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Chesney Henry Baker Jr. naît à Yale (Oklahoma) le [2]. Sa mère est employée dans une parfumerie et son père est musicien professionnel jusqu'à la Grande Dépression[3]. Sa famille déménage en Californie lorsqu'il a dix ans[2].
Son père, qui continue de jouer de la guitare dans un groupe de country local, offre à son fils un trombone pour ses douze ans[4]. Chesney, qui est un admirateur d'Harry James, échange alors rapidement l'instrument contre une trompette[3],[4]. Il commence à en jouer à Glendale, dans l'orchestre scolaire, où il se découvre une passion pour le saxophoniste Lester Young[3].
L'année 1952 marque le début de sa renommée[2],[5]. Il remporte un premier succès auprès de Charlie Parker, en réussissant une audition pour l'accompagner en tournée sur la côte ouest des États-Unis et au Canada[4]. Surtout, il se révèle au sein du quartet sans piano (pianoless quartet) du saxophoniste baryton Gerry Mulligan[2],[3],[4],[5]. Son solo dans My Funny Valentine, ou encore dans Walkin’ Shoes ou Bernie’s Tune, fait connaître sa voix de ténor délicate et sans vibrato, d'un genre cool jazz[2],[5].
Cette année-là, il grave également ses premiers témoignages discographiques sous la responsabilité de Harry Babasin, et commence à jouer avec Vido Musso et Stan Getz.
Début 1953, le saxophoniste Lee Konitz se joint au quartet à plusieurs reprises. Mulligan forme un tentet auquel participe Chet.
En juin 1953, Baker est arrêté et condamné à six mois de prison avec sursis pour détention de stupéfiants[3]. Un mois plus tard, Chet Baker forme son propre quartet (1953-54) avec Russ Freeman au piano. De l'été 1953 à l'été 1955, Chet enregistre abondamment et dans divers contextes, quartet, sextet, septuor, avec ensemble à cordes. Il est entouré par des pointures du Jazz West Coast tels Bud Shank, Zoot Sims, Jack Montrose, Shelly Manne.
Un disque va connaître un véritable triomphe à travers tout le pays : Chet Baker Sings (1954-1956). Chet devient une icône américaine, à la fois rebelle et fragile. Les photos de son ami William Claxton contribuent à véhiculer cette image idéalisée de playboy. Avec ses premiers cachets, Chet achète ses premières automobiles, une passion qui l'accompagnera toute sa vie. En 1954, Chet Baker est élu trompettiste de l'année par tous les référendums des magazines de jazz, « ce que Miles Davis apprécie modérément »[3].
En septembre 1955, il se rend pour la première fois en Europe. Il signe rapidement un contrat avec le label français Barclay. Il enregistre dès le mois d'octobre avec son groupe des faces composées pour la plupart par Bob Zieff. Quelques jours plus tard, son pianisteDick Twardzik meurt d'overdose dans sa chambre d'hôtel. Accusé par les parents du pianiste, Chet décide malgré tout de poursuivre la tournée et enregistre à la tête de diverses formations, surtout françaises.
Après sept mois en Europe, Chet revient aux États-Unis début 1956. A la suite d'une longue tournée sur la côte Est, il revient à Los Angeles et grave de nombreux disques, notamment aux côtés du saxophoniste Art Pepper (The Route (1956), Playboys (1956). À la fin de l'année, il est arrêté une nouvelle fois en possession de stupéfiants. Au cours de l'année 1957, sa dépendance à l'héroïne se fait plus intense. En 1958, il signe avec le label Riverside et enregistre plusieurs albums dont Chet avec Bill Evans et Philly Joe Jones.
De nouveau en Europe de 1959 à 1964, il est arrêté, emprisonné ou expulsé à plusieurs reprises en Allemagne et en Italie. Ses ennuis avec la justice sont largement couverts par la presse à scandales. Avec sa nouvelle épouse Carol, il a trois enfants, Dean (1962), Paul (1965) et Melissa (1966). Il rencontre aussi en Europe des amis, de nombreux musiciens et un public plus réceptif que le public américain[réf. nécessaire]. Il s'initie alors au bugle à Paris.
En 1965, Chet Baker revient aux États-Unis et enregistre une série de disques pour le label Prestige. Sa popularité n'est plus celle des années 1950 et il a des difficultés à trouver des engagements. En 1966, il est agressé par des dealers à San Francisco ; sa mâchoire fracturée, ses nombreuses dents cassées l'empêchent de jouer ; il connaît une longue traversée du désert mais, après plusieurs années d'apprentissage à jouer avec un dentier, il remonte sur scène en 1973.
En 1986, il est filmé en live au Ronnie Scott's de Londres par Stephen Cleary et Robert Lemkin, accompagné de Riccardo Del Fra à la contrebasse, Michel Grailler au piano, Van Morrison et Elvis Costello au chant[7]. Bertrand Fèvre à Paris, le 25 novembre 1987, le filme avec Riccardo Del Fra à la contrebasse, George Brown et Alain Jean-Marie au piano.
Ses nombreux voyages s'achèvent le 13 mai 1988 : il est retrouvé mort à Amsterdam, à l'age de 58 ans, après être tombé par la fenêtre de sa chambre du deuxième étage de l'hôtel Prins Hendrik. Sa chute est survenue après la prise d'importantes quantités de cocaïne et d'héroïne[8] et fut attribuée à un suicide. Une plaque commémorative lui rend hommage sur la façade.
D'emblée témoignant délicatesse, fragilité, son style évolue dans la deuxième partie de sa carrière : son jeu semble souvent à la limite de la rupture, alternant léger staccato et legato, en de longues phrases sinueuses, sensuelles et vaporeuses, souvent dans le registre grave, soulignées par des effets de souffle et par la proximité du pavillon avec le microphone. Il maîtrise surtout à merveille l'art de la ballade[Note 1].
Son chant présente les mêmes caractéristiques, même dans l'improvisation « scat », pourtant fort éloignée de l'exubérance d'un Dizzy Gillespie ou d'une Ella Fitzgerald. Ses improvisations restent surtout dans un registre médium loin des envolées suraiguës de Dizzy Gillespie.
Le bassiste Riccardo del Fra, qui a longtemps joué avec Chet, explique sa conception particulière de la musique[9] :
« Je sentais chez lui une profondeur qui me bouleversait, j'ai aussi appris avec lui le contrôle de soi-même : c’est-à-dire essayer de faire l'essentiel. La perfection, on le sait, n'existe pas. Mais lui, quand il joue, il en est très proche. Et quand on joue avec lui, il faut vraiment servir la musique et se libérer de son ego. Disons que sa virtuosité est plus magique que technique. »
Son œuvre exprime, par antithèse, un lyrisme délicat et pudique.
Discographie
Discographie générale
1953-1966
1953 :
Haig '53: the other pianoless quartet (Philology)
L.A get together (Fresh Sound)
The Chet Baker Quartet (Pacific Jazz) avec Russ Freeman
Chet Baker Quartet featuring Russ Freeman (Pacific Jazz)
1953 : Lee Konitz Plays With The Gerry Mulligan Quartet (World Pacific)
1953 : Gerry Mulligan Tentet (Capitol)
1957 : Reunion
1952-1958 : The Complete Pacific Jazz Recordings of the Gerry Mulligan Quartet with Chet Baker
1974 : Carnegie Hall Concert (CBS) with G.M. (b.sax), Chet Baker (trp), Ed Byrne (trb), Bob James (p), John Scofield (g), Ron Carter (b), Harvey Mason (d), Dave Samuels (vb)
1988 : Chet's Romance, documentaire de Bertrand Fèvre, portrait musical, hommage à Chet Baker, au jazz, au cinéma, réalisé en 1987 en France et sorti en 1988 (Sélection officielle au Festival de Cannes 1988, New York 1988, Golden Gate Award 1989, César du court-métrage documentaire 1989, prix de la critique Novais Teixeira 1989), Chet Baker interprète I'm a fool to want you en direct, tourné en cinémascope Noir et Blanc.
1988 : Let's Get Lost, documentaire musical[11] par le photographe et cinéaste américain Bruce Weber, évoque avec grâce et émotion la vie de ce trompettiste blanc, alternant habilement la jeunesse prometteuse et la fin de vie marquée par la dépendance à la drogue et une saisissante déchéance physique.