Sous-espace stable

En algèbre linéaire, un endomorphisme laisse stable un sous-espace vectoriel F quand les éléments de F ont pour image un élément de F.

La recherche de sous-espaces stables est étroitement liée à la théorie de la réduction des endomorphismes.

Définitions

Soient E un espace vectoriel et u un endomorphisme de E.

Un sous-espace vectoriel F de E est dit stable par u quand , c'est-à-dire : . Dans ce cas, u induit sur F un endomorphisme

L'endomorphisme induit est la double restriction de l'endomorphisme initial avec à la fois un nouvel ensemble de départ et un nouvel ensemble d'arrivée. La condition de stabilité est une condition nécessaire et suffisante pour que cette double restriction soit une application.

Représentation matricielle

Si E est de dimension finie et muni d'une base adaptée à F (c'est-à-dire une base de F complétée en une base de E), la matrice représentative de u peut être notée par blocs

Alors F est un espace stable par u si et seulement si C = 0, et dans ce cas la matrice de l'endomorphisme induit sur F est A.

Exemples

  • Soient E un espace vectoriel et u un endomorphisme de E. Les deux sous-espaces triviaux {0} et E sont stables par u.
  • Un endomorphisme d'un espace vectoriel non nul pour lequel les seuls sous-espaces stables sont les deux sous-espaces triviaux est qualifié d'endomorphisme irréductible. Tout endomorphisme d'une droite vectorielle est irréductible. Toute rotation d'un plan euclidien dont l'angle n'est pas un multiple de est irréductible. En dimension finie, un endomorphisme est irréductible si et seulement s'il est cyclique et si son polynôme minimal est irréductible.
  • Soient E un espace vectoriel, u un endomorphisme de E et une famille de sous-espaces stables par u. Alors et sont stables par u
  • Une droite est stable par un endomorphisme u si et seulement si elle est engendrée par un vecteur propre de u. En conséquence, tout sous-espace engendré par des vecteurs propres de u est stable par u.
  • Si u est un endomorphisme diagonalisable de E alors tout sous-espace de E possède un supplémentaire stable par u[1]. À l'inverse, le noyau d'un endomorphisme nilpotent non nul est un sous-espace (stable) sans supplémentaire stable.
  • Si u est diagonalisable, alors sa restriction à tout sous-espace stable est diagonalisable[1], c.-à-d. que les sous-espaces stables sont exactement les sous-espaces engendrés par des vecteurs propres.

Extension de la notion

Pour un espace vectoriel, un sous-espace vectoriel de et un ensemble d'endomorphismes de , on dit que est stable par si est stable par tout élément de .

Stabilité et trigonalisation

On suppose encore E de dimension finie n. Un endomorphisme est dit trigonalisable quand il possède une matrice représentative triangulaire supérieure.

Cela revient à chercher des espaces , de dimensions respectives 1, 2, …, n, tous stables par u. On parle alors de drapeau stable par u.

Sous-espaces caractéristiques

Soient E un K-espace vectoriel, u un endomorphisme de E et P un polynôme à coefficients dans K. Les sous-espaces et sont stables par u. Pour que cette construction soit intéressante, il est nécessaire que l'endomorphisme soit à la fois non nul et non inversible. C'est ce qui arrive en dimension finie lorsque le polynôme P est un diviseur strict du polynôme minimal de u.

Soit une valeur propre de u, c'est-à-dire, en dimension finie, une racine du polynôme . Notons la multiplicité de dans le polynôme . On peut définir deux espaces stables intéressants :

  • s'appelle espace propre associé à la valeur propre  ;
  • s'appelle sous-espace caractéristique associé à la valeur propre , il contient l'espace propre ci-dessus. Il lui est égal si et seulement si la multiplicité de cette valeur propre dans le polynôme minimal vaut 1.

Lorsque le polynôme est scindé, le lemme des noyaux permet d'affirmer que les sous-espaces caractéristiques sont supplémentaires. Dans ce cas u est diagonalisable si et seulement si chaque espace caractéristique est égal à l'espace propre correspondant.

Sous-espaces cycliques

Soient E un K-espace vectoriel, u un endomorphisme de E et x un vecteur de E. L'ensemble est stable par u. On l'appelle sous-espace cyclique engendré par x.

On dit que u est un endomorphisme cyclique s'il existe un vecteur x de E tel que le sous-espace cyclique engendré par x est égal à E.

Si E est de dimension n et u est un endomorphisme cyclique de E, alors est une base de E et la matrice de u dans cette base est une matrice compagnon.

En dimension finie, un endomorphisme diagonalisable est cyclique si et seulement si ses valeurs propres sont simples (sont des racines simples du polynôme caractéristique.) Plus généralement, un endomorphisme est cyclique si et seulement si son polynôme minimal et son polynôme caractéristique sont égaux (au signe près).

Sous-espaces stables et dualité

Soient E un espace vectoriel, u un endomorphisme de E et tu l'endomorphisme transposé de l'espace dual E*. Un sous-espace F de E est stable par u si et seulement si son orthogonal F° dans E* est stable par tu. En particulier, un hyperplan de E est stable si et seulement s'il est le noyau d'une forme linéaire propre pour tu, ce qui revient à dire qu'il contient un sous-espace de la forme Im(u − λ Id). En dimension finie, ceci ne peut se produire que pour λ valeur propre.

Si E est un espace de Hilbert, on peut donner une variante : un sous-espace fermé F est stable par un opérateur borné u si et seulement si son orthogonal F dans E est stable par l'opérateur adjoint u*, et un hyperplan fermé est stable par u si et seulement si sa normale est propre pour u*.

Commutation et stabilité

Si deux endomorphismes u et v commutent, alors le noyau et l'image de u sont stables par v[2]. Plus généralement, le noyau et l'image de tout polynôme en u est stable par v (puisque cet endomorphisme commute alors aussi à v), en particulier[2] tout sous-espace propre pour u est stable par v (puisque c'est le noyau d'un polynôme en u de degré 1), et de même pour les sous-espaces caractéristiques.

Notes et références

  1. a et b Exercices corrigés sur Wikiversité.
  2. a et b Fabrice Lembrez, Algèbre et géométrie : PC-PC* PSI-PSI* PT-PT*, Nathan, 365 p. (ISBN 978-2-09-812099-0, lire en ligne), p. 123-124.

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