L’ensemble de ces formes linéaires constitue aussi un espace vectoriel appelé espace dual, qui peut éventuellement être restreint au dual topologique des formes linéaires continues si l’espace source est un espace vectoriel topologique. L'étude spécifique qu'on leur accorde est motivée par le fait qu'elles jouent un rôle primordial en mathématiques, et en analyse, par exemple dans la théorie des distributions, ou dans l'étude des espaces de Hilbert.
L'application constante sur Ede valeur 0K s'appelle la « forme linéaire nulle sur E».
L'application
est une forme linéaire sur ℝ2.
Plus généralement, les formes linéaires sur Kn sont les applications qui peuvent s'écrire sous la forme :
où sont les composantes du vecteur . En particulier, les formes linéaires sur l'espace de matrices Mp,q(K) sont les applications qui peuvent s'écrire sous la forme φ(M) = Tr(MN), où Tr est l'application trace et N est une matrice fixée de Mq,p(K).
Sur l'espace des applications continues de [a, b] dans ℝ, l'intégration est une forme linéaire[3].
Toute évaluation d'une fonction. exemple : l'application qui à une fonction associe sa valeur en un point (φ(f)=f(2) par exemple) ou la valeur de sa dérivée en un point.
Toute combinaison des coordonnées du vecteur. Exemple : la fonction qui renvoie une coordonnée ou la trace d'une matrice.
La counité d’une coalgèbre est une forme linéaire.
L'écriture ci-dessus des formes linéaires sur ℝn, où les composantes d'un vecteur étaient ses coordonnées dans la base canonique, peut s'interpréter comme un produit matriciel de la matrice ligne (a1 … an) par la matrice colonne représentant ce vecteur :
Réciproquement, tout hyperplan de E est le noyau d'au moins une forme linéaire (ipso facto non nulle).
Démonstrations
Si φ est une forme linéaire non nulle, alors ker(φ) est un hyperplan. En effet, les supplémentaires de ker(φ) sont isomorphes au quotientE/ker(φ), or φinduit un isomorphisme de ce quotient vers K.
Si H est un hyperplan de E, il existe au moins une forme linéaire φ de noyau H. En effet, la donnée d'un tel φéquivaut à celle d'un morphisme injectifφ de E/H vers K c'est-à-dire, si u est un vecteur directeur de la droite E/H, au choix d'un scalaire non nul φ(u).
Une forme est combinaison linéaire d'un ensemble fini de formes données si (et seulement si) son noyau contient l'intersection des leurs[4]. En particulier, deux formes non nulles sont proportionnelles si (et seulement si) elles ont pour noyau le même hyperplan.
Espace dual
L'ensemble des formes linéaires sur Eest un sous-espace vectoriel de l'espace vectoriel KE des applications de Edans K. On l'appelle le dual de Eet il est noté E* ou hom(E, K).
On note parfois (où ) pour . Cette notation est appelée crochet de dualité.
Bases duale et antéduale
Si E est de dimension finie n, la représentation matricielle ci-dessus met en évidence que E* est aussi de dimension finie n donc isomorphe à E. Cependant, il n'y a pas d'isomorphisme canonique dans le sens où si E est quelconque, il est nécessaire de se donner une base arbitraire afin de pouvoir définir un isomorphisme le reliant à E*. Si une base de E, on définit sur celle-ci les formes linéaires notées par :
Ces formes linéaires sont aussi appelées les projections des coordonnées, l'image d'un vecteur par n'est autre que la i-ème coordonnée du vecteur dans la base .
Le résultat important est que la famille de formes linéaires forme une base de E* ; on appelle aussi cette base la base duale de la base .
Inversement, si l'on se donne une base de E*, il existe une unique base de E telle que :
La base s'appelle la base antéduale de la base .
Formes linéaires continues
Si l'on considère un espace vectoriel norméE sur le corps K = ℝ ou ℂ, alors on sait définir la notion de continuité de n'importe quelle application de E dans K ou même dans un autre espace vectoriel normé F. On démontre dans le § « Opérateur borné » de l'article sur les espaces vectoriels normés l'équivalence entre diverses caractérisations de la continuité d'une application linéaire (entre autres : elle est continue si et seulement si elle est bornée sur la boule unité). Si E est de dimension finie, toute application linéaire de E dans F est continue. Si E est de dimension quelconque mais si F = K, on dispose du critère suivant :
Une forme linéaire est continue si (et seulement si) son noyau est fermé[5].
Les hyperplans fermés sont donc exactement les noyaux de formes linéaires continues non nulles. Les autres hyperplans (les noyaux de formes linéaires discontinues) sont denses.