Restauré au XIXe siècle, cet ouvrage est le seul de cette importance existant en Tunisie avant l'instauration du protectorat français.
Le , le gouvernement tunisien propose le complexe hydraulique romain de Zaghouan-Carthage dont il fait partie pour un futur classement sur la liste du patrimoine mondial de l'humanité dressée par l'Unesco[1].
Selon les historiens, les Romains doivent se contenter, dans un premier temps, d'user de l'eau de pluie conservée dans de citernes comme celles de La Malga[2]. Une sécheresse exceptionnelle, qui sévit de 123 à 128, tarit les maigres ressources en eau de la région et vide les citernes ; elle montre alors l'absolue nécessité de rechercher, plus loin, les eaux qui font défaut aux abords de la ville et de les ramener à Carthage[2].
Constructeur avisé, l'empereurHadrien décide le captage des sources existant dans les massifs montagneux du djebel Zaghouan et de Jouggar ainsi que la construction d'un immense aqueduc destiné à conduire les eaux vers les citernes de La Malga, réservoirs d'eau de 25 000 m3, situés sur une partie élevée de la colline de Carthage. Les sources ont un débit très variable, allant de 5 000 m3 par jour à plus de 25 000 m3 par jour.
Les citernes privées restent toutefois nécessaires pour les quartiers plus élevés que celui de La Malga. Les sources captées sont au nombre de quatre : Nympheum et Aïn Ayed (dans la région de Zaghouan) ainsi qu'Aïn Djour et Aïn Ziga (dans la région de Jouggar).
L'aqueduc, conçu pour assurer un débit journalier de 32 000 m3, comporte deux branches, l'une venant de Zaghouan mesurant 6,01 kilomètres de longueur, l'autre, venant de Jouggar mesurant 33,63 kilomètres, se réunissant à Moghrane. La longueur totale de l'aqueduc jusqu'à Carthage, y compris les diverses ramifications, est de 132 kilomètres[3]. Sa déclivité est précisément de 0,29 %. Au cours de son histoire, il est coupé à plusieurs reprises, d'abord par les Vandales puis par les Arabes.
Remis en état au Xe siècle, il est pourvu d'une dérivation sur Tunis au XIIIe siècle. Après les Hafsides, son entretien est négligé.
Restauration
En 1859, il ne fonctionne plus depuis trois siècles lorsque le ministre de Sadok Bey, Mustapha Khaznadar, le fait restaurer sur les conseils du consul de France de l'époque, Léon Roches, et avec le concours d'un ingénieur français, Pierre Collin. Les parties du canal à fleur de sol et en sous-sol sont remises en état et les parties sur arcades sont remplacées par des conduites en fonte. Les captages sont partiellement remis en service. Les travaux coûtent 7 800 000 francs[4].
La réparation, qui dure trois ans, est complétée par la construction du réservoir de Sidi Abdallah d'une capacité de 3 700 m3 par jour. Dès 1861, les eaux de Zaghouan et de Jouggar arrivent de nouveau à Tunis avec un débit de 12 000 m3 en hiver et de 3 000 m3 en été. Elles contribuent ainsi à améliorer l'ordinaire des habitants réduits à l'usage de l'eau des citernes.
Toutefois, l'incurie des diverses entreprises à qui sont confiés l'entretien et l'exploitation de l'aqueduc oblige le grand vizirKheireddine Pacha à concéder, en 1872, pour trente ans, l'exploitation des eaux de Tunis aux générauxMohamed Baccouche, Husseïn, Rustum et Mohamed. Les résultats ne sont pas non plus brillants, en raison des nombreux abus, et son exploitation sera progressivement abandonnée.
Zone importante pour la conservation des oiseaux
La zone protégée (TN013) s'étend sur quarante hectares en bande le long des arches et piliers de l'aqueduc (qui atteignent une hauteur d'une vingtaine de mètres dans la zone) aux environs de l'oued Miliane. La zone est particulièrement importante (classification A1) pour les faucons crécerellette (Falco naumanni) qui y couvent leurs œufs (jusqu'à trente couples dénombrés) dans les cavités de l'aqueduc. La zone est aussi un habitat pour le faucon lanier (Falco biarmicus), le faucon crécerelle (Falco tinnunculus), et abrite aussi le rollier d'Europe (Coracias garrulus), des moineaux soulcie (Petronia petronia), des étourneaux unicolores (Sturnus unicolor) et des grands corbeaux (Corvus corax). Les alentours sont constitués de champs de céréales et font partie d'une réserve de chasse[5].
↑ a et bChantal Chanson-Jabeur, « La politique de l'eau à Tunis (1860-1940) », dans Chantal Chanson-Jabeur, Catherine Coquery-Vidrovitch et Odile Goerg, Politiques d'équipement et services urbains dans les villes du Sud : étude comparée, Paris, L'Harmattan, (ISBN978-2-747-57425-9), p. 235.
↑L'Afrique dans l'Occident romain (Ier siècle av. J.-C.-IVe siècle apr. J.-C.) : actes du colloque de Rome (3-5 décembre 1987), Rome, École française de Rome, , 605 p. (ISBN2-7283-0183-2), p. 171.
↑Philippe Caillat, « Extrait d'une note sur la restauration de l'ancien aqueduc de Carthage », Revue archéologique, vol. 26, , p. 292-301 (lire en ligne, consulté le ).
↑(en) Mourad Amari et Hichem Azafzaf, « Tunisia », dans Important Bird Areas in Africa and associated islands, Cambridge, Pisces Publications/Birdlife International, (lire en ligne), p. 961.