Ferdinand Heinrich Thieriot naît dans une vieille famille de marchands huguenote de Leipzig, dont les racines remontent à 1703. Son grand-père, Paul Emil Thieriot, était violoniste amateur[1], philologue et ami du poète Jean Paul. Son père, Theodor Heinrich Thieriot (né le 20 février 1815 à Leipzig), est installé à Hambourg depuis 1835. Ferdinand a cinq frères et sœurs.
Son grand-père encourage l'enfant à apprendre le piano et le violoncelle – avec Louis Lee[2] –, mais les leçons de musique lui pèse. Son père l'imagine plutôt avoir une bonne compétence de marchand. C'est quand il aide celui-ci à quelques tâches subalternes qu'il comprend que la pratique instrumentale n'est pas si mauvaise après tout[1].
Après sa formation, il travaille à Hambourg, puis à Leipzig (1867) en tant que chef au théâtre à Ansbach[3], et de 1868 à 1870 à Glogau (aujourd'hui Głogów), en tant que chef de la Singakademie (académie de chant). Enfin comme directeur artistique du Musikverein de Styrie à Graz pendant quinze ans, dès octobre 1870. Il était en concurrence avec Heinrich von Herzogenberg, natif de Graz, qui était aussi un ami de Brahms et avec qui l'épouse, Elisabeth von Stockhausen, avait étudié le piano. La direction du Steiermark, après avoir pris l’opinion de Brahms à propos de Thieriot, a opté en sa faveur. À Graz, Thieriot est directeur artistique et en 1875-1876 Musikdirektor. Son mandat était clairement formulé avec des contraintes et autorisations préalables. Avec les nombreuses célébrités qui venaient jouer à Graz, il contribue à l'apogée de la vie musicale, notamment en jouant beaucoup Wagner.
Entre 1870 et 1877, en plus de sa charge, Thieriot enseigne l'harmonie à l'école de musique. Parmi ses élèves les plus réputés on trouve la violoniste Marie Soldat-Röger et le compositeur roumain George Dima. Après 1895, Thieriot travaille comme compositeur indépendant entre Leipzig et sa ville natale. Il est membre du conseil d'administration de la Bach Gesellschaft (1897).
En 1902, il reprend définitivement le chemin de Hambourg, où il vit jusqu'à sa mort. Il est président de la Hamburg Tonkünstlerverbandes et plus tard membre honoraire. Ont lieu dans la ville hanséatique de nombreuses représentations de ses œuvres par la Philharmonique de Hambourg et l'Académie de chant, sous la direction de ses principaux promoteurs et amis : Julius Spengel, Gustav Kogel et le chef Siegmund von Hausegger[4], ou bien au Gewandhaus de Leipzig. Ses œuvres reçoivent toujours de très bonnes critiques. Par exemple sa symphonie en ut dièse mineur le sous la direction de Julius Spengel : « Thieriot a finalement évolué à partir de sa modestie de longue date et peut maintenant être cité en compagnie de Brahms et de Bruckner »[5].
Comme violoncelliste, outre le concertiste, Thieriot était un partenaire convoité pour la musique de chambre. Il a participé aux quatuors Casper et Payne, avec Theodor Billroth, créant de nombreuses œuvres de Brahms (un ami de Billroth).
Ferdinand Thieriot meurt à Uhlenhorst, un quartier de la rive Est de l'Alster, le lac de Hambourg[6].
Redécouverte
Le quasi-oubli de Thieriot s'explique en partie par ses choix (Graz, Hambourg ou Leipzig plutôt que Vienne) et la disparition des manuscrits à la fin de la guerre, échoués à Leningrad jusqu'en 1991[7]. Vingt-neuf de ces manuscrits furent publiés depuis en Allemagne chez AlbisMusic, Renaissance Verlag à Haale, ou par Amadeus Verlag à Winterthour (Suisse).
En 1936, le musicologue Wilhelm Altman notait que Thieriot était à tort « parmi les compositeurs qui sont maintenant oubliés »[8]. Jusqu'à aujourd'hui, il n'existe toujours pas d'études musicologiques systématiques de son œuvre symphonique[6].
Style
Ferdinand Thieriot était selon l'opinion de Johannes Brahms – son ami depuis ses années d'adolescence – et le critique et compositeur hambourgeois Ferdinand Pfohl« l'un des compositeurs les plus respectés qui ont émergé de Hambourg[9] ». De même le lauréat du prix Mozart, Arnold Krug, ainsi que Theodor Kirchner, qui tous deux travaillaient à Hambourg, reconnaissaient ne pas pouvoir atteindre la diversité de ses compositions. Le musicologue Hermann Kretzschmar a écrit sur Thieriot en 1895 : « ...une contribution à la musique romantique, dont l'insolite se caractérise par invention simple, naturelle, par la grâce, par l'ambiance gracieuse, noble et pur. Il écrit avec une parfaite maîtrise de la forme et de l'expression[9] ».
Thieriot possédait le don d'un lyrisme légèrement ombragé et une grande inventivité mélodique. Son style peut se rapprocher de diverses tendances, allant à ses débuts de Mendelssohn, Spohr et Schumann ou Brahms à Bruckner (dernière des dix symphonies)[2] et Verdi dans ses œuvres tardives. Il est le représentant musical le plus remarquable de la période Biedermeier[10].
La musique de chambre de Thieriot constitue la majeure partie de sa production et est jugée comme étant ses plus belles compositions. Il est connu pour avoir composé quatre trios avec piano (opus 14, 45, 47 et 90), 13 quatuors à cordes, dont deux seulement ont été publiés, 2 octuors (opus 78, pour 4 violons, 2 altos et 2 violoncelles et opus 62, pour 2 violons, alto, violoncelle, contrebasse, clarinette, cor et basson), un quatuor avec flûte (opus 84), un quintette pour piano et vents (opus 80), un quintette pour piano et quatuor à cordes (opus 20) et plusieurs sonates instrumentales. En plus de ce qui précède, plusieurs compositions en manuscrit attendent une publication.
Catalogue des œuvres
Musique pour claviers
Piano
Natur und Lebensbilder, op. 17 & op. 18
Sechs Phantasiestücke, op. 22
Durch die Puszta, op. 23
Trois Impromptus, op. 35 (Lübeck, 1881)
Deux Klavierstücke, op. 36 Intermezzo-Humoreske
Trois Klavierstücke op. 37 [Toccata]-Quasi Gavotte-Intermezzo
Deux Stücke pour 2 piano op. 38
Trois pièces pour piano (facile), op. 39
Trois Sonatines pour piano, en ut, fa et sol majeur, op. 71 (Leipzig, 1898)
Zwei Stücke militärischen Charakters op. 82 (Leipzig, 1904)
Albumblatt en fa dièse majeur
Andantino quasi allegretto en si-bémol majeur
Bagattelle, en la majeur
Tanz-Caprice, en ré majeur
Caprice, en mi-bémol majeur
Einweihungsklänge zu einer Festlichkeit, en ut majeur
Fughetta scherzanda en ré majeur
Fughetta scherzanda en sol majeur
Gavotte en sol majeur
Gigue en si mineur
Humoreske en mi majeur
Lied ohne Worte en mi majeur
Molto vivae en fa mineur
Narratio en la majeur
Presto en la mineur
Romanze en mi majeur
Toccatina en fa majeur
Traum en mi majeur
Variationen über ein eigenes Thema en mi bémol majeur
Variationen en mi majeur, op. 65
Vergangenheit en ré mineur
Walzer en la mineur
Walzer en la-bémol majeur
Walzer en ré-bémol majeur
Zwei Fantasiestücke en ut mineur et ré majeur (Leipzig, 1867)
Humoreske en mi majeur
Klage en sol-dièse mineur
Piano à quatre mains
Sechs Klavierstücke zu vier Händen op. 34 Heft I, Heft II
Sechs Klavierstücke zu vier Händen op. 46 im Umfang von 5 Tönen
Zwei Klavierstücke op. 40
Allegro non troppo, en sol majeur
Andante tranquillo, en la mineur
Cavallerie en si bémol majeur Légende pour piano
Doppelfuge, en ré mineur (Graz, 1871)
Humoreske, en sol majeur
In den Gefilden Terpsichore´s Reigen-Cyclus pour piano (Hambourg, 1918)
Klavierstück, en ut majeur
Sonate pour piano, en fa mineur
Dritte Tanzsuite pour piano
Stück, en ré-bémol majeur
Stück, en fa mineur
Zur Karnevalszeit 4-händige Silhouetten
Zwei Tanzweisen, en sol majeur pour piano
Vom Donaustrande, op. 64
Thème et variations pour 2 pianos, op. 66
Orgue
Festhymne en si majeur, op. 85/1
Passacaglia (sous forme libre) op. 85/2
St. Petri Präludium en mi-bémol majeur, op. 85/3
Orgelfuge en mi-bémol majeur, op. 85/4 fugae regulariter suspectus
Idylle en mi majeur, op. 85/5
Choralbearbeitung Gelobet seist du Jesu Christ, op. 85/6
Choralvariationen Wer nur den lieben Gott lässt walten, op. 85/7
Choral In allen meinen Thaten, op. 85/8
Musique de chambre
Soliste et clavier
Divertimento all´ongarese, pour violoncelle et piano, op. 10
2 Adagios pour violoncelle et orgue, op. 41
Abendstimmung pour violon et orgue (ou piano)
Larghetto en sol majeur, pour violon et orgue
Larghetto en si mineur, pour alto et orgue
Largo en ré mineur pour violon et piano
Sérénade en sol majeur, pour violoncelle et piano
Sonate en mi-bémol majeur, pour cor (ou violoncelle) et piano (1915)
Sonate en si-bémol majeur, pour violoncelle et piano, op.15 (Leipzig, 1860)
Sonate im leichtern Style [dans le style facile], op. 56
Sonate en ut majeur, pour violoncelle et piano
Sonate en ré majeur, pour violoncelle et piano
Sonate en la majeur pour violon et piano, op. 58
Sonate no 3 en sol majeur, pour violon et piano (Hambourg, 1910)
Suite en si bémol majeur, pour violon et piano
Thème et variations en sol majeur pour violoncelle et piano
Thème et variations pour 2 violoncelles et piano, op. 29 (1883) Dédié à son premier professeur, le violoncelliste Louis Lee (1819–1896).
Avec piano
Sérénade en si-bémol majeur, pour flûte, hautbois, clarinette, cor, basson et piano
Quintette avec piano en ré majeur, op. 20 (1869, éd. révisée 1894)
Quatuor avec piano no 2 op. 30 (Leipzig, 1875)
Quatuor avec piano en sol mineur (Hambourg, 1905)
Quatuor avec piano en fa majeur (Hambourg, 1913)
Trio avec piano en fa majeur (Hambourg, 1856)
Trio avec piano en ré majeur, op. 1 (Hambourg, 1858)
Zwei leichte Trios zum Gebrauch beim Unterricht op. 3 (sol majeur et ut majeur) (Hanovre, 1859)
Zwei leichte Trios op. 12 (ré majeur et la mineur) (Hambourg, 1867)
Trio avec piano en fa mineur, op. 14 (Leipzig, 1868) Dédié à J. Brahms
Trio avec piano en la majeur (Graz, 1873)
Trio avec piano en si-bémolmajeur, op. 45 (Leipzig, 1890)
Trio avec piano en mi majeur, op. 47 (Leipzig, 1890 chez Ernst Eulenburg)
Trio avec piano en mi-bémol majeur (Leipzig, 1894)
Quintette avec piano en la mineur pour piano, hautbois, clarinette, cor et basson, op. 80 (Leipzig, 1903 ; Reprint Warngau, 2005)
Trio avec piano en mi mineur, op. 90 (Leipzig, 1909)
Trio avec piano en ré majeur (Hambourg, 1916)
Musique de chambre sans clavier
Octuor en si bémol majeur, op. 62 pour clarinette, hautbois, cor, basson, quatuor à cordes, contrebasse (Leipzig, 1887 ; éd. 1893) Dédié à C.L Bargeer, premier violon et élève de Spohr et Joachim.
Octuor en ré mineur
Choral pour 3 violoncelles, Ist Gott mein Schutz und treuer Hirt
Suite en ré majeur pour 3 violoncelles
Trio à cordes no 1 en ut majeur (Winterthur, 2004)
Trio à cordes no 2 en la mineur (Winterthur, 2003)
Quatuor à cordes en la majeur, op. 83, (Leipzig, 1905)
Quatuor à cordes no 2 en ut majeur, op. 93 (1911)
Quatuor à cordes en mi majeur
Quatuor à cordes en sol majeur, op. 84 (Winterthur, 2005)
Quatuor à cordes en la-bémol majeur (Winterthur, 2005)
Quatuor à cordes en mi mineur
Quatuor à cordes en la mineur
Quatuor à cordes en si bémol majeur
Quatuor à cordes en ut mineur (Winterthur, 2004)
Quatuor à cordes en ré majeur (1913)
Quatuor à cordes en si mineur (Winterthur, 2003)
Quatuor à cordes en sol mineur (Winterthur, 2003)
Quintette à cordes en sol majeur (1914)
Sextuor à cordes en ré majeur
Octuor à cordes en ut majeur, op. 78 (1903)
Quatuor avec flûte en sol majeur, op. 84 (Leipzig, 1905)
Quintette avec flûte en fa majeur
Quintette avec clarinette en mi-bémol majeur (Leipzig, 1897)
Musique avec orchestre
Symphonies et ouvertures
Symphonie no 2 en fa majeur
Symphonie no 3 en ut majeur
Symphonie no 5 en ut dièse mineur. Création à Hambourg, le sous la direction de Julius Spengel.
Quintette en mi-bémol majeur pour clarinette quatuor à cordes - Stephan Siegenthaler, clarinette ; Quatuor Stamic (5–7 décembre 2005, Sterling Records CDA 7674-2) (OCLC758442733)
Quintette avec piano, op. 20, Thème et variations, op. 29°, Sextuor à cordes en ré majeur° - The Hamburg Chamber Players : Ian Mardon et Ilona Raasch, violons ; Rudolf Seippel, alto ; Martin von Hopffgarten et Rolf Herbrechtsmeyer° violoncelles ; Yuko Hirose, piano (28–30 septembre 2007, Musique de chambre vol. 1, Toccata Classics TOCC0080)[12],[7] (OCLC824603728)
Bach-Thieriot, Sonates en trios no 1, BWV 525, pour 2 pianos - Claudine Orloff et Burkard Spinnler, pianos (6–9 avril 2010, Fuga Libera FUG-572)[13] (OCLC894588341)
↑Dans sa revue du disque, Jerry Dubins (Fanfare, novembre 2013) affirme que le quintette peut aisément rivaliser avec ceux de Schumann, Dvořák et Brahms.
(de) Ferdinand Bischoff, Chronik des Steiermärkischen Musikvereines. Graz 1890 (OCLC894634064)
(de) Hermann Kretzschmar, Führer durch den Concertsaal. I. Band, 3. Auflage, Leipzig 1898 (OCLC9067183)
(de) Wilhelm Altmann, Handbuch für Streichquartettspieler. Bd. 1, 1927; Bd. 2; Bd. 3, 1929; Bd. 4, 1930
(de) Wilhelm Altmann, Handbuch für Klaviertriospieler. Wolfenbüttel 1934 (OCLC3356510)
(de) Wilhelm Altmann, Handbuch für Klavierquintettspieler, Wolfenbüttel, Verlag für musikalische Kultur und Wissenschaft, , 178 p. (OCLC906405840)
(de) Wilhelm Altmann, Handbuch für Klavierquartettspieler. Wolfenbüttel 1937 (OCLC311660321)
(de) Neue Zeitschrift für Musik, Nr. 6 vom 5. février 1869, p. 47
(de) Johannes Hohlfeld, Die reformierte Bevölkerung Leipzigs 1700-1875, Leipzig, 1939 (OCLC174223430)
(de) Matthias Keitel, Der Nachlass Ferdinand Thieriot in der Staats- und Universitätsbibliothek Hamburg Carl von Ossietzky. Konzept und exemplarische Umsetzung der Erschließung. Diplomarbeit. Hamburg: Fachhochschule Hambourg, Fachbereich Bibliothek und Information, 2000.
Franz Pazdírek, Manuel universel de la littérature musicale ; guide pratique et complet de toutes les éditions classiques et modernes de tous les pays, 28 vol. Paris, Costallat 1904 lire en ligne sur archive.org (OCLC69659344)
Notes discographiques
(en) Walter Zielke (trad. Julia Zielke (en)), « Musique de chambre vol. 1 », p. 2–8, Londres, Toccata Classics (TOCC0080), 2009 (Lire en ligne) .