En géométrie, un tétraèdre orthocentrique, est un tétraèdre dont les quatre hauteurs sont concourantes. Leur point de concours est alors désigné comme l'orthocentre du tétraèdre.
Un tétraèdre est orthocentrique si et seulement si les arêtes opposées sont orthogonales deux à deux[3].
Démonstration
Implication directe
Soient les pieds des hauteurs issues de . Les droites et sont par hypothèse sécantes en . Elles forment le plan qui contient les 4 points .
D’autre part, est orthogonale au plan , donc à toute droite de ce plan, et en particulier à . De même, est orthogonale à , donc le plan est orthogonal à . On en déduit que est orthogonale à et on fait de même avec les autres paires d'arêtes.
Réciproque
Soient cette fois les orthocentres des faces opposées aux indices. Les deux droites sécantes et étant orthogonales à , le plan est aussi orthogonal à , et de même le plan ; Les plans et , orthogonaux à une même droite et ayant un point en commun, sont égaux. Les droites et de ce plan sont donc sécantes en un point .
La droite du plan est orthogonale à , et on démontrerait de même qu'elle est orthogonale à ; elle est donc orthogonale au plan , c'est la hauteur issue de . De même est la hauteur issue de , et ces deux hauteurs sont sécantes. Par symétrie, les quatre hauteurs sont donc deux à deux sécantes, donc concourantes car non coplanaires.
De plus la relation dite d'Euler[3] montre qu'il suffit que deux couples d'arêtes opposées soient formés d'arêtes orthogonales pour que les trois le soient.
Pieds des hauteurs
Un tétraèdre est orthocentrique si et seulement si les pieds des quatre hauteurs sont les orthocentres des faces, et il suffit qu'un pied de hauteur le soit pour que le tétraèdre soit orthocentrique[3].
Démonstration
Implication directe :
Reprenant la démonstration précédente, la droite du plan orthogonal à est orthogonale à ; c'est donc la hauteur issue de dans le triangle . Mais par symétrie des hypothèses, les droites et sont les deux autres hauteurs du triangle : en est donc l'orthocentre, et de même pour .
Réciproque :
Supposons que soit l'orthocentre de . Le plan contient les droites et qui sont orthogonales à , il est donc orthogonal à . La droite qui est dans ce plan est donc orthogonale à et on pourrait faire de même avec les autres paires d'arêtes opposées.
On obtient donc un tétraèdre orthocentrique quelconque en partant d'un triangle et en prenant le quatrième sommet sur la perpendiculaire au plan de ce triangle passant par l'orthocentre.
Parallélépipède circonscrit
On peut inscrire un tétraèdre dans le parallélépipède dont les trois paires de faces parallèles sont incluses dans les paires de plans parallèles contenant deux arêtes opposées.
Un tétraèdre est orthocentrique si et seulement si ce parallélépipède circonscrit a ses arêtes de même longueur, autrement dit est un rhomboèdre.
En effet, dans le tétraèdre, deux arêtes opposées sont orthogonales si et seulement si les faces correspondantes du parallélépipède circonscrit sont des losanges (car un parallélogramme est un losange si et seulement si ses diagonales sont orthogonales). Si quatre faces d'un parallélépipède sont des losanges, alors toutes les arêtes ont des longueurs égales et les six faces sont des losanges ; il s'ensuit que si deux paires d'arêtes opposées dans un tétraèdre sont formées d'arêtes orthogonales, alors la troisième paire a la même propriété et le tétraèdre est orthocentrique.
Relation métrique
Un tétraèdre ABCD est orthocentrique si et seulement si la somme des carrés des longueurs de deux arêtes opposées est la même pour les trois paires d'arêtes opposées[4],[5],[3] :
En fait, il suffit que seulement deux paires d'arêtes opposées satisfassent cette condition pour que le tétraèdre soit orthocentrique.
Démonstration
On part de
.
Il en résulte que si et seulement si les arêtes et sont orthogonales. En écrivant la même relation pour les arêtes et , on obtient bien cette condition nécessaire et suffisante.
Bimédianes
Un tétraèdre est orthocentrique si et seulement si ses trois bimédianes (joignant les milieux de deux arêtes opposées) ont la même longueur [5],[3].
En effet, les bimédianes sont les segments joignant les centres de deux faces opposées du parallélépipède circonscrit, lesquels ont même longueur que les arêtes qui leur sont parallèles ; elles sont donc de même longueur si et seulement si les arêtes du parallélépipède ont même longueur.
Bihauteurs
Dans un tétraèdre orthocentrique, les bihauteurs (perpendiculaires communes à deux arêtes opposées) concourent à l'orthocentre.
Démonstration
Le point appartient au plan qui est le plan contenant et orthogonal à ; il appartient aussi au plan qui est le plan contenant et orthogonal à ; il appartient donc à leur intersection qui est la bihauteur perpendiculaire commune à et . De même, il appartient aux deux autres bihauteurs.
Réciproquement, un tétraèdre dont les bihauteurs sont concourantes est orthocentrique, équifacial, ou formé d'un losange gauche et de ses diagonales [6],[7],[8].
Dans un tétraèdre quelconque, les six plans passant par le milieu d'une arête et orthogonaux à l'arête opposée passent par un même point M qui est le symétrique du centre O de la sphère circonscrite par rapport au centre de gravité G.
Si le tétraèdre n'est pas équifacial, auquel cas O = G, ces trois points sont donc alignés sur une droite, dite d'Euler par analogie avec le cas du triangle. Et lorsque le tétraèdre est orthocentrique, le point de Monge coïncide avec l'orthocentre [9],[10].
Démonstration
On pose le symétrique de par rapport à .
Soient I et J les milieux respectifs de [AB] et [CD] ; on va montrer que ; comme (OJ) est orthogonale à (CD) cela prouvera que le plan passant par et orthogonal à passe par , et, par symétrie, la même propriété pour les six plans similaires.
On peut écrire : ; or , donc et .
Si le tétraèdre est orthocentrique, le plan passant par le milieu de et orthogonal à est le plan contenant et orthogonal à . Raisonnant de même pour la plan passant par le milieu de et orthogonal à , on obtient que le point appartient à leur intersection qui est la bihauteur associée à et . Il appartient donc aux trois bihauteurs, qui concourent en ; donc .
Sphères d'Euler
Première sphère d'Euler
Les quatre milieux des arêtes, et les huit pieds des perpendiculaires communes aux arêtes opposées sont douze points d'une même sphère de centre G. Les intersections de la sphère avec les faces sont leurs cercles d'Euler[11],[3].
Deuxième sphère d'Euler
Les quatre points situés au tiers des segments joignant H aux sommets, les quatre pieds des hauteurs, et les quatre centres de gravité des faces sont douze points d'une même sphère centrée sur la droite d'Euler en O' vérifiant . Elle est l'image de la sphère circonscrite par l'homothétie de centre G et de rapport -1/3 [11],[3].
Volume du tétraèdre orthocentrique
Une première formule est
où a, b sont les longueurs de deux arêtes opposées, et leur distance[11].
La caractérisation concernant les arêtes implique que si seulement quatre des six arêtes d'un tétraèdre orthocentrique sont de longueur connue, les longueurs des deux autres peuvent être calculées si elles ne sont pas opposées l'une à l'autre. Par conséquent, le volume d'un tétraèdre orthocentrique peut être exprimé en termes de quatre longueurs d'arêtes a, b, c, a' . La formule est[12]
où a, b, c sont les longueurs des arêtes d'une même face, le demi-périmètre de cette face, et a' la longueur de l'arête opposée à celle de longueur a.
↑(en) N. A. Court, « Notes on the Orthocentric Tetrahedron », The American Mathematical Monthly, vol. 41, no 8, , p. 499-502 (lire en ligne).
↑Gaston de Longchamps, « Le tétraèdre orthocentrique », Mathesis, , p. 50 (lire en ligne).
↑ abcdef et gYves Ladegaillerie, Géométrie, affine, projective, euclidienne, et anallagmatique, Ellipses, , p. 379-382
↑Reiman, István, "International Mathematical Olympiad: 1976-1990", Anthem Press, 2005, pp. 175-176.
↑ a et bHazewinkel, Michiel, "Encyclopaedia of mathematics: Supplement, Volym 3", Kluwer Academic Publishers, 1997, p. 468.
↑E. Ehrhart, Articles de mathématiques : Sur les tétraèdres dont les perpendiculaires communes aux arêtes opposées sont concourantes, Cedic/Nathan, , p. 75-76
↑E. Ehrhart, « Sur le triangle et le tétraèdre », Bulletin de l'APMEP, no 381, , p. 621 (lire en ligne)
↑Bertrand Gambier, « Sur les tétraèdres dont certaines bihauteurs se rencontrent », Bulletin de la S. M. F., vol. 76, , p. 79-94 (lire en ligne)
↑Victor Thébault, Parmi les belles figures de la géométrie dans l'espace : géométrie du tétraèdre, Paris, Librairie Vuibert, (lire en ligne), p. 2 - 10
↑Tristan Deray, « Point de Monge au lycée, plaisir et délectation géométrique. », Feuille de vigne, , p. 15-20 (lire en ligne)
↑ ab et cYvonne et René Sortais, Géométrie de l'espace et du plan, Hermann, , p. 315-329
↑Titu Andreescu et Razvan Gelca, Mathematical Olympiad Challenges, Birkhäuser, , 2e éd., 159 p., p. 30-31.