Né au coin des rues Ontario et Cartier, dans le Centre-Sud de Montréal, Desjardins est le fils et le petit-fils d'un plombier. Il devient lui-même apprenti-plombier à l'âge de 14 ans. Il séjourne brièvement en prison durant sa jeunesse et compte des criminels parmi ses amis d'enfance[1].
Le nouveau directeur général des métiers de la construction, un moustachucorpulent, qui porte de longs favoris et une « bague à diamants imposante » mène un train de vie princier. Sa Cadillac blanche et ses vacances à Haïti sont remarquées[1]. Une fois en poste, le nouveau patron met en place un réseau de « soldats » fidèles, qui opèrent toutes sortes de rackets sur les chantiers, allant de l'usure à l'extorsion, en passant par le trafic de drogues[2].
La Commission Cliche, qui a levé le voile sur les activités de « Dédé » Desjardins en 1975, le décrit comme un meneur d'hommes, un stratège et un organisateur « aux qualités exceptionnelles [...] gâchées par un goût effréné du pouvoir »[3].
Toujours selon la commission, Desjardins est un homme pour qui la violence est si naturelle, qu'il n'hésite pas à s'associer à des repris de justice pour parvenir à ses fins. Des interceptions téléphoniques effectuées par la Sûreté du Québec et déposées aux audiences publiques de la commission révèlent en outre que Dédé Desjardins est l'instigateur de la plupart des grèves illégales dans les chantiers au Québec à l'été 1974, parce qu'il voulait créer une situation de force pour embarrasser le gouvernement en raison de l'enquête[3].
Les fréquentations de Desjardins à cette époque troublent le juge Cliche et les commissaires Mulroney et Chevrette : le leader syndical déchu est un ami intime de criminels notoires dont Francesco Fuoco, auteur d'un hold-up et « soldat » du mafiosiVincent Cotroni, Jean-Louis Robinson, abattu dans un règlement de comptes et Eugène Lefort, surnommé le « caïd de la Rive-Sud »[3].
Desjardins n'attend pas les conclusions du juge Cliche pour démissionner. Il quittera ses fonctions le , au lendemain de la mise sous tutelle du Conseil des métiers de la construction[1].
Nouvelle carrière
Après la fin de sa période syndicale, Desjardins maintient son train de vie en poursuivant ses activités criminelles de prêts usuraires, sous le couvert d'activités commerciales légales. Au début des années 1990, il était actionnaire d'un hôtel en République dominicaine, d'un centre commercial et de deux restaurants au Québec. Il partage son temps entre Cabarete, en République dominicaine, où on le dit « très influent »[4], et revient l'été pour s'occuper de ses affaires québécoises.
Desjardins est assassiné le de coups de feu à la tête dans le stationnement du restaurant Shawn's, à Saint-Léonard, dans l'est de Montréal[6]. Selon le chroniqueur judiciaire Michel Auger, Desjardins aurait rencontré le motardMaurice « Mom » Boucher, le chef montréalais des Nomads, un chapitre des Hells Angels, la veille de son décès[7]. Les deux hommes étaient des amis de longue date, mais Desjardins serait tombé en disgrâce auprès de ses amis motards. « Le meurtre de Desjardins est un contrat de pros », a soutenu le lieutenant-détective Steve Roberts de la police de la CUM[8].
Notes et références
↑ abcd et eLouis Fournier, Louis Laberge : le syndicalisme, c'est ma vie, Montréal, Québec / Amérique, , 418 p. (ISBN2-89037-565-X)
↑Louis-Gilles Francoeur, « André Desjardins : Quand le syndicalisme était affaire de clan », Le Devoir, , A7
↑ ab et cQuébec, Rapport de la Commission d'enquête sur l'exercice de la liberté syndicale dans l'industrie de la construction, Québec, Éditeur officiel du Québec, (ISBN0-7754-2224-X), p. 73-88
↑André Cédilot, « Yvan Cech : Des décennies dans le crime organisé : Le prince de la République... », La Presse, , A17 (lire en ligne)
↑Léopold Lizotte, « Une fleur sur la tombe d'un truand », La Presse, , A1
↑Michel Auger, « Enquête sur le crime organisé », sur canoe.ca, 14 septembre 2000 18:08 (consulté le ) : « Mais les deux autres usuriers abattus étaient de bons amis et très proches de Maurice « Mom » Boucher. La veille de son assassinat à Saint-Léonard, l'ancien syndicaliste André « Dédé » Desjardins avait eu un tête-à-tête avec le fameux motard. »
↑Marcel Laroche,, « L'ex-homme fort du 144 de la FTQ assassiné. André Dédé Desjardins avait déjeuné la veille avec Maurice Mom Boucher », La Presse, , A1