« Signum ϵ significat est. Ita a ϵ b legitur a est quoddam b ; ... »
Il s'agit d'un epsilon, première lettre de la troisième personne du singulier ἐστί du verbe « être » en grec ancien. Sa graphie correspond à celle répandue en Europe continentale à l'époque de Peano. Cependant Peano utilisera aussi le symbole ε[1].
La relation se lisait ainsi à l'origine « est un »[1]. Cette formulation subsiste aujourd'hui dans une certaine mesure, par exemple lorsque l'on traduit par « est un entier naturel »[Note 3].
Dans le cas général se lit de nos jours « appartient à », « est un élément de », ou « est dans »[Note 4].
La relation réciproque, moins utilisée, se lit « contient », « comprend », ou « possède ». Le terme contient présente le désavantage d'être ambigu, pouvant également désigner l'inclusion. Utiliser possède, comme le recommande Gérard Debreu en soulignant que possède est le symétrique naturel de appartient[2], élude ce problème. D'autres auteurs, tels que Paul Halmos[3] ou George Boolos[4], recommandent plutôt d'utiliser systématiquement « contient » pour traduire , et « inclut » pour . Enfin, la plupart des auteurs, dont par exemple Nicolas Bourbaki[Note 4], n'utilisent tout simplement pas cette relation réciproque, tournant systématiquement leurs phrases de façon à pouvoir utiliser « appartient à » ou « est un élément de ».
En LaTex : s'écrit en utilisant la commande « \in », signifiant dans en anglais ; s'écrit en utilisant l'une des commandes équivalentes « \ni » et « \owns », respectivement un « \in » inversé et possède en anglais.
Dans le langage de programmation Haskell qui admet une définition de listes en compréhension, l'appartenance se note <-.
La définition historique donnée par Cantor en [5] est :
« Un ensemble est une collection d'objets issus de notre intuition ou de notre pensée (que nous appellerons éléments de ), considérée comme un tout. »
Par exemple, si , alors , et sont les éléments de . Ils appartiennent à .
On prendra garde à ne pas confondre « élément » et « sous-ensemble ». Dans l'exemple qui précède, et sont parmi d'autres des sous-ensembles de mais n'en sont pas des éléments. Ils n'appartiennent donc pas à , au même titre que ou .
Felix Hausdorff relève que cette approche ne constitue pas une définition à partir d'un concept antérieur, mais est un point de départ pour la formalisation d'une grande partie des mathématiques :
« on pourra objecter qu'on a défini idem per idem voire obscurum per obscurius. Il faut considérer qu'il n'y a pas là une définition mais un procédé d'exposition, une référence à un concept primitif familier à tous […][Note 5]. »
Éléments d'ensembles, éléments de classes
Dans l'expression « x est élément de M », la lettre M désigne souvent un ensemble. C'est notamment ce que suppose la présentation formelle donnée plus haut, où cette expression est notée .
Une théorie trop naïve des ensembles conduisant à des paradoxes fameux, comme celui créé par l'ensemble de tous les ensembles, il est parfois utile de considérer une relation d'appartenance d'un élément x à un objet M qui n'est pas un ensemble mais une classe. C'est par exemple le cas en théorie des catégories ; dans ce dernier contexte, toutefois, on utilise plutôt l'expression : « x est un "objet" de M ».
Dans le formalisme des classes de la théorie la plus couramment utilisée, la théorie des ensembles de Zermelo-Fraenkel, les classes s'identifient à des prédicats unaires du langage. Dire que x est élément de la classe M correspondant au prédicat P, c'est simplement une autre façon de dire que P(x) est vrai.
Ce symbole est repris comme titre d'un recueil de poésie publié par Jacques Roubaud en 1967. Pour l'auteur, il est aussi « par extension, symbole de l'appartenance au monde de « l'être au monde »[8]. »
↑Mais peut l'être sur une sous-classe d'ensembles, comme il en est sur la classe particulière, mais souvent considérée, des nombres ordinaux.
↑ Qui est plutôt une affirmation du type de , à savoir celui des entiers naturels, que l'on noterait formellement aujourd'hui .
↑ a et bNicolas Bourbaki recommande d'utiliser « appartient à » ou « est un élément de » (E II.1) ; mis à part quelques rares exceptions (par exemple « tout sous-groupe du groupe additif Z qui contient 1 est égal à Z », A I.98), cette recommandation est respectée dans l'ensemble des Éléments de mathématiques.
↑Comme le fait remarquer dans son exposé de la théorie des ensembles ((en) Felix Hausdorff, Set theory, AMS Chelsea Publishing, 1957 (rééd. 2000) (1937 pour l'édition allemande), 352 p. (ISBN978-0-8218-3835-8), page 11.
↑George Boolos (4 février 1992). 24.243 Classical Set Theory (lecture). (Speech). Massachusetts Institute of Technology, Cambridge, MA.
↑(de) Georg Cantor, Beiträge zur Begründung der transfiniten Mengenlehre, Leipzig, Teubner, 1894-1895, page 481 [Lire en ligne sur Gallica (page consultée le 14 avril 2009)]
↑Voir René Cori et Daniel Lascar, Logique mathématique II. Fonctions récursives, théorème de Gödel, théorie des ensembles, théorie des modèles [détail des éditions], chapitre 7, p. 113-114 notamment.
↑Hans Freudenthal, « Notation mathématique », Dictionnaire des mathématiques – fondements, probabilités, applications, Encyclopædia Universalis et Albin Michel, Paris 1998.
↑Jacques Roubaud, ∈, Paris, Gallimard, coll. Poésie/Gallimard, 1988 (1re éd. 1967), 154 p. (ISBN978-2-07-032524-5, BNF34992581), p. 11.