L'action de l'Union de défense des commerçants et artisans (UDCA) naît à Saint-Céré dans le Lot d'une révolte antifiscale, alors que le fisc applique le traditionnel principe qui sous-entend que le commerçant dans une société rurale camoufle une large part de son chiffre d'affaires, lequel commence par ailleurs à être bridé par la puissante concurrence de la grande distribution et de l'industrialisation[2],[3]. Le mouvement obtient, en deux ans et dans toute la France, plus de 2 millions de voix et 52 députés [soit 12 %] et aux élections de 1956 se réunit alors sous l'étiquette d'Union et fraternité française (UFF). L'Union est hostile au traité de Rome et demande la suppression des contrôles fiscaux et la défense des petits commerçants. Les intellectuels sont souvent dénigrés au profit du supposé bon sens « des petites gens ». Le groupe UFF est aussi un fidèle soutien de l'Algérie française. Cependant, il refuse de voter la confiance au gouvernement Mollet lors de la crise du canal de Suez, par réflexe anti-anglais.
Le mouvement n'a qu'une postérité limitée, se maintenant jusqu'à la fin de la Quatrième République en s'alliant avec les gaullistes. Il disparaît presque complètement avec la mise en place de la Cinquième République en 1958. Tous les députés élus sous la bannière poujadiste en 1956 sont battus aux élections législatives françaises de 1958, à l'exception de deux d'entre eux, parmi lesquels Jean-Marie Le Pen, qui s'était éloigné du mouvement.
Idéologie
Le poujadisme peut être considéré comme une des dernières expressions d'un mouvement de révolte des classes moyennes[4]. On compte parmi les députés poujadistes des bouchers, des boulangers, des épiciers, des libraires[5]. Les méthodes musclées sont monnaie courante durant les manifestations poujadistes. Le mouvement dispose d'un service d'ordre qui n'hésite pas à faire le coup de poing[6]. Jean-Marie Le Pen, député poujadiste après les élections législatives de , s'inscrit dans cette lignée[7]. Il a intégré dans l'idéologie du Front national la protestation contre les élus, les partis dominants et l'État prévaricateur.
Terme par extension
Le terme « poujadisme » peut être utilisé pour qualifier péjorativement ce que le locuteur juge être du corporatismeréactionnaire de classes moyennes à supérieures sans qu'il y ait de rapport avec le mouvement lancé par Pierre Poujade.
Le terme poujadiste est parfois utilisé pour qualifier négativement un discours politique ou social jugé démagogique. Les attitudes visées peuvent inclure un militantisme en faveur des petits commerçants vis-à-vis des « gros » (d'abord nationaux puis multinationaux), mais également désigner diverses formes d'antiparlementarisme, de corporatisme, voire d’extrémisme politique, ou plus généralement pour désigner un populisme réactionnaire.
↑le terme petit-bourgeois étant ici pris dans son sens originel de petit capitaliste, ou possesseur de petits moyens de production tels un petit commerce ou une petite entreprise
↑« L'histoire », sur histoire.presse.fr, (consulté le )
↑Annie Collovald, « Histoire d'un mot de passe : le poujadisme. Contribution à une analyse des « ismes » », Genèses. Sciences sociales et histoire, vol. 3, no 1, , p. 97–119 (DOI10.3406/genes.1991.1048, lire en ligne, consulté le ) :
« « Le poujadisme est une formule autoritaire pour classes moyennes - ces classes moyennes dont Auguste Comte écrivait, il y a plus d'un siècle, qu'elles faisaient le malheur de la France, et qui ri ont cessé de le faire, par leur malthusianisme , leur chauvinisme , leur fermeture à tous les courants de la vie moderne. Petit fascisme pour petits Français. » »
↑« Jean-Marie Le Pen, la première victoire du para », sur Le Figaro, (consulté le ) : « Le président d'honneur du Front national a fait ses premières armes électorales à 27 ans, sous les couleurs du mouvement de Pierre Poujade, qui voyait en lui « le drapeau tricolore planté sur le tiroir-caisse » »
Serge Herbain, Étude sur le poujadisme parlementaire, janvier 1956-juin 1958, Université Paris 1,
Mémoire de diplôme d'études supérieures en science politique ; direction Maurice Duverger
Christophe Meslin, Le Mouvement Poujade et la construction européenne : 1953-1957 (mémoire de maîtrise en histoire), Paris, université Panthéon-Sorbonne, , 240 p. (OCLC492556856)