Écologie des transports

L'écologie des transports — en anglais : transport ecology — est la science du système homme-transport-environnement. Il existe deux chaires d'écologie des transports en Allemagne, à Dresde et à Karlsruhe.

Domaines d'activité

L'écologie des transports s'intéresse aux effets généralement indésirables de la mobilité sur la qualité des espaces, naturels ou façonnés par les interventions anthropiques, en tenant compte des limites sociales, normatives, économiques et écologiques de la mobilité[1]. Pour ce faire, l'écologie des transports utilise des méthodes scientifiques issues de différentes disciplines dans le but d'analyser et de décrire différents effets et relations du système homme-transport-environnement, et de mettre en place une mobilité durable.

L'écologie des transports fait appel aux sciences humaines en matière de socialisation des transports, d'infrastructures et de développement économique, de trafic induit, d'externalisation des coûts ou encore de subventions et de taxes[2].

Dans le débat public, on confond souvent mobilité et transports[3]. La « déclaration de Dresde » invite à la satisfaction des besoins de mobilité des personnes au moindre coût, aussi bien financier qu'environnemental[4],[5].

Socialisation des transports

La socialisation commence dès les premières années, au sein du cercle familial. Les institutions, les medias jouent également un rôle important[2], sans oublier la publicité[6]. C'est lors des changements dans la vie, tels que les déménagements, que les changements de comportement s'opèrent plus facilement[2].

Externalités

Les externalités sont nombreuses. En France, en 2021, « dans les agglomérations de plus de 100 000 habitants [...], 70,5 % des habitants sont exposés au bruit routier de jour et 44,2 % au bruit routier de nuit »[7]. Les soutes internationales, imputées à l'Organisation de l'aviation civile internationale et à l'Organisation maritime internationale, sont soustraites des approvisionnements en énergie d'un pays pour calculer sa consommation intérieure. « Aujourd’hui, les échanges internationaux sont relativement exclus du périmètre des engagements [nationaux] et ne sont pas soumis aux politiques climatiques nationales »[8].

Le professeur d'écologie des transports Udo Becker prône l'internalisation juste et complète de tous les coûts externes dans la tarification des systèmes de transport[4].

Impact des transports sur la société et l'environnement

Les routes contribuent à la fragmentation. Même sans trafic, de nombreuses espèces, d'invertébrés notamment, refusent de les traverser ; l'aire écologiquement affectée par la route dépasse largement la superficie de la route elle-même (à plus de 100 m en moyenne de part et d'autre de la route)[9].

Les transports consomment des ressources matérielles et énergétiques, fragmentent et artificialisent les espaces, imperméabilisent les sols, sont sources de nuisances sonores et lumineuses, sont à l'origine d'accidents, et émettent du CO2 (voir Décarbonation des transports), et des microplastiques (voir Impact environnemental du transport routier : Chaussée) ou autres particules[10].

L'analyse des cycles de vie permet de comparer les différentes solutions (électricité, hydrogène, gaz naturel, biocarburants). Une analyse multicritères, qui s'attache à étudier les émissions de gaz à effet de serre, les potentiels d'acidification des sols, d'eutrophisation des sols, d’oxydation photochimique, de toxicité humaine, d'épuisement des ressources non renouvelables, les émissions de particules fines, les émissions de bruit, etc., n'est pas toujours possible. Aussi les émissions de gaz à effet serre sont-elles mises en exergue[11]. Le professeur Becker retient dix facteurs d'amélioration[12] :

Parallèlement à la construction rapide de routes dans les pays en développement, on assiste à un mouvement pour mieux intégrer les routes dans leur environnement naturel et pour leur trouver une utilité au-delà du transport[13], par exemple en améliorant localement le cycle de l'eau[14].

Mesures proposées

Les mesures proposées (qu'elles concernent les modes de transports, le concept « évitement du trafic, changement de mode de transport, améliorations techniques », la tautologie de l'écologie des transports ou les « 4 E », à savoir « Enforcement, Education, Engineering, Economy/Encouragement ») sont passées au crible de la transparence, de la justice (les pollueurs paient), des effets secondaires non désirés et de l'application de la mesure (« rencontre-t-on d'autres exemples d'application ailleurs ? »)[12].

Évitement du trafic, changement de mode de transport, améliorations techniques

Le concept « évitement du trafic, changement de mode de transport, améliorations techniques »[4], consiste en premier lieu à réduire la demande de transport, puis à promouvoir l'intermodalité et enfin à améliorer techniquement les véhicules et à rendre durable l'énergie qu'ils consomment[12].

Cela revient à mettre en œuvre l'identité de Kaya appliquée aux transports.

Enforcement, Education, Engineering, Economy/Encouragement

Ces méthodes sont aussi connues sous le nom de « 4E ». Enforcement correspond à des mesures d'ordre, qu'il s'agisse d'obligations ou d'interdictions. Education relève de la formation, de la communication ou de l'édification. Engineering est de nature purement technique, tandis que Economy/Encouragement sont des systèmes d'incitations, qui peuvent tout-à-fait être financiers[12].

Tautologie de l'écologie des transports

Pour peu que la pollution soit plutôt proportionnelle à la distance parcourue, le professeur Becker définit la « tautologie de l'écologie des transports » — en anglais : tautology of transport ecology — sous la forme suivante[15] :

avec :

  •  : pollution ;
  •  : demande de transport (en voyageurs-kilomètres) ;
  •  : circulation des véhicules (en véhicules-kilomètres) :
  •  : inverse[N 1] du taux d'occupation ou de remplissage (en véhicules par voyageur) ;
  • est la pollution par véhicule-kilomètre.

la demande de transport pouvant elle-même se décomposer selon[15] :

avec :

  •  : population ;
  •  : nombre de trajets par personne;
  •  : distance moyenne d'un trajet.

Aussi la pollution peut-elle s'exprimer sous la forme d'une sommation de la pollution selon les modes de transport :

avec :

  •  : part modale (adimensionnelle) ;
  •  : inverse du taux d'occupation ou de remplissage selon le mode de transport ;
  • est la pollution par véhicule-kilomètre selon le mode de transport.

À titre d'exemple, les éléments relâchés par l'usure des pneumatiques (voir Impact environnemental du transport routier : Chaussée) sont proportionnels aux kilomètres parcourus et pourraient être analysés sous le prisme de la tautologie de l'écologie des transports.

En ce que leurs impacts ne sont pas proportionnels à la demande de transport, les infrastructures de transport ne sont pas concernées par la tautologie de l'écologie des transports (voir par exemple Décarbonation des transports : Infrastructures).

Identité de Kaya appliquée aux transports

L'illustration porte l'équation CO2 = Demande de transport × Report modal × Taux de remplissage (des véhicules) × Efficacité énergétique des véhicules × Intensité carbone de l'énergie. Ces facteurs sont ainsi classés selon leur proximité avec la sobriété énergétique pour les premiers et la technologie pour les derniers.
Décomposition — selon la méthode LMDI — des émissions de dioxyde de carbone des transports en cinq facteurs[18].
Les quatre premiers facteurs correspondent aux économies d'énergie, aussi connues sous le concept de négawatt, tandis que le dernier facteur correspond à l'intensité en carbone de l'énergie. La baisse de la demande de transport relève de la sobriété[19]. L'efficacité énergétique relève du progrès technique.

La formulation générale revêt une forme plus particulière dès lors qu'il s'agit de décarbonation des transports, à l'instar de l'identité de Kaya.

La pollution étant identifiée au CO2, est remplacé par
avec :

On peut alors décomposer les émissions de CO2 selon[18],[20] :

Éducation aux mobilités durables

L'éducation aux mobilités durables (abordée plus haut sous le vocable 4E), hyponyme d'éducation au développement durable, occupe une place importante au sein de l'écologie des transports[21].

C'est un domaine très vaste, qui vise les institutions, les organisations (collectifs citoyens, entreprises...) le grand public ou le public-relais (associations, public scolaire, bibliothèques...), et qui peut prendre la forme d'informations, d'événements, de campagnes ou de mesures continues dans le temps. il s'agit de changer les habitudes de transport[21].

En France, l'éducation aux mobilités actives est promue par l'éducation nationale[22]. L'article 8 de la Charte de l'environnement, à valeur constitutionnelle, dispose que l'« éducation et la formation à l'environnement doivent contribuer à l'exercice des droits et devoirs » définis par la Charte[23]. La Fresque de la mobilité, jeu sérieux créé par Les Shifters contribue à la promotion des mobilités durables[24],[25]. En Allemagne, le Verkehrsclub Deutschland (de) est agréé par le ministère fédéral de l'Éducation et de la Recherche[26],[27].

Autres mesures

Enfin, les autres mesures balaient un large spectre, allant de la participation du public aux zones à faibles émissions, en passant par l'urbanisme[28].

La promotion des mobilités actives, du transport en commun, mais aussi de l'autopartage et du covoiturage concourent à réduire l'autosolisme. En matière d'urbanisme, les parkings-relais, les péages urbains, mais aussi les zones 30 et autres zones de rencontre, sans oublier la logistique urbaine, ont un rôle à jouer[28].

Notes et références

Notes

  1. a et b Il faut viser la baisse de l'inverse du taux de remplissage, c'est-à-dire l'augmentation du taux de remplissage. Il faut également viser la baisse de l'inverse de l'efficacité énergétique, c'est-à-dire l'augmentation de l'efficacité énergétique.

Références

  1. (de) « Forschen für nachhaltige Entwicklung » (consulté le ).
  2. a b et c (de) Udo Becker, Grundwissen Verkehrsökologie [« Connaissances de base en écologie des transports »], Oekom (de), (ISBN 978-3-86581-775-4), p. 21-65.
  3. (de) Udo Becker, Grundwissen Verkehrsökologie [« Connaissances de base en écologie des transports »], Oekom (de), (ISBN 978-3-86581-775-4), p. 17-19.
  4. a b et c « Déclaration de Dresde », sur divu.de
  5. (de) « Dresdner Erklärung » [« Déclaration de Dresde »] [PDF], sur Dresdner Institut für Verkehr und Umwelt, .
  6. Arrêté du pris pour l'application de l'article D. 328-3 du code de la route.
  7. Les externalités du transport (lire en ligne [PDF]).
  8. « Smartphones, voitures et frigos importés... les émissions cachées de la France », sur Reporterre, .
  9. (en) R. T. T. Forman, « Estimate of the area affected ecologically by the road system in the United States », Conservation Biology, vol. 14,‎ , p. 31-35 (DOI 10.1046/j.1523-1739.2000.99299.x, lire en ligne [PDF]).
  10. (de) Udo Becker, Grundwissen Verkehrsökologie [« Connaissances de base en écologie des transports »], Oekom (de), (ISBN 978-3-86581-775-4), p. 67-154.
  11. Gilles Guerassimoff et Laura Sobra, Mobilité durable et énergie : comment les concilier ?, Presses des Mines, (ISBN 978-2-35671-632-3), p. 201-221.
  12. a b c et d (de) Udo Becker, Grundwissen Verkehrsökologie [« Connaissances de base en écologie des transports »], Oekom (de), (ISBN 978-3-86581-775-4), p. 160-168.
  13. (en) « ‘Green Roads’ Are Plowing Ahead, Buffering Drought and Floods » [« Les « routes vertes » progressent, protégeant contre la sécheresse et les inondations »], sur Yale Environment 360, .
  14. (en) « Guidelines for Road Infrastructure in Support of Water Management and Climate Resilience », sur Banque mondiale, .
  15. a et b (de) Udo Becker, Grundwissen Verkehrsökologie [« Connaissances de base en écologie des transports »], Oekom (de), (ISBN 978-3-86581-775-4), p. 184-187.
  16. (en) « Mobility pyramid » [jpg], sur duurzame-mobiliteit.be.
  17. « Mobilité : et si on remettait le piéton au milieu du village ? », sur The Conversation, .
  18. a et b Aurélien Bigo, Les transports face au défi de la transition énergétique. Explorations entre passé et avenir, technologie et sobriété, accélération et ralentissement (thèse de doctorat en sciences économiques), Institut polytechnique de Paris, , 340 p. (lire en ligne [PDF]), p. 39.
  19. « La sobriété des mobilités » [PDF], sur France Nature Environnement, .
    Document réalisé avec le soutien financier de l’Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie.
  20. « Vers des économies régionales bas carbone » [PDF], sur The Shift Project, p. 6.
  21. a et b (de) Udo Becker, Grundwissen Verkehrsökologie [« Connaissances de base en écologie des transports »], Oekom (de), (ISBN 978-3-86581-775-4), p. 212-217.
  22. « L'éducation aux mobilités actives et citoyenne », sur Éduscol, .
  23. Loi constitutionnelle no 2005-205 du 1 mars 2005 relative à la Charte de l'environnement.
  24. « Prendre conscience de son impact avec la fresque de la mobilité », sur Ouest-France, .
  25. « Le tour de France de la Fresque de la Mobilité », sur Ministère de l'Écologie, .
  26. (de) « KMK-Empfehlung zur Mobilitäts- und Verkehrserziehung in der Schule » [PDF], sur Ministère fédéral de l'Éducation et de la Recherche.
  27. (de) « Portal Globales Lernen », sur globaleslernen.de.
  28. a et b (de) Udo Becker, Grundwissen Verkehrsökologie [« Connaissances de base en écologie des transports »], Oekom (de), (ISBN 978-3-86581-775-4), p. 187-211 & 217-285.

Voir aussi

Articles connexes

Bibliographie

Liens externes

Généraux

Éducation aux mobilités durables


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