Cramoisi est un nom, plus souvent adjectif, de couleur désignant un rouge profond tirant vers le violet, synonyme, comme nom de couleur, de carmin, d'usage principalement en peinture, tandis que cramoisi s'emploie plutôt en textile et dans un usage littéraire[1].
Le mot cramoisi dérive des moyens employés autrefois pour produire la couleur, à partir des corps séchés d'un insecte, la cochenille du chêne kermès, d'où le nom de « kermésy », puis « cramoisi ». Cet insecte étant rare et difficile à récolter en quantité, on lui préféra à partir du XVIIe siècle une espèce voisine, Dactylopius coccus, hôte des cactus d'Amérique. L'acide carminique est le colorantanthraquinonique responsable de la couleur. On obtient un pigment laqué par mordançage sur sels d'aluminium. Des chimistes ont obtenu de l'acide carminique par synthèse en laboratoire en 1991.
Le terme cramoisi a depuis longtemps pris un sens indépendant du colorant. L'alizarine, colorant de la garance dont il existe une production synthétique industrielle depuis la fin du XIXe siècle, donne des nuances cramoisies[2].
Le Répertoire de couleurs de la Société des chrysanthémistes publié en 1905 donne quatre tons de Rouge cramoisi, en indiquant qu'il s'agit de la Laque carminée foncée du marchand de couleurs Bourgeois. « L'écarlate de cochenille, traité par le protochlorure d'étain, donne du Rouge cramoisi. » Il donne aussi quatre tons d'un Carmin cramoisi, « Pourpre de Tyr mêlé de Carmin de Cochenille[3] ».
Étymologie
Le mot « cramoisi » est attesté dès 1315 et référait à un tissu de couleur rouge foncé[1]. Ce mot existait antérieurement sous les formes quermesi, cremosi[4] (cf. les équivalents en italien)[5] ou crémoisi.
En anglais, cramoisy, tombé en désuétude, est un emprunt du français. Crimson, attesté dès 1416, provient des formes antérieures cremesin et crymysyn, adaptées du vieil espagnolcremesin qui signifiait « relatif au kermès », adapté lui-même du latin médiéval cremesinus pour kermesinus ou carmesinus, c’est-à-dire le pigment de la cochenille Kermes vermilio, quirmiz en arabe (et en persan), dérivant lui-même du sanskritkrmi-ja (de krmih « ver » et ja « produit ») signifiant « pigment rouge produit par un ver ». C'est un mot apparenté au latin vermis (ver) qui a donné worm en anglais. Le latin médiéval carmesinus (et sa forme contractée carminus) a également pour dérivé carminium qui a donné carmin en français et carmine en anglais[6]. Les mots carmin et cramoisi ont donc la même origine.
Annie Mollard-Desfour, Le Rouge : Dictionnaire des mots et expressions de couleur. XXe – XXIe siècles, CNRS Éditions, coll. « Dictionnaires », (1re éd. 2000).
Références
↑ a et b« Cramoisi », sur www.cnrtl.fr, Centre national de resources textuelles et lexicales (consulté le ).
↑(en) « Pigment Red », sur artiscreation.com (consulté le ). Il faut examiner les traductions de l'anglais avec prudence ; souvent les champs chromatiques sont différents, bien qu'ils se recoupent, en français et en anglais.
↑Henri Dauthenay, Répertoire de couleurs pour aider à la détermination des couleurs des fleurs, des feuillages et des fruits : publié par la Société française des chrysanthémistes et René Oberthür ; avec la collaboration principale de Henri Dauthenay, et celle de MM. Julien Mouillefert, C. Harman Payne, Max Leichtlin, N. Severi et Miguel Cortès, vol. 1, Paris, Librairie horticole, (lire en ligne), p. 114, 159.
↑Marco Polo, Marie-Luce Chênerie, Philippe Ménard, et Michèle Guéret-Laferté, Le Devisement du monde. Départ des voyageurs et traversée de la Perse, vol. 1, Librairie Droz, , 285 p. (ISBN9782600004794, lire en ligne), p. 233, Cremosi.
↑J. L. Barthélemy Cormon, Dictionnaire portatif et de prononciation italien-français, B. Cormon et Blanc, , 863 p. (lire en ligne), p. 205, Cremisi.