Le droit moral est un droit que détient l'auteur d'une œuvre protégée par le droit d'auteur. Ce droit est reconnu par les juridictions de droit civil et, dans une moindre mesure, par les juridictions de droit coutumier. Il comprend le droit à l'attribution, le droit de publier l'œuvre anonymement ou sous pseudonyme, et le droit à l'intégrité de l'œuvre[1]. Le droit à l'intégrité de l'œuvre permet à l'artiste de faire opposition à une altération, distorsion ou mutilation de l'œuvre qui porterait préjudice à l'honneur ou à la réputation de l'auteur[2]. Tout fait de nature à dévaluer la relation entre l'artiste et l'œuvre, même une fois qu'elle ne serait plus en sa possession, est susceptible de faire invoquer ce droit. Le droit moral est distinct du droit de nature économique lié au droit d'auteur, dit droits patrimoniaux. Même si l'auteur a transmis ses droits patrimoniaux à des tiers, le droit moral sur l'œuvre lui reste attaché[3].
La France et l'Allemagne ont été les premiers pays à reconnaître le droit moral[4], avant même leur inclusion dans la Convention de Berne pour la protection des œuvres littéraires et artistiques en 1928[5]. Le Canada reconnaît le droit moral dans sa Loi sur le droit d'auteur[6]. Les États-Unis ont adhéré à la Convention en 1989[7] et incorporé une version du droit moral dans leur loi sur le copyright (Title 17 of the U.S. Code).
Certaines juridictions permettent de renoncer au droit moral[5]. Aux États-Unis, le Visual Artists Rights Act de 1990 reconnaît des droits moraux, mais qui ne portent que sur un sous-ensemble restreint des œuvres visuelles[8].
Certaines juridictions comme l'Autriche distinguent le droit moral sur l'intégrité de l'œuvre, et le droit moral qui limite les utilisations qui pourraient porter atteinte à l'intégrité de l'auteur. Il existe des services de certification qui permettent à l'artiste de déclarer les usages permis ou interdits pour éviter une violation du droit moral au sens le plus large[9].
« Indépendamment des droits patrimoniaux d’auteur, et même après la cession desdits droits, l’auteur conserve le droit de revendiquer la paternité de l’œuvre et de s’opposer à toute déformation, mutilation ou autre modification de cette œuvre ou à toute autre atteinte à la même œuvre, préjudiciables à son honneur ou à sa réputation[10]. »
Droits moraux par pays
Table
Légende :
∞ : perpétuité (pour désigner les droits moraux à perpétuité, quelle que soit la formulation exacte pour désigner le concept).
Dans l'essentiel de l'Europe, il n'est pas possible pour les auteurs de renoncer à leurs droits moraux ou de les transmettre à des tiers. Ceci s'inscrit dans la logique du droit d'auteur européen, conceptualisé comme une propriété qui ne peut pas se vendre, mais dont l'usage peut s'accorder sous licence. Les parties peuvent toutefois s'accorder pour ne pas faire appliquer les droits moraux (ces termes se trouvent fréquemment dans les contrats européens). Il peut y avoir obligation pour l'auteur de déclarer ses droits moraux pour les faire valoir : dans les livres, par exemple, c'est effectué par une mention sur l'une des premières pages, ainsi que dans les métadonnées des bibliothèques nationales comme la British Library ou la Library of Congress[13].
↑"moral, adj.". OED Online. September 2011. Oxford University Press. 25 October 2011.
↑[1], Berne Convention for the Protection of Literary and Artistic Works, September 9, 1886, art. 6bis, S. Treaty Doc. No. 27, 99th Cong., 2d Sess. 41 (1986).
↑Sundara Rajan, Mira T., Copyright and Creative Freedom: A Study of Post-Socialist Law Reform, Taylor & Francis, coll. « Routledge Studies in International Law », (ISBN978-0-20396-776-8, lire en ligne), p. 41-42
↑Rigamonti, Cyrill P., « Deconstructing Moral Rights », Harvard International Law Journal, vol. 47, no 2, , p. 353-412
↑Daniel Hoppe-Jänisch, IP Assignment Clauses in International Employment Contracts, London, Lexology, (lire en ligne), p. 9 :
« European copyright systems provide for a stronger connection between the copyright and the author of the protected work. This makes sense if one considers that even though the German Urheberrecht or the French droit d'auteur are often translated as copyright, the literal translation is author’s right. It comprises not only proprietary rights but also moral rights. In many European jurisdictions, only the proprietary rights are assignable; in others, copyrights, including the proprietary rights, cannot be assigned at all but authors may only grant others a license to exploit the protected work. Moral rights are usually not assignable and can be waived only to a limited extent. »