En 1952, il soutient en Sorbonne une thèse de doctorat d’État sur La structure physique du signal musical et phonétique (sous la direction de René Lucas, Edmond Bauer, Henri Pieron et du physiologiste Alexandre Monnier).
Parcours professionnel
Il est nommé assistant au Laboratoire de physique de métaux, dirigé d’abord par Félix Esclangon, puis par Louis Néel. Il s'initie aux techniques de la métallurgie, à la manipulation de l’appareillage électrique et électronique, et rédige des rapports d’essais de matériaux ou d’analyses techniques. À la fin de la guerre, il entre au CNRS, au Laboratoire d’acoustique et de vibrations à Marseille, et au CRSIM (Centre de recherche scientifique industriel et maritime), héritier d’un Laboratoire de la Marine nationale (futur Laboratoire d’études mécaniques du CNRS).
Il participe aux travaux du Centre d’études de la radio-télévision (Jean Tardieu, dir.), rue de l’Université, organisme de recherche de la Radiodiffusion française, et en particulier de l’équipe réunie autour de Pierre Schaeffer, créateur de la musique concrète.
En 1954, il soutient en Sorbonne une seconde thèse de doctorat d’État, en Lettres (Philosophie) cette fois-ci, intitulée La création scientifique, thèse menée sous la direction de Bachelard. Il obtient le grade et publiera peu de temps après ses travaux en 1957.
De 1954 à 1960, avec de nombreuses interruptions, Abraham Moles occupe la charge de directeur du Laboratoire d’électroacoustique Scherchen, situé dans le petit village de Gravesano en Suisse italienne, sous la direction du chef d’orchestre Hermann Scherchen, l’un des pionniers de Radio Berlin jusqu’en 1933 qui avait révélé des compositeurs aussi fameux que Luciano Berio, Iannis Xenakis, Bruno Maderna, Luigi Nono.
À partir de 1966, il donne des cours à l’Université de Strasbourg (dans le Département dirigé par Henri Lefebvre), d'abord en sociologie puis dans la Chaire de psychologie sociale. Il y crée en 1966 un Institut de psychologie sociale des communications qu'il dirige jusqu'en 1987, appelé communément l'École de Strasbourg par les anciens étudiants devenus universitaires dans le monde entier et aujourd'hui réunis dans l'Association internationale de micropsychologie et de psychologie sociale des communications.
Le 26 octobre 1966[3], les étudiants situationnistes le prennent pour cible[4] et interrompent son cours à coups de tomates[5] pour caricaturer son rôle d'automate ou de « robot conforme » voué à la « programmation des jeunes cadres »[4]. La consigne « Tomatez Moles ! » avait été donnée dès 1963 en interne chez les situationnistes[3]. Moles avait envoyé une « lettre ouverte au groupe situationniste » datée du 16 décembre 1963 où il proposait « l' axe de la technologie » comme lieu de recherche de « situations nouvelles ». Le numéro 9 de l'I.S. la publie sous le titre « Correspondance avec un cybernéticien », suivie d'une réponse insultante de Guy Debord datée du 26 décembre, adressée à « Petite tête » – très certainement en se référant au tour épistolaire employé par Lautréamont quand il évoquait « les Grandes-Têtes-Molles », expression familière des surréalistes que Moles évoque dans sa lettre ouverte. Et en mars 1967, des admirateurs parisiens des situationnistes vont de nouveau l'interrompre à coups de tomates, lors de sa venue au Musée des Arts décoratifs (Paris) où il est accueilli par Jean-Jacques Lebel[3].
Son ouvrage Art et ordinateur (1971) transpose en esthétique les théories de Shannon et s'inspire des pratiques de l'Oulipo, dont il est l'invité d'honneur en 1970.
1963. Communications et langages (en collaboration avec B. Vallancien), Paris, Gauthier-Villars
1966. Phonétique et phonation (en collaboration avec B. Vallancien) Paris, Masson
1969. L'affiche dans la société urbaine, Paris, Dunod
1970. Créativité et méthodes d'innovation, Paris, Fayard
1971. Art et ordinateur, Paris, Casterman; Réédité sous une forme augmentée, sous la direction et avec la participation d'Abrah, am Moles, Paris, Editions Blusson, 1990.
1971. Psychologie du kitsch, Paris, Denoël
1971. La communication, Les dictionnaires du savoir moderne (ouvrage collectif sous la direction d'Abraham Moles et Claude Zeltmann)[7], Paris
1972. Théorie des objets, Paris, Éditions universitaires
1972. Psychologie de l'espace (en collaboration avec Élisabeth Rohmer), Paris, Casterman
1973. Théorie de l'information et perception esthétique, Paris, Denoël
1973. Sociodynamique de la culture, Paris, Mouton
1973. La communication, Paris, Marabout
1976. Micropsychologie et vie quotidienne (en collaboration avec Élisabeth Rohmer), Paris, Denoël
1977. Théorie des actes (en collaboration avec Élisabeth Rohmer), Paris, Casterman
1981. L'image, communication fonctionnelle, Paris, Casterman
1982. Labyrinthes du vécu, Paris, Klincksieck
1986. Théorie structurale de la communication et société, Paris, Masson
1990. Les sciences de l'imprécis (en collaboration avec Élisabeth Rohmer), Paris, Seuil
1998. Psychosociologie de l'espace (en collaboration avec Élisabeth Rohmer), textes rassemblés, mis en forme et présentés par Victor Schwach, Paris, L'Harmattan
↑Cf. Martial Robert, 1999, p. 138. Pierre Schaeffer, des transmissions à Orphée. Paris, L'Harmattan, 416 p.
↑ ab et cVie et mort de Guy Debord par Christophe Bourseiller, en 1999 puis réédité en 2016 aux Éditions Plon [1].
↑ a et bHenri Lefèbvre et la critique radicale par Michel Trebitsch, chercheur à l’IHTP et animateur avec Nicole Racine d'un groupe de recherche sur
l’histoire des intellectuels, en 1997 [2].
↑Le mythe brisé de l'Internationale situationniste, par Fabien Danesi, en 2008, page 241.