Charles Onana (né le [1]) est un politologue, journaliste d'enquête, essayiste et éditeur franco-camerounais. Il se fait connaître par ses écrits controversés concernant le génocide des Tutsis au Rwanda. Il est condamné en pour « complicité de contestation publique de l’existence d’un crime contre l’humanité ».
Biographie
Enfance et formation
Charles Onana est né le [1]. Il est originaire du Cameroun.
Diplômé de la Sorbonne, il obtient en 2017, le titre de docteur en science politique de l'université Jean-Moulin-Lyon-III avec une thèse de doctorat intitulée Rwanda : l'opération turquoise et la controverse médiatique (1994-2014). Analyse des enquêtes journalistiques, des documents secret-défense et de la stratégie militaire dirigée par Jean-Paul Joubert[2]. Selon l'historienne Hélène Dumas, la soutenance de cette thèse s'est faite dans des conditions qui ne correspondent pas aux usages académiques[3].
Carrière
Cette section est vide, insuffisamment détaillée ou incomplète. Votre aide est la bienvenue ! Comment faire ?
Génocide des Tutsi et guerres dans la région des Grands lacs
Depuis 2002, Charles Onana a publié plusieurs livres sur la région des Grands Lacs et les drames qui l'ont traversée.
Les publications des années 2002 à 2005 sont reliées, selon l'historien Jean-Pierre Chrétien, à des rencontres organisées sous les auspices du Sénat ou du Centre d'accueil de la presse étrangère et marquées par la présence d'acteurs ayant en commun d'attribuer la responsabilité du génocide et des guerres au FPR et à Paul Kagame ainsi qu'au gouvernement des États-Unis[4].
Il met en doute la qualification de génocide et accuse Paul Kagame, président du Rwanda, d'avoir en 1994 « organisé le massacre des Tutsi et des Hutu résidant au Rwanda ». Son argumentation se fonde sur l'hypothèse que Kagame aurait diligenté l'attentat du 6 avril 1994 contre l'avion Falcon 50 du président Juvénal Habyarimana[5].
Dans leur ouvrage Les secrets du génocide rwandais, Charles Onana et Déo Mushayidi désignent en 2002 Paul Kagame comme le probable organisateur de l’attentat du 6 avril 1994 dans lequel le président rwandais, Juvénal Habyarimana et le président burundais, Cyprien Ntaryamira sont tués et qui marque le début du génocide[6], une thèse qui a perdu depuis beaucoup de crédit[7]. Selon René Lemarchand, chercheur en sciences politiques, l'ouvrage révèle peu de secrets et comporte beaucoup de biais[8].
Charles Onana dirige en 2005 un colloque intitulé « Silence sur un attentat : le scandale du génocide rwandais » (Actes du colloque, avril 2005, Paris, Éditions Duboiris). Poursuivant son enquête sur le Tribunal pénal international pour le Rwanda, il publie le premier livre sur cette juridiction dans lequel il mentionne les confidences que lui a faites le procureur Carla Del Ponte[12].
Son essai Ces tueurs tutsi au cœur de la tragédie congolaise publié en 2009, est cité par Hélène Dumas, historienne spécialiste du génocide, dans un article qui relève la reprise par Charles Onana des accusations racistes sur les femmes tutsi[13] et son accréditation d'un supposé « Plan de conquête de l’Afrique des Grands Lacs », un faux qui circulait déjà en 1962[14].
Charles Onana publie, en 2019, l'ouvrage Rwanda, la vérité sur l'opération Turquoise dans lequel il déclare « la thèse conspirationniste d’un régime hutu ayant planifié un “génocide” au Rwanda constitue l’une des plus grandes escroqueries du XXe siècle »[15],[16]. Dans un article pour la Fondation Jean Jaurès, l'universitaire Serge Dupuis[17] estime que l'ouvrage est une « investigation menée exclusivement à décharge », très peu étayée par des sources, et dont l'objectif est « la mise au pilori du FPR »[18].
Il intervient à l'occasion d'un colloque international qui se tient au Sénat français le 9 mars 2020 sur les « 60 ans d’instabilité dans l’Afrique des Grands Lacs » afin de dénoncer les accusations visant l'opération Turquoise au Rwanda, les crimes perpétrés par le Front patriotique rwandais (FPR) pendant et après le génocide des Tutsi, ainsi que l'inertie de l'ONU faisant suite au refus du FPR de toute intervention humanitaire au Rwanda en 1994. La tenue de ce colloque est contestée par certaines personnes et organisations car plusieurs participants sont considérés comme « négationnistes »[19],[20].
Affaires judiciaires
Charles Onana est poursuivi en France pour contestation de crime contre l'humanité après le dépôt d'une plainte par la Ligue internationale contre le racisme et l'antisémitisme (Licra) pour avoir nié l'existence du génocide tutsi en 2019 au cours d'une interview télévisée à propos de son livre Rwanda, la vérité sur l'opération Turquoise[19],[20].
Selon l'association Survie, il est mis en examen en janvier 2022 à la suite d'une plainte déposée en 2020 par Survie, la FIDH et la Ligue des droits de l'homme pour contestation de crime de génocide dans son ouvrage Rwanda, la vérité sur l'opération Turquoise en référence à l'article 24 de la loi sur la liberté de la presse[21]. Il est jugé en octobre 2024[22]. Il est condamné le pour « complicité de contestation publique de l’existence d’un crime contre l’humanité ». Il est condamné à une amende de 8 400 € et à payer 11 000 € aux parties civiles[23].
Condamnés, les deux prévenus ont immédiatement fait appel[24],[25].
La raison d'être du procès est contestée par deux prix Nobel de la paix, le docteur Denis Mukwege et Adolfo Pérez Esquivel, qui s'indignent face à l'impunité des crimes commis en république démocratique du Congo par le régime rwandais et dénoncés par l'auteur Charles Onana[26],[27].
Le 4 octobre 2024, Charles Onana dépose plainte contre l'actuel chef d'État rwandais, Paul Kagame, devant le procureur de la République de Paris à la suite des « menaces publiquement prononcées » à son encontre[28].
Autres publications et activités
Charles Onana est gérant des éditions Duboiris, maison d'édition qui a publié la plupart de ses livres[29].
Bokassa : ascension et chute d'un empereur (1921-1996) : une enquête qui dévoile la face cachée du pouvoir sous Giscard et Mitterrand, Éditions Duboiris (sic), 1998 (ISBN978-2-9513159-0-7)
Les Secrets du génocide rwandais : enquête sur les mystères d'un président (avec Déo Mushayidi), Duboiris, 2002
Enquêtes interdites, Duboiris, 2002
La France et ses tirailleurs, Duboiris, 2003
Les Secrets de la justice internationale: enquêtes truquées sur le génocide rwandais (préface de Pierre Péan), Duboiris, 2005
Silence sur un attentat, Duboiris, 2005
L'Édition menacée : Livre blanc sur l'édition indépendante (préface de Gilles Perrault), Duboiris, 2006
Pourquoi la France brûle, la racaille parle, Duboiris, 2006
Joséphine Baker contre Hitler : La star noire de la France, Duboiris, 2006
Noirs Blancs Beurs 1940-1945 : Libérateurs de la France (préface de Richard Bohringer), Duboiris, 2006
↑« Génocide des Tutsis au Rwanda : le négationnisme face à la justice française » (interview dans l'émission "Questions internationales"), sur France Culture, (consulté le ) : « "HD : Alors, le milieu universitaire, en tout cas les spécialistes du génocide des Tutsis du Rwanda, mais aussi d'autres spécialistes d'autres génocides, nous avons réagi auprès de la présidence de Lyon 3, mais trop tard en fait, parce que nous avons appris la soutenance de cette thèse. Q Mais qui l'a fait, sa soutenance ? C'est son directeur de thèse, avec un jury qui visiblement a tenu, contrairement aux usages, plus ou moins secrète, confidentielle, la soutenance de cette thèse. " »
↑« Violence de masse et Résistance - Réseau de recherche », sur www.sciencespo.fr (consulté le ) : « Les analystes favorables aux Hutu, pourrait-on ajouter, n’ont pas moins tendance à céder à une interprétation manichéenne, comme le montre le récit sélectif de Charles Onana, Les secrets du génocide rwandais (2001). Affirmant dès le départ que dans la mesure où « de nombreux ouvrages ont été écrits sur les Hutu et sur leurs responsabilités dans le génocide, nous n’avons pas besoin d’un livre de plus sur les accusations portées contre eux » (p. 12), l’auteur révèle peu de secrets. Un grand nombre des reproches faits à la Belgique, aux États-Unis et à la MINUAR sont infondés. »
↑Grioo.comCe colloque, organisé par le magazine Africa International et la Fédération européenne des associations rwandaises, rassemblait deux anciens Premiers ministres rwandais de Paul Kagame, l'ancien ministre de la Défense du président Mobutu, Honoré Ngbanda, et la sénatrice démocrate américaine Cynthia McKinney.
↑Alain Gabet et Sébastien Jahan, « « Les faits sont têtus » : vingt ans de déni sur le rôle de la France au Rwanda (1994-2014) », Cahiers d’histoire. Revue d’histoire critique, no 129, , p. 153–173 (ISSN1271-6669, lire en ligne, consulté le )
« «L’inexorable enchaînement» de l’histoire s’appuie également sur une explication cachée, secrète, cryptique. La théorie du complot tutsi mondial n’est pas nouvelle. On en trouve des récurrences dans la propagande extrémiste. Mais là encore, la vulgate raciste n’a rien perdu de sa vigueur. Ainsi, en 2009, Charles Onana rend compte de la guerre au Congo en exhibant un « Plan de conquête de l’Afrique des Grands lacs ». Les menées conquérantes des Tutsi ne datent pas d’hier puisque le fameux plan aurait été défini en 1962 à Nyamitaba au Zaïre. C’est le journal Kangura qui nous offre la meilleure mise en contexte de ce « document ». Il vise à réveiller la vigilance des Bahutu en leur montrant la ruse et la perfidie caractéristiques des Batutsi qui, nantis de leurs femmes et de leur argent, travaillent à imposer leur suprématie sur l’Afrique des Grands lacs. C. Onana, Ces tueurs tutsi… op. cit., p. 50. »
↑« Un étrange et problématique colloque sur l’Afrique des Grands Lacs au Sénat », La Croix, (ISSN0242-6056, lire en ligne, consulté le )
« Jean-Pierre Chrétien indique en 2005 que "Les « éditions Duboiris » où Charles Onana a publié ses ouvrages et ceux des auteurs qui lui sont proches sur le Rwanda et le Congo, sont en fait une SARL monopersonnelle de M. Onana lui-même" et mentionne "Le caractère plutôt confidentiel de cette maison, non répertoriée dans les listings professionnels habituels, ni même dans l’annuaire" »
↑Charles Onana, La France et ses tirailleurs. Enquête sur les combattants de la République, Paris, Éditions Duboiris, 2003 et Noirs Blancs Beurs Libérateurs de la France. Les visages de la France Libre, préfacé par Richard Bohringer, Paris, Éditions Duboiris, 2005
↑Cf. René Maran le premier Goncourt noir, Paris, Éditions Duboiris, 2006