La burlesque (burlesca en italien, Burleske en allemand[1]), en tant que genre musical, est une composition instrumentale le plus souvent brève, de style libre et de caractère gai[2],[3], proche du scherzo et du capriccio[2].
Le terme dérive du bas latinburra (« broutille » ou « bagatelle »)[4].
Le philosophe et musicologueVladimir Jankélévitch propose la définition suivante : « s'il fallait trouver un nom pour une catégorie qui est au-delà du comique et du tragique, et dont la passion de l'étrangeté est la source, c'est le mot burla qui conviendrait le mieux, par-delà la disjonction du triste et du gai[5] ». Selon lui, Franz Liszt est « à l'origine de la burla ainsi entendue. L'humeur burlesque oscille entre le bouffon et le macabre[6] » : « il arrive que les éclats de rire tournent au sarcasme, que le scherzo des rires devienne danse macabre[7] ».
Caractéristiques
Dans le Musichalisches Lexikon (1732), le compositeur Johann Gottfried Walther dit des Burleske Ouvertüren qu'elles font alterner des mélodies « sérieuses » et des mélodies de caractère « risible », avec des sauts de quintes et d'octaves, notamment[4],[8]. Bernd Alois Zimmermann compose une « cantate burlesque », en 1948, Lob der Torheit (Éloge de la folie) sur un texte de Goethe.
Chez François Couperin, le qualificatif de « burlesque » est présent dans le Troisième livre de pièces de clavecin (1722), 18e ordre, avec Le Gaillard-boiteux, « dans le goût Burlesque » (qui présente des sauts d'octave). Dans le Quatrième livre de pièces de clavecin, l'Arlequine du 23e ordre est indiquée « Grotesquement » et la 2e partie des Satires (du même ordre) est notée « Vivement, et dans un goût Burlesque »[4],[8].
Vladimir Jankélévitch, évaluant l'influence de la musique de Chabrier sur celle de Ravel, évoque « le polichinelle de la Joyeuse Marche qui entre comme le tonnerre en éclatant de rire et faisant des cabrioles, et qui agite tous ses grelots ; ce grossier personnage, avec sa trogne, son nez postiche, sa bosse et, sur les joues, ses deux taches de vermillon, aurait vite fait de casser toutes les porcelaines d'Adélaïde ! Quel rapport entre cette Burla bon enfant et l'humour un peu acide de Ravel le pince-sans-rire ? » Chabrier, « lâché en pleine musique, ressemble à ces démons de la farce dont parle Kierkegaard dans La Répétition, fils du caprice, ivres de rire et dansant de joie[9] ».
Jankélévitch considère que « le Scherzo et le Capriccio ludiques émiettent le lourd passé d'une histoire irréversible, la Burla s'éparpille en bons mots et en pointes[10]… »
Répertoire
Entre les XVIIIe et XXe siècles, le genre de la burlesque est notablement illustré pour des formations instrumentales très diverses[4],[8] :
Johann Ludwig Krebs : bourlesca positionnée entre une sarabande et un menuet dans la Partita no 2 pour clavier, qui présente quelques « surprises mélodiques et harmoniques »[8],[4] ;
Robert Schumann, auteur de diverses Burlesken ou Burle, reprises d'un recueil de 12 Burlesken composées en 1832 comme pendant des Papillons op. 2, dont des pièces sont ensuite intégrées dans les Albumblätter pour piano op. 124 (1854, no 12, Burla, sur un rythme de marche presto) et la Sonate pour piano op. 11 (3e mouvement, Scherzo e Intermezzo, dont l'Intermezzo est noté « Lento, Alla burla, ma pomposo » et tient lieu de 2d trio)[4],[8] ;
Leopold Mozart : Sinfonia burlesca (1760) pour 2 altos et 2 violoncelles avec une basse indépendante pour basson ou violone, dont les deux derniers mouvements sont intitulés d'après des personnages de la commedia dell'arte, Il signor Pantalone et Harlequino[4],[8] ;
Étienne Nicolas Méhul : Ouverture burlesque pour 3 mirlitons, tambour, violon et piano (1808), « grotesquement comique, tant dans sa partition que dans son contenu musical»[8],[4] ;
Hans Gál : 2e mouvement de la Suite pour violoncelle et piano, op. 6 (Burleske, Vivace ma non troppo presto)[20], 3e et dernier mouvement du Trio pour violon, violoncelle et piano, op. 49 (Marche burlesque)[21] et 2e mouvement du Quatuor à cordes no 4, op. 99 (Burlesque, Vivace)[22].
Encyclopédie de la musique (trad. de l'italien), Paris, Librairie générale française, coll. « Le Livre de poche/Pochothèque. Encyclopédies d'aujourd'hui », , 1142 p. (ISBN2-253-05302-3), « Burlesque », p. 109.
Denis Arnold (dir.) (trad. de l'anglais par Marie-Stella Pâris, adaptation française par Alain Pâris), Dictionnaire encyclopédique de la musique : Université d'Oxford [« The New Oxford Companion to Music »], t. I : A à K, Paris, Éditions Robert Laffont, coll. « Bouquins », (1re éd. 1988), 1171 p. (ISBN2-221-05654-X), « Burlesque », p. 299-300.
Guy Sacre, La musique pour piano : dictionnaire des compositeurs et des œuvres, vol. II (J-Z), Paris, Robert Laffont, coll. « Bouquins », , 2998 p. (ISBN978-2-221-08566-0)