Conséquence de la victoire britannique au terme de la guerre de la Conquête, la création de la province de Quebec, est officialisé par la proclamation royale de 1763. Le territoire de la nouvelle colonie s'étend à la grandeur système hydrologique du fleuve Saint-Laurent et des Grands Lacs et compte plus de 70 000 habitants canadiens, très majoritairement francophones et catholiques. La proclamation royale octroie des avantages considérables aux dizaines de marchands anglais, seuls les hommes de confession protestante ou huguenote sont admis aux postes administratifs de la province de Québec[3].
L'administration coloniale est chargée d'appliquer les instructions royales, c'est-à-dire faire de l'anglais la langue officielle, procéder à l'assimilation des enfants francophones à l'école anglaise et au protestantisme et l'abolition des droits seigneuriaux[4]. Toutefois, face à la réticence générale de la population en supériorité numérique, l'instabilité grandissante dans les Treize colonies[5], et leur volonté de supplanter les nobles français[6], les autorités seront contraintes d'adopter une position de conciliation[7]. Les concessions du Parlement britannique seront officialisées par l'Acte de Québec en 1774, L'Acte garanti le droit de pratiquer librement la religion catholique et le maintien du droit civil français[5] qui assure, implicitement, la dualité linguistique[8] dans les institutions.
Cette arrivée massive de loyalistes anglophones, l'Acte de Québec devient vite inapplicable, puisque ces derniers réclament le système parlementaire et les lois civiles britanniques. Le gouvernement britannique répond aux doléances des loyalistes et propose un compromis entre les aspirations des Canadiens et celles de ses loyaux sujets : l'Acte constitutionnel de 1791[11].
Création du Bas-Canada
En 1791, en réponse à l'afflux des loyalistes, le Parlement de Grande-Bretagne décide de procéder à un redécoupage de la province de Québec d'après un clivage ethnique, créant ainsi le Haut-Canada, à l'ouest, et le Bas-Canada, à l'est.
En 1792, la nouvelle Chambre d'assemblée du Bas-Canada, dont les représentants sont élus, possède le pouvoir de prélever des impôts. La nouvelle Chambre d'assemblée du Bas-Canada est aussi une légitimation d'une démographie à plus forte influence francophone au Bas-Canada. En effet, peu après les débuts des travaux de l’Assemblée en 1793, les parlementaires, qui étaient francophones et anglophones, se sont entendus pour reconnaître le français légalement. Cette union des francophones et des anglophones dans une assemblée législative afin de reconnaître l’influence du français dans une société britannique allait devenir une des inspirations du bilinguisme et du multiculturalisme canadien[16],[17],[18].
Cette nouvelle assemblée fut un grand pas vers la démocratisation des colonies nord-américaines. Cependant, le gouverneur de l'Amérique du Nord britannique, nommé par le monarque britannique, possédait un droit de veto. De plus, le Conseil législatif du Bas-Canada, chambre haute à majorité anglophone, pouvait rejeter les projets de loi de la chambre basse. Ainsi, même si le peuple était représenté, le pouvoir est majoritairement exercé par la minorité anglophone. Par contre, le clergécatholique francophone venait contrebalancer en établissant une élite plus proche de la culture locale[19].
La région du Buckinghamshire se voit progressivement divisée en dizaines de cantons (les Cantons de l’Est) pour recevoir des colons.
On verra une immigration irlandaise significative au Bas-Canada influencée la démographie. Ce mouvement prendra de l'importance en 1847 lors de la grande Famine en Irlande[23].
Des écossais entre 1815 et 1870 composent aussi le profil de l'immigration au Bas-Canada. Ces Écossais se feront remarquer dans le domaine des affaires et de la politique. Ils dominent le commerce de la fourrure, le commerce du bois, la gestion des banques et des chemins de fer[24].
Du côté de l'immigration britanniques, on verra après 1815 une pression démographique s'intensifier dans les communautés rurales des rives du Saint-Laurent et de la rivière Richelieu[25] après l'arrivée massive d'immigrants britanniques à la recherche de terres et d'emplois. La population anglaise croîtra alors rapidement[26].
Une immigration francophone symbolique et significative a toujours transcendé le territoire du Bas-Canada. D'un millier d'immigrants de 1760 à 1840, cette immigration s'est intensifiée après les rébellions de 1837-1838 et allait considérablement s'accroître après l'Acte d'Union de 1840[27].
Guerre anglo-américaine
Lors de la guerre anglo-américaine de 1812, la milice coloniale compte théoriquement 60 000 hommes de 16 à 50 ans. Environ 10 000 conscrits et volontaires seront effectivement engagés jusqu'en 1815 ; 1 620 cas de désertion sont recensés à la suite entre autres de mauvaises conditions matérielles d’accueil des recrues[28],[29].
Entre-temps, l'élitisme britannique est de plus en plus influent au Bas-Canada surtout en matière d'immigration[31]. Au Haut-Canada un problème similaire est aussi apparu autour du pouvoir représenté par le système appelé Family Compact qui représente une mainmise ultra-conservatrice et oligarchique sur la société du Haut-Canada.
Le projet d'unir le Haut et le Bas-Canada, pour créer une seule grande colonie britannique (province du Canada)[32], commence à faire des adeptes[33].
Le gouverneur George Ramsay[34] entretient de mauvais rapports avec les patriotes majoritairement francophones[35], jusqu'à s'opposer directement à Papineau[36]. Dans cette lancée il prorogera la session parlementaire en 1827. En retour, des résolutions contre le gouverneur Ramsay sont envoyées à Londres. Le Parlement britannique décide finalement de le remplacer. Un comité spécial recommande de limiter l'intervention arbitraire du gouverneur et écarte le projet d'union entre les deux Canada.
De son côté, l'élite francophone est orientée par un système d'éducation contrôlé par l'Église catholique qui la dirige essentiellement vers quatre professions : notaire, avocat, médecin ou prêtre[40].
La tension entre patriotes majoritairement francophones (mais contenant également des anglophones) et les conservateurs bureaucrates atteint un paroxysme à la fin des années 1830.
Par la suite, les patriotes subissent les défaites face aux troupes coloniales britanniques. Ils doivent se replier vers les États-Unis pour préparer une contre-attaque. Ces résistants, les Frères chasseurs[50], cherchent à établir des alliances avec les insurgés haut-canadiens[51] et les Américains, sans succès. Papineau, de son côté, ne réussit pas à obtenir l'appui de la France[11].
En février 1839, le Rapport Durham propose l'union entre le Haut et le Bas-Canada afin de faire face aux conséquences politiques des Rébellions du Haut et du Bas-Canada. L'union donnera naissance à la province du Canada en 1841[33].
Cependant la plus grande nouveauté était la création de la Chambre d'assemblée du Bas-Canada, composée de représentants élus par la population. Il s'agit de la première assemblée élue au suffrage censitaire. Certaines femmes ont pu voter pendant toute l'existence du Bas-Canada ; en effet l'Acte constitutionnel octroyait le droit de vote à toute personne propriétaire (sexe non mentionné) de plus de 21 ans. Cependant le nombre de femmes se prévalant de ce droit semble avoir été marginal et cette situation allait contre les mœurs de l'époque[55]. Voter était dangereux à l'époque (batailles de rues, fusillades, etc.)[54].
Le fleuve Saint-Laurent occupe un rôle crucial dans les transports au Bas-Canada. Non seulement ce dernier traverse la colonie d'est en ouest, mais il permet également d'accéder à la colonie du Haut-Canada en amont. Ce trajet est facilité par la construction du canal de Lachine dans les années 1820. Même en hiver, le fleuve est utilisé par pont de glace. Les ports de la province, et plus particulièrement le port de Québec, sont essentiels à l'économie[57].
Le , le navire Accommodation devient le premier bateau à vapeur à naviguer sur le fleuve[58].
Le réseau routier se développe progressivement bien que le chemin du Roy, construit à partir des années 1660, demeure le lien principal entre Montréal et Québec. La création de nouveaux liens routiers vers les régions sans voies navigables devient pressante. Le chemin Craig, reliant Québec aux États-Unis, est construit vers 1810.
Le Bas-Canada s'inscrit dans une période de pré-industrialisation caractérisée par la naissance de l'industrie du bois. La population rurale vit de l'agriculture et de l'élevage. Cependant, la colonie fournit des matières premières au Royaume-Uni dont du blé, du bois et des fourrures[2]. Elle reçoit en retour des produits transformés ou fabriqués comme du tissu, des instruments, du sucre et du thé. Les guerres napoléoniennes, source de blocus commerciaux en Europe, ont pour conséquence de faire naître une véritable industrie du bois au Bas-Canada vers 1820. Le bois devient un puissant moteur économique en ville comme en campagne, que ce soit pour la coupe, la drave, la transformation ou la construction navale[60],[61].
Le métier de cultivateur est, de loin, le plus pratiqué au Bas-Canada. Durant l'hiver, une partie des cultivateurs travaillent dans les chantiers forestiers. L'urbanisation, grâce à l'industrialisation, s'accélère avec une augmentation du nombre d'ouvriers dans les ports, les commerces et les carrières.
Culture
Au début du XIXe siècle, l'alimentation au Bas-Canada était variée et copieuse. La population se réjouissait de la disponibilité d’un large éventail de produits alimentaires : viande, fruits et légumes du potager, pain, fromage, beurre, œufs, poisson, gibier, porc, volaille, sirop d’érable, fèves au lard. Ces aliments étaient disponibles dans des centaines d’épiceries, boucheries, boulangeries et tavernes qui se trouvaient principalement dans les villes[62].
À l’époque coloniale, l’habillement variait selon l’appartenance sociale des habitants. Les paysans portaient des vêtements simples, en laine, en toile ou en coton. Les femmes portaient des jupes et des blouses avec des châles et des mocassins. Les hommes portaient des gilets et des ceintures fléchées. Lors de grands froids, les gens portaient des tuques. En ville, la mode était inspirée des habits parisiens, mais prenait des traits canadiens-français distingués. Les robes et les tuniques étaient confectionnées avec des tissus riches de soie et de velours. De plus, les chapeaux hauts fabriqués de feutre étaient d’un grand intérêt[63].
La première moitié du XIXe siècle les expositions, inspirées des expositions coloniales, étaient des présentations ludiques où le public avait accès à des objets qui piquaient leur curiosité. Comme la présentation d’un objet ou des objets au public. Cette forme d’amusement voyageait périodiquement à travers le pays. Elles se sont rapidement établies à Montréal et à Québec[64]. En effet, l’art avait une grande place au sein de la société. En 1802, Joseph Quesnel écrit sa première pièce de théâtre: L'anglomanie ou le dîner à l'angloise. En décembre, 1825 le théâtre royal fut inauguré.
Notes et références
↑Cette devise est inscrite sur le sceau du Bas-Canada. Elle est tirée des Odes du poète Horace.
↑(en) Aaron Luedtke, « As Far as the Laws of Great Britain Permit: TheEffect of British Imperialism on French Canada,and Its Effect on the American Revolution », Eastern Michigan University, , p. 12 (lire en ligne).
↑Michel Brunet, « L’Église catholique du Bas-Canada et le partage du pouvoir à l’heure d’une nouvelle donne (1837-1854) », dans Jean-Paul Bernard (dir.), Les idéologies québécoises au 19e siècle, Montréal, Les éditions du boréal express, coll. « Études d'histoire du Québec » (no 5), , 151 p. (lire en ligne), p. 83-97.
↑Hervé Gagnon, « Des animaux, des hommes et des choses : Les expositions au Bas-Canada dans la première moitié du XIXe siècle », Histoire sociale, vol. XXVI, no 52, .
Bibliographie
Fernand Ouellet, Le Bas-Canada, 1791-1840 : changements structuraux et crise, Éditions de l'Université d'Ottawa, 1976.