Mouvement d'Oxford

Le Mouvement d’Oxford (en anglais Oxford Movement) est un courant théologique et ecclésiastique anglais du XIXe siècle, se situant dans la lignée des théories défendues par la Haute Église (High Church) anglicane. Né vers 1833, il contribua à rapprocher la théologie anglicane du catholicisme, certains membres influents n'hésitant pas à demander leur admission dans l'Église catholique romaine.

Histoire

Les promoteurs de ce mouvement sont pour la plupart des professeurs et étudiants de l’Université d'Oxford (d'où son nom) qui, réfléchissant à la question de la succession apostolique, doutent qu'elle aboutisse à l’Église anglicane.

Ce courant théologique est également connu sous le nom de tractarianisme (Tractarian movement), en référence à la publication des Tracts for the Times, de 1833 à 1841. Ses promoteurs sont aussi parfois nommés, de manière péjorative, « puseyistes », du nom de l’un de leurs chefs, Edward Bouverie Pusey, professeur d’hébreu à Christ Church, à Oxford.

Début du Mouvement

Dans le cadre de la Reform Bill, le gouvernement britannique décide de supprimer 10 sièges parlementaires qui étaient dévolus à des évêques anglicans d'Irlande[1]. Certains envisageaient par ailleurs de réformer la liturgie eucharistique[2] et réintroduire une pratique sacramentelle.

Face à cette réforme gouvernementale John Keble (1792-1866), dans un sermon célèbre prononcé le dans l'église universitaire d'Oxford, critique l’« apostasie nationale »[3] et la mainmise de l’État sur la vie de l’Église anglicane: il en appelle l’Église anglicane à se réveiller et réaliser sa mission sacrée[4]. Ce prêche de John Keble conduit certains professeurs et membres d’Oxford à vouloir agir afin de développer un mouvement de renouveau de l’anglicanisme. Le , une conférence sur la défense de l’Église est organisée en présence de William Palmer, Froude et Perceval, mais la réunion n'aboutit pas[5]. Il n'empêche que plusieurs personnalités s’engagent alors personnellement dans une défense de l’anglicanisme, dont Richard Whately qui prône une séparation de l'Église anglicane et de l’État[6].

Publication des Tracts

John Henry Newman, alors prêtre anglican à Oxford, est fortement influencé par le sermon prononcé par John Keble et décide de diffuser des tracts (les Tracts for the Times) où il défend une conception moderne de l’anglicanisme[7]. Il critique la sécularisation croissante de l’Église d’Angleterre (son libéralisme), la mainmise gouvernementale sur les structures d'Église, et le déclin de la vie religieuse en général. Les autres personnalités éminentes du Mouvement d’Oxford sont l’archidiacre Henry Edward Manning, Richard Hurrell Froude, Robert Wilberforce et William Palmer.

En 1836, Edward Bouverie Pusey (1800-1882) signe un tract avec ses initiales, conduisant à un engagement visible de sa part dans le mouvement. Certains donnent le nom de « puseyisme » au mouvement d’Oxford, voyant en Pusey le chef et l’instigateur du mouvement[8]. Cette dénomination a quelque chose de péjoratif et renvoie à une expression anglaise « Pussy cat ». Avant 1845, les membres sont parfois appelés « newmanites », en référence à John Henry Newman, l'initiateur des 'tracts'. .

Le Tract 90

En 1841, la publication du 90e Tract est un tournant: Newman affirme que les doctrines de l’Église catholique romaine, telles que le concile de Trente les a définies, sont compatibles avec les Trente-neuf articles, fondateurs de l’Église anglicane au XVIe siècle. Dominique Barberi, religieux passioniste italien, envoie une lettre à Newman et ses amis. Le , Georges Spencer informe Barberi que sa lettre a fait l’objet d’une lecture très attentive de la part des membres du groupe d’Oxford.

Progressivement le mouvement d’Oxford évolue vers un rapprochement vers le catholicisme, et la reconnaissance de la place spéciale de l'évêque de Rome dans la 'succession apostolique', et est de plus en plus critique vis-à-vis du protestantisme et de son influence sur l'Eglise dAngleterre[9].

Finalement, le Mouvement d’Oxford perd de sa vitalité lorsque Newman, après un long processus de discernement[10] demande son admission dans l'Eglise catholique en 1845, bien qu'il lui en coute beaucoup, financièrement et socialement. Manning le suit en 1851. Newman confie qu’il choisit le P. Barberi pour le recevoir dans l’Église catholique, parce qu’il voyait en lui un prêtre catholique qui aimait les anglicans et qui vivait saintement.

Réaction au mouvement d'Oxford

L’émergence du mouvement d’Oxford est au commencement bien accueillie auprès du clergé d’Angleterre. Cependant très vite, dans l'Eglise anglicane, deux courants vont s’opposer et critiquer le mouvement d’Oxford: les évangéliques et les libéraux, qui y voient une tentative de renaissance d’un catholicisme anglican[8]. La presse, le gouvernement et l'establishment en général lui sont plutôt hostiles. Le mouvement eut cependant une influence non négligeable sur la rénovation des cérémonies religieuses, l'action sociale de l'Eglise (le slum settlement movement programme) et contribua à la renaissance de communautés religieuses dans la tradition anglicane.

Le mouvement a d’importantes répercussions aux États-Unis au sein de l’Église épiscopalienne. De nombreux religieux se reconnaissent dans ses principes théologiques comme Samuel Seabury.

Jusqu’à nos jours, l’anglo-catholicisme, qui doit sa renaissance au Mouvement d’Oxford, a largement influencé l’anglicanisme dans son ensemble.

Conversion au catholicisme

Le principal protagoniste du Mouvement d’Oxford, John Henry Newman, après la rédaction du tract 90, est convaincu de l’inadéquation de la « théorie des branches » et, à sa demande, est admis dans l'Eglise catholique (1845). Sa conversion est l’une des plus célèbres. Cependant plusieurs membres et sympathisants du Mouvement d’Oxford firent la même démarche dans les années qui suivirent:

Ainsi :

Autres personnalités liées au mouvement d'Oxford

Notes et références

  1. Louis Bouyer, Newman : Sa vie, sa spiritualité, préface du cardinal Jean Honoré, Paris, Éditions du Cerf, , 485 p. (ISBN 978-2-204-08866-4), p. 169.
  2. Bouyer 2009, p. 196.
  3. Bouyer 2009, p. 197.
  4. Bouyer 2009, p. 197.
  5. Bouyer 2009, p. 198.
  6. Bouyer 2009, p. 208.
  7. Bouyer 2009, p. 199.
  8. a et b Bouyer 2009, p. 247.
  9. Bouyer 2009, p. 219.
  10. Newman s'en explique longuement dans son Apologia Pro Vita Sua (1864) qui eut un grand retentissement et le reconcilièrent avec de nombreux amis anglicans.

Annexes

Bibliographie

  • (it) Dominique Barberi, Lettera ai professori di Oxford, Rome, CIPI,
  • (en) John Burgon, Lives of twelve good men
  • (en) Michael Chandler, An Introduction to the Oxford Movement, New York, Church Publishing, .
  • Christopher Dawson, Newman et la modernité : L’épopée du Mouvement d’Oxford, Genève, Ad Solem,
  • (en) C. Brad Faught, The Oxford Movement: A thematic history of the tractarians and their times, University Park, PA, Pennsylvania State University Press, (ISBN 978-02-71022-499)
  • (en) Kenneth Leech (éd.) et Rowan Williams (éd.), Essays Catholic and Radical: A jubilee group symposium for the 150th anniversary of the beginning of the Oxford Movement 1833-1983, London, Bowerdean, (ISBN 0-906097-10-X)
  • (en) Henry Parry Liddon, Life of E. B. Pusey, vol. 4, London,
  • (en) Edward R. Norman, Church and society in England 1770–1970: A historical study, Oxford, Clarendon Press, (ISBN 0-19-826435-6).
  • (en) Richard W. Pfaff, « The library of the Fathers: The tractarians as patristic translators », Studies in Philology, vol. 70,‎
  • (en) Walter Walsh, The Secret History of the Oxford Movement, (lire en ligne)
  • Keith Beaumont, Petite vie de John Henry Newman, Paris, Desclée de Brouwer, , 225 p.

Liens externes

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