Lennon a écrit « Nobody Loves You (When You're Down and Out) » au début de son « week-end perdu », nom qu'il donne à son séjour à Los Angeles lors de sa séparation d'avec sa femme Yoko Ono[2],[3]. La chanson reflète la dépression et la solitude qu'il ressent pendant cette période[1]. Lennon en enregistre une démo acoustique dès le mois d'octobre 1973[3]. Outre sa séparation d'avec Yoko Ono, les paroles sont aussi influencées par sa déception face à l'accueil négatif de son travail par les critiques et le public, et par son sentiment d'avoir été trompé par l'industrie musicale[1]. Diverses lignes pourraient être considérées comme des réponses cyniques à son public, à Yoko Ono, ou aux critiques musicaux[4]. En réponse à la question de savoir s'il aime quelqu'un, le chanteur répond « c'est du showbiz »[3],[5]. Les paroles semblent également exprimer le ressentiment de Lennon face au fait d'être celui qui doit éveiller les gens à ce qui se passe, et de n'être quand même pas apprécié, avec des paroles sur la façon dont il était « passé de l'autre côté » et « vous a tout montré »[5],[6].
Les lignes sur la traversée de l'eau pour voir « des sorciers borgnes » peuvent faire référence à la désillusion de Lennon avec le Maharishi ou à son succès partiel avec Arthur Janov[3]. La chanson se termine cyniquement, avec la phrase « Tout le monde vous aime quand vous êtes à six pieds sous terre »[4],[5]. Une autre ligne qui s'ajoute au cynisme de la chanson est « Je te gratterai le dos et tu poignardera le mien »[2],[5].
Les auteurs Ken Bielen et Ben Urish décrivent la voix de Lennon dans la chanson comme étant « rauque », affirmant que la production contribue à donner « une ambiance aliénée à sa performance vocale léthargique (mais pas terne) »[6]. Ils affirment également que la section de cuivres s'ajoute à « l'épais couvert musical », tout comme le solo de guitare de Jesse Ed Davis, qu'ils comparent à un « loup hurlant »[5]. Le tempo de la chanson change quand les paroles passent de l'apathie aux explosions émotionnelles[4].
Lennon a dit que « Nobody Loves You (When You're Down and Out) » serait une chanson idéale à chanter pour Frank Sinatra[3],[4],[5]. Cela fait probablement référence au ton léthargique de la chanson[2]. Le journaliste et critique de rock Paul Du Noyer affirme que « Nobody Loves You (When You're Down and Out) » a une « discrète sensation de fin de soirée » qui rappelle des chansons de Sinatra telles que «One for My Baby (and One More for the Road)» ou « In the Wee Small Hours of the Morning »[6].
Le juge chargé du procès intenté par Morris Levy contre Lennon pour les similitudes entre « Come Together » des Beatles (écrite par Lennon) et « You Can't Catch Me » de Chuck Berry a cité les paroles de « Nobody Loves You (When You’re Down and Out) », affirmant que les mots « tout le monde se bouscule pour un dollar et un sou » étaient une introduction idéale à l'affaire[4].
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« Nobody Loves You (When You're Down and Out) » est qualifiée par l'auteur John Blaney de « chanson signature » du week-end perdu[1]. Bielen et Urish affirment qu'il « capture l'essence d'un monologue intérieur à trois heures du matin, aux yeux troubles, à l'apitoiement sur soi, imbibé d'alcool », et qu'il contient « une certaine bravade et grandeur [...] qui rend la vacuité des vers et la rage impuissante des refrains éloquentes et poignantes »[5]. Le journaliste Paul Du Noyer la qualifie de « ballade colossale » qui ne transpire « que la sincérité » alors qu'elle est « un témoignage tentaculaire du cynisme et de l'apitoiement sur lui-même de John »[6]. Selon Chip Madinger et Mark Easter, Lennon avait « rarement écrit des mots plus honnêtes dans sa vie »[2]. L'historien de la pop Robert Rodriguez fait l'éloge de la guitare solo « incroyablement fluide » de Jesse Ed Davis[7].
Autres versions
La version de la chanson sur Menlove Ave. a des paroles alternatives et une instrumentation réduite au minimum[5]. Par exemple, la ligne sur la version de Walls and Bridges « Je gratterai ton dos, tu poignardera le mien » a été remplacée par « Je gratterais ton dos, tu grattera le mien »[2]. L'auteur John Blaney trouve cette version encore plus mélancolique que la version sur Walls and Bridges, affirmant que le sifflement de Lennon au début de la chanson donne à la version un « sentiment d'isolement solitaire » et que la guitare de Jesse Ed Davis « produit des gémissements palpables et des cris de désespoir »[1]. Rogan trouve que la version sur Menlove Ave. semble « légère » par rapport à celle de Walls and Bridges, mais pense tout de même qu'elle constitue un « addendum intéressant au catalogue Lennon »[4].
La version sur John Lennon Anthology est encore différente, incorporant des instruments supplémentaires, y compris des claviers, des percussions et une guitare[1].
Interprètes
Les musiciens qui ont joué sur l'enregistrement original sont les suivants[1]:
↑ abcdef et gBlaney, J., Lennon and McCartney: together alone : a critical discography of their solo work, Jawbone Press, , 95–96 p. (ISBN9781906002022)
↑ abcd et eMadinger, C. et Easter, M., Eight Arms to Hold You, 44.1 Productions, (ISBN0-615-11724-4), p. 102
↑ abcde et fJackson, A.G., Still the Greatest: The Essential Solo Beatles Songs, Scarecrow Press, , 124–126 p. (ISBN9780810882225)