Cet hommage musical rendu à Fauré se fait de manière collective lorsque Henri Prunières, directeur de La Revue musicale, commande un numéro spécial en octobre 1922[1] avec un article pour la revue et une pièce de circonstance publiée en annexe[2], commande comparable à celle du Tombeau de Claude Debussy en 1920. La première pièce exceptée, pour violon et piano, la partition se présente comme « sept pièces de piano » ou en réduction pour piano :
Les œuvres sont construites autour d'un motif bâti sur la transposition en notes du nom de Fauré : « F.A.U.R.E. » (fa.la.sol.ré.mi)[15].
Thème sur le nom de F-A-U-R-E.
Le procédé consiste, à l'instar du motif BACH, à donner aux lettres de l'alphabet une correspondance sous forme de notes de musique : c'est un cryptogramme musical (ou une anagramme musicale selon la terminologie du musicologue Jacques Chailley). La « clé » utilisée, qualifiée « d'anglaise » par Jacques Chailley, dans le sens où le « B » représente un si naturel et non un si bémol comme en allemand (selon la désignation des notes de musique en fonction de la langue) peut se visualiser ainsi[16] :
Table de correspondance
do
ré
mi
fa
sol
la
si
–
–
–
–
–
A
B
C
D
E
F
G
H
I
J
K
L
M
N
O
P
Q
R
S
T
U
V
W
X
Y
Z
Si Enesco, Aubert, Koechlin, Ladmirault et Roger-Ducasse se contentent du nom de « Fauré », Maurice Ravel et Florent Schmitt intègrent également à leur contribution le prénom du compositeur, « Gabriel »[15].
La contribution d'Enesco, Hommage, est une courte pièce pour piano en ut majeur, molto moderato e cantabile, composée à partir des cinq notes données sur le nom de Fauré : fa-la-sol-ré-mi. Pour Guy Sacre, la partition, « impalpable, indécise, avec le brouillard de son accompagnement d'arpèges (« harmonieux et voilé ») et le flou de sa modulation perpétuelle », rappelle le style de Scriabine[19].
La durée moyenne d'exécution de l’œuvre est de deux minutes environ[20].
Louis Aubert
La pièce d'Aubert, Esquisse sur le nom de Fauré, est la dernière œuvre pour piano seul du compositeur. Elle consiste en deux pages de musique en si bémol majeur, moderato, qui selon Guy Sacre sont étranges, « à la fois mélancoliques et sereines, détachées de leur propos même »[21].
La durée moyenne d'exécution de l’œuvre est de deux minutes trente environ[22]. La partition est également publiée par Durand[21].
Florent Schmitt
L'hommage pour piano de Schmitt est Sur le nom de Gabriel Fauré, op. 72[23],[24].
Dans la partition, le compositeur dissocie les notes correspondant à « Gabriel » de celles associées à « Fauré »[23]. Le nom du maître fournit un thème de scherzo ainsi qu'un thème de valse tandis que le prénom donne une « phrase caressante, chuchotée, baignée d'arpèges »[23], un peu à la manière de Fauré, « apportant à l'effervescence du premier sujet un contraste expressif inattendu »[25], selon les mots d'Alfred Cortot, qui souligne le « vivant dialogue [qui] s'établit entre ces deux thèmes »[26].
La durée moyenne d'exécution de l’œuvre est de trois minutes trente environ[27]. Schmitt réalise en 1935 une orchestration de la pièce, sous le titre de Scherzo sur le nom de Gabriel Fauré, qu'il joint à Cippus feralis pour forme le diptyque In memoriam[23].
La contribution de Koechlin est le Choral sur le nom de Fauré, op.73bis[28].
La durée moyenne d'exécution de l’œuvre est de deux minutes environ. La pièce existe également dans une version pour orchestre à cordes, arrangée en 1933 par Koechlin[28].
Paul Ladmirault
L'Hommage à Fauré de Ladmirault est basé sur les notes correspondant au nom de Fauré (fa-la-sol-ré-mi), d'abord sous la forme d'une sorte de chant populaire, en ré mineur, allegro moderato, « aux inflexions mélancoliques, aux cadencesmodales, qui eût pu naître sur le biniou d'un pâtre breton », puis sous une forme plus élaborée, un trio en si bémol majeur, espressivo e poco rubato, « aux lignes souples, aux arpèges ondoyants, aux modulations raffinées »[29].
La durée moyenne d'exécution de l’œuvre est de trois minutes environ[30].
Jean Roger-Ducasse
Roger-Ducasse ne pouvait « qu'être heureux de manifester son attachement à Fauré, mais il a horreur de travailler sur commande[31] ». Jacques Depaulis considère cependant que dans ce Poème sur le nom de Gabriel Fauré, « il a su exprimer toute sa tendresse[32] ».
La durée moyenne d'exécution de l’œuvre est de neuf minutes environ[33].