Le siège d'Arras est un épisode de la guerre de Trente Ans qui débuta le et mena à la prise de possession de la ville d'Arras par les troupes françaises le de cette même année 1640. Cette bataille du règne finissant de Louis XIII, Richelieu gouvernant, est évoquée dans la pièce d'Edmond Rostand, Cyrano de Bergerac.
Contexte historique
La guerre de Trente Ans débuta en 1618 et se termina en 1648 par la signature des traités de Westphalie. À partir de 1635, le royaume de France entra ouvertement dans le conflit et affronta la puissance espagnole. Le conflit franco-espagnol se poursuivit jusque 1659 et la signature de la paix des Pyrénées.
Au nord de la France, après le siège de Corbie, la reprise de la ville par les armées françaises, en 1636, se poursuivit par la reconquête du château de Bohain-en-Vermandois, et la prise de Landrecies le , de Maubeuge et de La Capelle respectivement les et [1]. La Thiérache et le Vermandois étaient désormais à l'abri des coups de force de détachements de la cavalerie croate impériale qui sévissaient en Picardie, à partir de 1636, depuis les collines d'Artois et le comté de Hainaut[2].
Sur ordre du roi, au début du printemps 1638, l'armée française regroupa ses forces à Saint-Quentin. L'objectif de la campagne était alors de parvenir à placer la Picardie occidentale à couvert après la protection réussie de son flanc oriental en 1637. Le maréchal de Châtillon prévoyait de s'introduire en territoire ennemi avec pour objectif de s'emparer de la place de Saint-Omer[a], tandis que le maréchal de La Force et sa troupe faisaient diversion en feignant de marcher sur CambraiviaLe Catelet[b].
Le siège d'Arras se déroula durant cette campagne. Le , le maréchal de Châtillon dut abandonner le siège de Saint-Omer et laisser la ville aux Espagnols. La prise d'Hesdin, le , par La Meilleraye, livra une partie de l'Artois aux Français. L'objectif était alors de prendre les forces espagnoles en tenaille : le prince d'Orange devait attaquer Dam et Bruges, tandis que Charles de La Porte (le maréchal de la Meilleraye) devait opérer sur la Meuse. De leur côté, les armées françaises devaient maintenir leur pression sur l'Artois. Le plan échoua : le fort de Charlemont et Mariembourg résistèrent à l'attaque de Charles de La Porte.
Celui-ci rappelé de la Meuse, traversa alors le Hainaut et le Cambrésis pour prendre position devant Arras le . Il fut rejoint par Châtillon et Chaulnes venus par la rive nord de la Scarpe. Vingt trois mille fantassins et neuf mille cavaliers investirent ainsi les abords de la ville. À l'intérieur de celle-ci, le colonel O'Neill et ses deux mille hommes organisèrent la défense. Les fortifications de siège furent construites en un mois.
Ferdinand d'Autriche accourt à Lille dès la fin juin et est rejoint par le général Lamboi et le duc Charles de Lorraine. Une armée espagnole forte de vingt mille hommes est alors constituée et vient camper le sur le Mont-Saint-Éloi à quelques kilomètres d'Arras. Le cardinal-infant Ferdinand d'Autriche décide de ne pas attaquer les assiégeants mais de leur couper les vivres. Installé vers Avesnes-le-Comte, entre Arras, Hesdin et Doullens, il intercepte les convois de ravitaillement destinés aux assiégeants et renforce son armée qui se monte alors à vingt mille hommes et douze mille cavaliers.
Le convoi de ravitaillement
Richelieu, accouru avec le roi à Amiens, organise à la hâte un convoi de ravitaillement. Des chariots de munitions et de provisions de bouche escortés par une troupe de dix-huit mille hommes commandés par le gouverneur de Lorraine du Hallier prennent la route d'Arras. Parmi cette troupe on trouve le régiment des Gardes-Françaises, au sein duquel se trouvent les Cadets (élèves-officiers de l'époque), dont fait partie d'Artagnan[3] et le régiment de Bussy-Rabutin[4]. Les maréchaux de La Meilleraye et de Chaulnes à la tête d'une armée de six mille hommes sont chargés d'opérer la jonction qui se fait sans aucune résistance le au matin à mi-chemin entre Doullens et Arras. En effet, Ferdinand d'Autriche, profitant de cette diversion et du départ de six mille hommes du front, porte alors son attaque sur les troupes du maréchal de Châtillon restées sur place.
La chute d'Arras
La ruse est près de réussir. Le maréchal de Châtillon ne dispose plus que de quinze mille hommes affamés et fatigués. Le plus fort de l'attaque est porté par le duc de Lorraine sur le fort tenu par le colonel Rantzau. Celui est pris et repris plusieurs fois. Mais l'arrivée de Gassion à la tête d'une armée de mille cavaliers change le sort de la bataille et annonce le retour des troupes de La Meilleraye et de Chaulnes. Une ultime résistance des troupes du colonel Rantzau repousse l'attaque espagnole. L'arrivée de la cavalerie de La Meilleraye et de Chaulnes, suivie du corps d'armée de du Hallier pousse les troupes espagnoles à la retraite. Le au matin, les généraux français somment les habitants d'Arras de capituler. Ceux-ci résistent encore jusqu'au , date à laquelle une brèche, ouverte dans les remparts, ouvre la ville aux troupes françaises. La capitulation est signée le sous les yeux de Ferdinand d'Autriche qui revenu avec ses troupes renonce finalement à engager un ultime combat.
Conséquences
La ville, passée à la France, conserva cependant ses privilèges et le maintien du parlement d'Artois. Elle obtint que la liberté de conscience n'y fût pas introduite.
La prise de cette ville, longtemps aux mains des Espagnols, redonna confiance aux Français. Le prince Thomas de Savoie, entrepris par Mazarin, se plaça le , sous la protection de la France. Durant le printemps 1641 et jusqu'en , d'autres places fortes espagnoles, telles que Aire-sur-la-Lys, Lens, Bapaume et La Bassée, tombèrent aux mains des Français. Fin 1641, le royaume de France contrôlait désormais de nouveau l'Artois.
Les Espagnols, qui étaient devenus maîtres de la ville à la faveur des troubles en France et qui croyaient, ainsi que les habitants, cette place imprenable, avaient écrit sur une de ses portes[5],[6] :
« Quand les Français prendront Arras, les souris mangeront les chats ».
Les Français conservèrent l'inscription après avoir effacé le p du mot prendront devenant :
« Quand les Français rendront Arras, les souris mangeront les chats »
En 1654, pendant l'été, eu lieu une nouvelle bataille autour d'Arras, dite celle du 'Secours d'Arras'.
Cette bataille opposa les troupes françaises défendant Arras, sous l'autorité de Jean de Schulemberg, comte de Montdejeu, renforcées de l'extérieur par les troupes françaises de 'secours' commandées par Turenne (Henri de La Tour d'Auvergne (1611-1675), face aux troupes espagnoles commandées par le Grand Condé.
Après de durs combats les troupes espagnoles battirent en retraite, donnant ainsi à Louis XIV la première victoire de son règne.
Le siège d'Arras dans l'art et la littérature
Dans Cyrano de Bergerac (1897), pièce de théâtre d'Edmond Rostand, le quatrième acte[7] se déroule pendant le siège d'Arras, durant lequel Christian meurt au combat.
Stefano della Bella, Plan et vue de la ville d'Arras, assiégée et prise par les français en 1640 (1641), Eau-forte, 528x390[8].
Notes et références
Notes
↑afin de conquérir l'ensemble de l'Artois par des actions conjuguées depuis cette place forte et depuis la Picardie
↑Localité perdue dans la foulée de la prise de Corbie par le prince Thomas de Savoie.
Achmet d'Héricourt, Les sièges d'Arras : histoire des expéditions militaires dont cette ville et son territoire ont été le théâtre, Topino, , 407 p. (lire en ligne).