Le Registre des bénéficiaires effectifs (RBE) est un répertoire d'entités juridiques contenant l'identité de leurs véritables propriétaires et bénéficiaires (les ayants droit économiques).
Au niveau européen, le principe d'un registre des bénéficiaires effectifs a été approuvé en 2018, en vue de lutter contre la criminalité financière. Le fait que les données soient publiques a reçu un coup d'arrêt en 2022.
Droit européen
La Directive de l'Union européenne 2018/843 renforce les modalités de tenue de ce registre institué par la Directive de l'Union européenne 2015/849 relative à la prévention de l'utilisation du système financier aux fins de blanchiment des capitaux ou du financement du terrorisme (en)[1]. Cette directive est prise dans un contexte de scandales financiers à répétition, dont ceux révélés par les Panama Papers, et vise à compliquer la tâche des fraudeurs et des réseaux criminels cherchant à dissimuler leurs activités derrière des prête-noms et des sociétés-écrans[2].
Le commissaire aux comptes, dans le cadre de sa profession, a une obligation en matière de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme[5].
Mise en place
L'enregistrement des bénéficiaires effectifs des sociétés, fonds d'investissement, associations et entités assimilées s'effectue par les entités concernées auprès d'Infogreffe. À défaut, « les personnes assujetties par l'obligation de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme doivent (personnes mentionnées à l’article L. 561-2 du code monétaire et financier), de porter à la connaissance du greffe les divergences constatées entre les bénéficiaires effectifs qu’elles identifient du fait de leur connaissance client et les bénéficiaires effectifs mentionnés dans le registre des bénéficiaires effectifs ». La consultation s'effectue auprès de l'INPI, le public ayant accès selon l'article L561-46 du code monétaire et financier aux seuls « nom, nom d'usage, pseudonyme, prénoms, mois, année de naissance, pays de résidence et nationalité des bénéficiaires effectifs ainsi qu'à la nature et à l'étendue des intérêts effectifs qu'ils détiennent dans la société ou l'entité. », tandis que les organismes habilités définis dans le même article de loi et les autorités de contrôle ont accès à l'intégralité des informations[6],[7].
Suspension
Le 22 novembre 2022, la Cour de justice de l’Union européenne a jugé que ces registres portaient atteinte à la vie privée et a déclaré illégal leur accès par le grand public[8]. Cet arrêt fait suite à une plainte déposée au Luxembourg par deux personnes, dont Patrick Hansen[8], dirigeant de Luxaviation, la plus grande société de jets privés au monde, et de 116 autres sociétés dont plusieurs dizaines dans des paradis fiscaux[8].
Début janvier 2023, le journal Le Monde relève que la plateforme de consultation ouverte au public en avril 2021, est désormais inaccessible alors que sa création était considérée comme constituant une avancée notable en termes de transparence financière. Le Ministre de l'Économie affirme n'avoir donné aucune directive dans ce sens et renvoie à l'INPI[9].
Le 4 janvier, l'INPI justifie la fermeture des données en open data par un arrêt du 22 novembre 2022 de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), qui a déclaré illégal l’accès du grand public aux registres européens de bénéficiaires effectifs, au nom du respect de la vie privée, avant d'incriminer un dysfonctionnement technique[10].
Cet arrêt provoque une totale incompréhension auprès des spécialistes de la transparence financière et de la lutte contre le blanchiment d'argent ; Delia Ferreira Rubio, la présidente de Transparency International juge que « C’est le plus beau cadeau que la Cour pouvait faire au crime organisé »[2].
Le 13 janvier, le Ministère de l'Économie annonce le rétablissement temporaire du service, interrompu selon lui pour des « raisons techniques », le temps de tirer les conséquences de l'arrêt de la CJUE. Il assure que le service sera accessible aux « organes de presse et [aux] organisations de la société civile y ayant un intérêt légitime »[10].
En février 2023, le service n'est accessible sur le site de l'INPI qu'aux personnes habilitées[6].
Transposition dans les autres pays européens
Selon Radio France, reprenant une étude de Transparency international, la transposition dans les différents pays européens est très hétérogène[11].
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Droit suisse
En Suisse, un registre des bénéficiaires économiques des sociétés présentes dans le pays devrait être mise en place, mais pas avant 2026[12]. Le registre permettra aux autorités de poursuite pénale de déterminer qui se trouve derrière une structure juridique (entreprise opérationnelle ou structure offshore), c'est-à-dire qui sont les « ayants droit économiques »[12]. Selon le projet du gouvernement, le registre sera tenu par le Département fédéral de justice et police et ne sera pas public[12].
↑ a et b« « La Cour a détruit en un jour le résultat d’années de travail » : stupeur dans la société civile après une décision judiciaire sur la transparence financière », Le Monde.fr, (lire en ligne, consulté le )
↑ ab et cAnne Michel et OCCRP, « Le visage caché de Patrick Hansen, l’homme qui a fait reculer la transparence financière en Europe », Le Monde.fr, (lire en ligne, consulté le ).
↑Anne Michel, Manon Romain, Maxime Vaudano, Abdelhak El Idrissi et Adrien Sénécat, « Transparence financière : la France suspend discrètement son registre des bénéficiaires effectifs de sociétés », Le Monde.fr, (lire en ligne, consulté le )
↑ a et bLes Décodeurs, « Transparence financière : la France rétablit provisoirement son registre des bénéficiaires effectifs de sociétés », Le Monde.fr, (lire en ligne, consulté le )