Helene Kenyeri est, à 25 ans, la première femme de l'histoire à avoir été admise, en 2007, parmi les vents de l'orchestre de l'opéra d'État de Vienne. Recrutée au poste de second hautbois jouant le cor anglais, elle avait rejoint ainsi les seules quatre autres femmes de l'orchestre : une harpiste, une violoniste, une altiste et une violoncelliste.
Il s'agit, tous pays confondus, d'une situation exceptionnelle : jamais jusqu'alors une femme n'avait été engagée dans la section des vents d'un orchestre symphonique professionnel avant que les pupitres des cordes ne comptent au moins dix ou douze femmes[1]. La situation est doublement exceptionnelle : elle fut admise au pupitre de hautbois qui donne sa couleur si particulière à la formation autrichienne alors que l'orchestre viennois ne tolérait dans ses rangs ni les femmes, ni les personnes de couleur jusqu'en 1997[2].
Considérée comme un symbole de l'ouverture de ce bastion de tradition masculine, Helene Kenyeri aurait dû avoir la possibilité, à l'issue des trois années probatoires imposées comme à ses collègues hommes, de solliciter son admission en qualité de membre à part entière de l'association musicale Wiener Musikverein du prestigieux Orchestre philharmonique de Vienne dont les musiciens sont recrutés parmi ceux de l'opéra. Son licenciement en [3], suscitant scandale dans la presse et division de l'orchestre[4], ne lui a pas laissé l'occasion de jouer « hors statut » la fameuse Marche de Radetzky du Concert du nouvel an à Vienne, qu'un hautboïste japonais n'avait pas non plus été autorisé à interpréter parce que sa « physionomie » était incompatible avec le caractère « autrichien » de l'œuvre[5].