Il publie son premier ouvrage important en 1796 (Précis des caractères génériques des insectes) et travaille au Muséum national d'histoire naturelle. Son travail sur la systématique et la taxonomie des arthropodes lui vaut le respect et de nombreux éloges, et notamment le fait que Georges Cuvier lui demande d'écrire le volume sur les arthropodes de son œuvre monumentale Le règne animal, seule partie qui ne soit pas écrite par Cuvier.
Latreille est considéré comme l'entomologiste le plus important de son temps et est décrit par l'un de ses élèves comme « le prince des entomologistes ».
Biographie
Jeunesse
Fils naturel de Jean de Sahuguet d'Amarzit, baron d'Espagnac (gouverneur des Invalides en 1766), il est abandonné à sa naissance par sa mère et ne sera jamais reconnu par son père. Il est élevé dans une famille très modeste. Il fait ses études au collège de Brive puis à Paris au collège du cardinal Lemoine. Il est ordonné diacre en 1786, puis vraisemblablement prêtre[1], et retourne à Brive où il consacre, avec l'aide financière du baron d'Espagnac, son temps libre à l'entomologie. Il revient à Paris en 1788.
À l'automne 1794, le médecin de la prison, voyant son érudition entomologique, le signale au jeune naturaliste local Jean-Baptiste Bory de Saint-Vincent (il a alors 15 ans et connaît déjà ses travaux), qui le fait libérer in extremis, peu avant sa déportation[2]. Cette intervention lui sauva la vie puisque le navire «le Républicain» qui devait l'emmener en Guyane sombra devant le phare de Cordouan avec tous les prisonniers se trouvant à son bord[3],[4]. Latreille et Bory de Saint-Vincent resteront par la suite amis pour le restant de leurs jours[5].
En 1792, la publication de son Mémoire sur les mutilles découvertes en France le fait reconnaître dans la communauté scientifique et admettre comme correspondant dans la société d'histoire naturelle. Par la suite, Latreille vit comme enseignant et correspond avec divers entomologistes, dont Johan Christian Fabricius[1].
Carrière académique et dernières années
En 1796, sous les encouragements de Fabricius, Latreille publie à ses frais son Précis des caractères génériques des insectes, disposés dans un ordre naturel. Il est brièvement assigné à résidence en 1797 et ses livres sont confisqués, mais l'influence de Georges Cuvier, de Bernard-Germain de Lacépède et de Jean-Baptiste Lamarck (tous titulaires d'une chaire de zoologie au Muséum national d'histoire naturelle) parvient à le faire libérer[1]. En 1798, Latreille est nommé au Muséum, où il travaille aux côtés de Lamarck, conservant les collections d'arthropodes, et publiant un certain nombre de travaux de zoologie[1].
Après le décès de l'entomologiste Guillaume-Antoine Olivier en 1814, Latreille lui succède en tant que membre titulaire de l'Académie des sciences de l'Institut de France[1]. Au cours des années suivantes, Latreille est particulièrement productif, produisant d'importants documents pour les Mémoires du Muséum, l'ensemble du volume sur les arthropodes pour Le Règne animal de Georges Cuvier (1817) et des centaines d'entrées dans le Nouveau Dictionnaire d'Histoire Naturelle sur des sujets d'entomologie[1]. Lorsque Lamarck devient progressivement aveugle, Latreille assume une part croissante de ses travaux d'enseignement et de recherche. En 1821, il est nommé chevalier de la Légion d'honneur[1].
En 1825, il fait paraître les Familles naturelles du règne animal où il sépare les amphibiens des reptiles, suivant en cela les travaux d'Alexandre Brongniart. Il est professeur de zoologie à l'École vétérinaire d'Alfort. À la mort de Lamarck en 1830, la chaire de zoologie des invertébrés, au Muséum, est divisée pour former deux nouvelle chaires. Latreille obtient celle des crustacés et insectes, Henri-Marie Ducrotay de Blainville celle des vers et mollusques[1].
Le , il démissionne de son poste du Muséum afin de pouvoir s'installer à la campagne et ainsi éviter l'épidémie de choléra. De retour en novembre à Paris, il y meurt d'une maladie de la vessie le [1]. Il n'avait pas d'enfant, mais il laisse une nièce qu'il avait adoptée[2]. Il est inhumé au cimetière du Père-Lachaise (39e division)[6]. La Société entomologique réussit à réunir les fonds nécessaires pour financer un monument à Latreille. Construit au-dessus de la tombe de Latreille, au Père-Lachaise, il comprend un obélisque de 2,7 mètres portant diverses inscriptions, dont une à propos du coléoptère qui lui avait sauvé la vie : « Necrobia ruficollis Latreillii salvator »[2].
[1797] Précis des caractères génériques des insectes disposés dans un ordre naturel, Brive, impr. F. Bourdeaux, , 201 p., sur biodiversitylibrary.org (lire en ligne).
[1802] Histoire naturelle des fourmis, et recueil de mémoires et d'observations sur les abeilles, les araignées, les faucheurs, et autres insectes, Paris, impr. Crapelet, , sur biodiversitylibrary.org (lire en ligne).
[Latreille & Sonini 1802] Pierre-André Latreille et Charles-Nicolas Sonnini (ce dernier ne traite que des salamandres)), Histoire naturelle des reptiles (4 volumes ; édité comme une partie de l'œuvre de Buffon), Paris, impr. Crapelet, :
[1802-1805] Histoire naturelle générale et particulière des crustacés et insectes (fait partie d'une série de 14 volumes par auteurs divers, édités dans une "suite" à Buffon), Paris, impr. F. Dufart, an x, 387 p., sur biodiversitylibrary.org (lire en ligne).
[1806-1809] (la) Genera crustaceorum et insectorum, secundum ordinem naturalem et familias disposita (4 volumes), 1806-1807 :
[1810] Considérations générales sur l'ordre naturel des animaux composant les classes des crustacés, des arachnides, et des insectes ; avec un tableau méthodique de leurs genres, disposés en familles, Paris, G. Schœll, , 444 p., sur biodiversitylibrary.org (lire en ligne).
[1822] Histoire naturelle et Iconographie des Insectes coléoptères d'Europe, , 15 pl. + 198, sur gallica (lire en ligne).
[1825] Familles naturelles du règne animal, exposés succinctement et dans un ordre analytique, , sur biodiversitylibrary.org (lire en ligne).
[1831] Cours d'entomologie ou d'histoire naturelle (seul le premier volume paraît), Paris, libr. Roret, , sur biodiversitylibrary.org (lire en ligne) (également disponible sur books.google.fr).
↑« Latreille, le prince de l’entomologie, à qui sa passion sauva la vie. Prêtre réfractaire, il allait être jeté, avec d’autres, dans la cale d’un navire qui devait sombrer au large de la Gironde. Il occupait ses derniers instants à inventorier la faune du cachot. Un des geôliers, qui partageait cette curiosité, le met à part des condamnés. Un insecte — la nécrobie, “la vie dans la mort” — témoigne de cet événement. » Pierre Bergounioux (source)
↑consulter à ce sujet l'allocution d'ouverture faite par M. le professeur Taquet, président de l'Académie des Sciences lors du colloque de la Société entomologique de France des 15 et 16 novembre 2013, Paris.
↑ a et bBory de Saint-Vincent, Correspondance, publiée et annotée par Philippe Lauzun, Maison d'édition et imprimerie moderne, 1908. (Lire en ligne)
↑Paul Bauer, Deux siècles d'histoire au Père Lachaise, Mémoire et Documents, , 867 p. (ISBN978-2-914611-48-0), p. 476-477.
↑Histoire générale des sciences : La science contemporaine, vol. 1, t. 3, Paris, PUF, , 743 p., p. 408.
Voir aussi
Bibliographie
[Damkaer 2002] David M. Damkaer, chap. 9 « A celebration of Crustacea », dans The Copepodologist's Cabinet: A Biographical and Bibliographical History, vol. 1, Philadelphie (Penn.), American Philosophical Society, coll. « Memoirs of the American Philosophical Society » (no 240), , 300 p., sur archive.org (ISBN0-87169-240-6, lire en ligne), p. 124–130..
[Dupuis 1974] (en) Claude Dupuis, « Pierre André Latreille (1762–1833): the foremost entomologist of his time », Annual Review of Entomology, vol. 19, , p. 1–14 (DOI10.1146/annurev.en.19.010174.000245, lire en ligne [PDF] sur annualreviews.org, consulté en )..