L'architecture fonctionnaliste est le style qui domine l'architecture en Belgique durant les années 1950, 1960 et 1970, aux côtés de l'architecture monumentale.
Héritier et continuateur du modernisme en Belgique, ce style est fort décrié en raison de l'aspect jugé froid et sans style de ses tours, mais il a malgré tout donné une série d'immeubles bas (low-rise buildings) de qualité comme le siège de la Banque Lambert, l'immeuble Glaverbel, le siège de la CBR (Cimenteries Belges Réunies), le siège de la Royale Belge, le bâtiment Marais de la CGER (Caisse Générale d'Épargne et de Retraite), le siège de Hewlett-Packard, l'immeuble « Louise / Claus » ou encore le premier siège de SWIFT à la Hulpe.
Durant les années 1990 et 2000, certaines des tours fonctionnalistes (high-rise buildings), jugées inesthétiques, sont mises au goût du jour et parées d'atours de style postmoderne.
Durant les années 1930, l'architecture en Belgique est dominée par quatre styles : l'Art déco, l'architecture moderniste, l'architecture monumentale et le style Beaux-Arts[1].
Au sortir de la Seconde Guerre mondiale, l'Art déco et le style Beaux-Arts s'effacent pour laisser le champ libre au modernisme qui mute et devient le fonctionnalisme : « Il faudra attendre le changement d'échelle introduit par la reconstruction et l'équipement du pays après la Seconde Guerre mondiale pour que le modernisme s'impose par son seul aspect économique. Mais il s'appliquera alors à de grands ensembles et des opérations d'envergure qui révéleront son inhumanité et lui feront perdre sa dimension poétique »[2].
En marge du fonctionnalisme, on notera la survivance de l'architecture monumentale qui, après s'être développée tout au long des années 1930 et avoir marqué un temps d'arrêt dû à la Seconde Guerre mondiale, reprend à partir de 1948 pour connaître un deuxième essor durant les années 1950 dans le domaine de l'architecture officielle.
Tout au long des années 1950, 1960 et 1970, le fonctionnalisme règne en maître et couvre les villes belges d'immeubles dotés d'une fonction de bureaux ou de logements (comme les immeubles Etrimo ou Amelinckx).
Bruxelles voit ainsi émerger une série de gratte-ciel ("high-rise buildings") comme les tours du World Trade Center, le Centre international Rogier (Martini Center), le Botanic Building, la tour IBM, la tour Madou, la tour Astro, la tour des Finances, le Manhattan Center, la tour de la Loterie Nationale, la tour AG, l'hôtel Brussels Hilton, la tour du Midi, toutes indissociablement liées au concept de « Bruxellisation », cette dégradation de la ville et du cadre de vie de ses habitants due à l'action des promoteurs immobiliers, qui détruit le Quartier Nord, rasé dans les années 1960 par le promoteur immobilier Charlie de Pauw qui rêvait d'y ériger un petit Manhattan, et détruit la Maison du Peuple de Victor Horta, remplacée par une tour sans style baptisée par dérision « tour Blaton », du nom de l'entrepreneur qui l'a érigée.
Mais, dans le même temps, on voit apparaître une série d'immeubles bas ("low-rise buildings") à l'architecture plus soignée comme le siège de la Banque Lambert (devenue Banque Bruxelles Lambert ou BBL, absorbée plus tard par ING), le siège de Glaverbel, le siège de la CBR (chaussée de la Hulpe 185), le siège de la Royale Belge, le bâtiment Marais de la CGER, le siège de Hewlett-Packard (boulevard de la Woluwe no 100 et son voisin le no 102), le Palais de justice de Charleroi ou encore le premier siège de SWIFT à la Hulpe.
Une réaction radicale au fonctionnalisme apparaît dès la fin des années 1970 sous la forme du postmodernisme qui entend ramener la ville à l'échelle humaine, en s'inspirant notamment des canons classiques réadaptés à des immeubles modernes.
Ainsi, l'architecture se défait progressivement du fonctionnalisme jugé trop pesant et dogmatique. De plus, de nombreux gratte-ciel bruxellois sont transformés par des architectes post-modernes durant les années 1980, 1990 et 2000, qu'ils soient simplement modernisés et réagencés (comme la tour du Midi et la tour des Finances transformées par Michel Jaspers, la tour Madou rénovée par le Bureau d'architectes ASSAR, le Botanic Building relifté par l'Atelier d'architecture de Genval ou encore la tour AG modifiée par Arte Polis, ou qu'ils soient rasés et reconstruits comme le Centre international Rogier (Michel Jaspers) ou comme la tour de la Loterie Nationale (Central Plaza).
Par contre, les « low-rise buildings », à l'architecture généralement plus soignée, ont été presque tous conservés.
Jamais aucun style architectural n'a été sanctionné de façon aussi forte et rapide.[réf. souhaitée]
Le groupe d'immeubles le plus important en termes d'impact sur l'urbanisme est bien entendu constitué par les gratte-ciel avec fonction de bureaux comme les tours du World Trade Center, la tour du Midi, le Centre international Rogier (Martini center), le Botanic Building, la tour IBM, la tour Madou, la tour Astro, la tour des Finances, la tour AG, la tour Philips ou encore le Centre administratif de la Ville de Bruxelles.
Arrivant après la déstructuration du centre de Bruxelles par le chantier de voûtement de la Senne au XIXe siècle, après la saignée provoquée par l'immense chantier de la jonction ferroviaire Nord-Midi et après la destruction du Quartier Nord par le promoteur Charlie De Pauw, ces tours d'acier, de verre et de béton jugées sans âme et sans style modifient sensiblement l'aspect de Bruxelles.
Henri Montois apparaît alors comme un précurseur sur la scène architecturale bruxelloise : en effet, bien qu'ayant débuté comme architecte fonctionnaliste, avec le Botanic Building, il annonce déjà en 1976 les tours postmodernes des années 1990 et 2000 avec la « Blue Tower » de l'avenue Louise (anciennement « tour S.A.I.F.I. »), une tour qui « apparaît comme clairement différente des autres gratte-ciel de Bruxelles »[3].
S'il y a peu de choses à dire du style des gratte-ciel fonctionnalistes, il en va tout autrement des « Low-rise buildings » qui présentent une architecture nettement plus soignée à laquelle le postmodernisme s'est bien gardé de toucher.
On peut distinguer ici plusieurs types de « Low-rise buildings » :
Quelques hôtels ont été construits à l'époque fonctionnaliste.
Avec l'hôtel Brussels Hilton, Henri Montois signe une réalisation qui se distingue des autres immeubles issus de la production fonctionnaliste par l'utilisation de la pierre sur toute la hauteur de la façade sud, tournée vers le boulevard de Waterloo[8]. Par ailleurs, « Comme dans beaucoup de projets conçus par Henri Montois, l'hôtel est orné d'œuvres d'art d'artistes internationaux comme Vic Gentils, Jean-Pierre Ghijsels, Émile Souply ou Victor Vasarely, parmi beaucoup d'autres »[8].
Dans cette catégorie, on citera encore l'ancien Hôtel Westbury (Robert Goffaux), devenu ultérieurement la tour de la Loterie Nationale, et le Manhattan Center (Groupe Structures), qui combine la fonction d'hôtel (Sheraton) et de bureaux.
L'époque fonctionnaliste voit fleurir un grand nombre d'immeubles de logement à bas prix.
Aux côtés de la Résidence Brusilia, réalisée par l'architecte Jacques Cuisinier, on citera les innombrables réalisations de sociétés comme Etrimo (« Société d’Études et de Réalisations Immobilières en Faveur des Classes moyennes », fondée par l'architecte moderniste et Art déco Jean-Florian Collin) ou Amelinckx, dont la tour Résidence Nord.
Mais il faut également citer des blocs de logements sociaux réalisés en plein centre de Bruxelles comme les blocs « rue des Potiers » et « Rempart des Moines ».
L'époque fonctionnaliste est marquée, plus que toute autre période de l'architecture en Belgique, par des collaborations entre architectes.
Voici la liste des architectes fonctionnalistes belges, classés chronologiquement en fonction du début de leur production fonctionnaliste, avec leurs réalisations les plus marquantes.
1959
1962
1964
1968
Hôpital civil de Charleroi
Institut médical de traumatologie et de réadaptation
Centre Albert
Palais de justice de Charleroi
-
Paul Hayot, Michel Marchal
Comme il a été dit plus haut, plusieurs immeubles fonctionnalistes ont été soit transformés en style postmoderne, soit démolis et reconstruits dans ce style.
L'immeuble Régent 44 (boulevard du Régent 44 à Bruxelles) est un excellent exemple de la démarche postmoderne. L'immeuble initial (architecte P. Eenens, 1966[27]) présentait une banale façade de béton et de verre. Le bureau d'architecture Henri Montois a habillé cette façade de verre bleu et de granit poli[27] et l'a rythmée de pilastres en granit poli décorés, à la base, de rudentures (cannelures) et, au sommet, d'ornements en métal évoquant des chapiteaux, réintroduisant ainsi les ornements et la référence aux styles du passé, ainsi que la pierre naturelle généralement peu prisée par l'architecture fonctionnaliste (si on excepte le siège de Glaverbel[5] et l'hôtel Brussels Hilton[8]).
Voici les plus marquantes de ces transformations, avec le nouveau nom éventuel de l'immeuble ainsi que le nom de l'architecte ou du bureau d'architectes postmoderne qui en a assuré la transformation :
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