenaires, Conte menace de démissionner si ces derniers persistent[19]. Après que le M5S et la Ligue ont voté différemment au Sénat concernant le soutien au projet de ligne ferroviaire Lyon-Turin, Matteo Salvini annonce publiquement le la fin de la coalition et demande la tenue d'élections législatives anticipées. Giuseppe Conte dénonce ce propos et appelle son vice-président à rendre des comptes devant le Parlement, ce à quoi la Ligue réplique en déposant une motion de censure[20]. Cette dernière est retirée onze jours plus tard sur la demande de Salvini après l'annonce de la démission du gouvernement lors de la séance au Sénat[21].
Le , neuf jours après la démission de Giuseppe Conte, le président de la RépubliqueSergio Mattarella confie à Conte le mandat de constituer un nouvel exécutif. Il prend cette décision à la suite de l'accord de principe entre le M5S et le PD pour former une nouvelle majorité[22],[23],[24]. Il présente son équipe le [25],[26].
Le sont nommés les 6 vice-ministres et 39 secrétaires d'Etat qui prêtent serment le lendemain[27] :
(« on. » vaut pour député et « sen. » pour sénateur)
↑(it) « Roberto Saviano accoglie il "governo del cambiamento" con un vecchio video di Di Maio: "Mai con la Lega Nord" », HuffPost, (lire en ligne, consulté le ).
↑(it) Carmelo Lopapa, « Governo, Conte accetta l'incarico e presenta la lista: 18 ministri, 5 le donne. Tria all'Economia », La Repubblica, (lire en ligne, consulté le ).
↑« Italie : le nouveau chef du gouvernement, Giuseppe Conte, a prêté serment », Le Monde, (lire en ligne, consulté le ).
↑(it) Nicola Graziani, « Cosa ricorderemo degli 88 giorni della "crisi più pazza della storia della Repubblica" », Agenzia Giornalistica Italia, (lire en ligne, consulté le ).
↑« Après le coup de force de Salvini, l'Italie plongée dans la crise », Le Point, (lire en ligne, consulté le ).
↑« En Italie, le président du conseil, Giuseppe Conte, annonce sa démission », Le Monde, (lire en ligne, consulté le )
↑(it) « Da Matarella incarico a Conte che accetta con riserva. Il premier incaricato: "Tutti paghino le tasse ma meno" », La Repubblica, (lire en ligne, consulté le )
↑(it) « Governo Conte 2, ecco i ministri del nuovo esecutivo M5s-Pd: da Gualtieri al Tesoro a Lamorgese all’Interno. Tutte le biografie », Il Fatto Quotidiano, (lire en ligne, consulté le )
↑« Italie : les sociaux-démocrates et le M5S, anciens partis ennemis, forment un gouvernement », Le Monde, (lire en ligne, consulté le )