Ella Sharpe perd son père, dont elle partageait l'intérêt pour le théâtre de Shakespeare, quand elle est adolescente et c'est à elle qu'il revient de soutenir sa famille. Elle étudie la littérature, le théâtre et la poésie à l'université de Nottingham et devient professeur de littérature anglaise dans l'enseignement secondaire. Elle est ensuite codirectrice et professeure d'anglais à l'institut de formation des enseignants de Hucknall (1904-1916). Durant la Première Guerre mondiale, elle est atteinte de dépression et elle consulte en 1917 à la Medico-Psychological Clinic de Brunswick Square, où elle est suivie par Jessie Murray, médecin et cofondatrice de la clinique[1] et James Glover[2]. Elle se forme ensuite auprès de James Glover, et devient son assistante en 1920[2]. Elle fait une analyse à Berlin, avec Hanns Sachs[3], puis à son retour, est acceptée, d'abord membre associée, puis en 1923 comme « full member » à la Société britannique de psychanalyse. Elle s'occupe de la formation des candidats analystes, et donne des conférences sur la technique, publiées dans l'International Journal of Psycho-analysis. Elle est influencée par les travaux de Melanie Klein dans les années 1920 et 1930[4],[5].
Elle est élue au comité de formation à plusieurs reprises, et dirige l'Institut de psychanalyse de la Société britannique au moment des controverses scientifiques, auxquelles elle participe activement[6]. Elle y présente quatre contributions, notamment un texte portant sur la technique et la formation[7] et se montre soucieuse d'éviter les scissions au sein de la Société[3]. Elle adopte ensuite une position plus en retrait à l'égard du groupe kleinien, et s'aligne sur la position plus nuancée du groupe des indépendants, au sein de la société de psychanalyse[8].
La symbolique dans la sublimation
Elle a publié en 1937, en référence au travail de Freud sur l'interprétation du rêve, un manuel de psychanalyse intitulé Dream analysis. Cet ouvrage qui établit le point de vue de Sharpe sur le rêve, a été vu comme établissant un pont entre Freud et Jacques Lacan[9], L'intérêt qu'elle a porté au rôle du symbolisme dans la vie et dans la psychanalyse a pu la faire apparaître comme un précurseur de Jacques Lacan[10] qui a d'ailleurs rendu hommage dans les Écrits, à Ella Sharpe et « ses très pertinentes remarques » et à « l'exigence de celle-ci que l'analyste se familiarise avec toutes les branches du savoir »[11]. Cependant, son sens du concret, le corps et le matériau sous-jacent à la sublimation et à la symbolique la différencie de l'orientation lacanienne plus tournée vers le langage[12]. Elle a également publié une étude psychanalytique de Francis Thompson, où elle analyse sa crainte de se séparer de sa mère et son identification avec celle-ci[13].
Dream analysis. A practical handbook for psycho-analysts, 1937, London: Karnac, 1988.
Fatherless children; a contribution to the understanding of their needs, avec Susan Isaacs et Joan Riviere, London, Pouskin Press, 1945, coll. « New education fellowship monograph », no 2.
Collected Papers, London, 1950.
Certain Aspects of Sublimation and Delusion, International Journal of PsychoAnalysis, 1930.
The Technique of Psychoanalysis, International Journal of Psycho-Analysis, 1930/31[14].
Similar and Divergent Unconscious Determinants Underlying the Sublimation of Pure art and Pure Science, The International Journal of Psychoanalysis, 16, 186-202 (Collected Papers on Psycho-analysis, p. 137-154, London, Hogarth Press, 1950).
↑Elizabeth R. Valentine, « “A brilliant and many-sided personality”: Jessie Margaret Murray, founder of the Medico-Psychological Clinic », Journal of the history of the behavioral sciences, 2009, p. 145-161DOI10.1002/jhbs.20364
↑ a et bSuzanne Raitt, “Early British Psychoanalysis and the Medico-Psychological Clinic”, Hist Workshop Journal (Autumn) 58 (1), p. 63-85DOI10.1093/hwj/58.1.63
↑ a et bNotice biographique, p. 13, in Pearl H. King et Riccardo Steiner, Les Controverses Anna Freud Melanie Klein 1941-1945, coll. « Histoire de la psychanalyse », Paris, Puf, 1996.
↑Brenda Maddox, Freud's Wizard (London 2006) p. 188
↑Gwendolyn Steevens/Sheldon Gardner, The Women of Psychology (1982) p. 129-30
↑« Mémoire sur sa technique par Ella Freeman Sharpe », chap. 7, , p. 573-580, in Pearl H. King et Riccardo Steiner, Les Controverses Anna Freud Melanie Klein 1941-1945, coll. « Histoire de la psychanalyse », Paris, Puf, 1996.
↑Mary Jacobus, The Poetics of Psychoanalysis: In the Wake of Klein, London, 2005, p. 4.
↑E. Raynor, The Independent Mind in British Psychoanalysis, 1991, p. 253.
↑Otto Fenichel, The Psychoanalytic Theory of Neurosis, London, 1946, p. 653.
Voir aussi
Bibliographie
Marie-Lise Lauth (dir.), Ella Sharpe lue par Lacan, Paris, Hermann, 2007, (ISBN978-2-7056-7224-9).
Carol Netzer, « Annals of Psychoanalysis: Ella Freeman Sharpe », Psychooanalytic Review, 69, 1982, p. 207-219.
Maurice Whelan (éd.) Mistress of Her Own Thoughts: Ella Freeman Sharpe and the Practice of Psychoanalysis, London, Rebus Press, 2000 (ISBN9781900877268).
Ella Freeman Sharpe (1875-1947), Psychoanalytikerinnen. Biografisches Lexikon, [lire en ligne].