Ces carreaux sont ornés de motifs géométriques ou de représentations figuratives. On les trouve aussi bien à l'intérieur de bâtiments qu'en revêtement extérieur de façade. Cet art se développe d'abord en Andalousie au XVe siècle avant de connaître son apogée au XVIIIe siècle au Portugal. Il reste de nos jours un art vivant dans le sud de l'Espagne et au Portugal.
Étymologie
Le mot « azulejo » vient soit de l'arabeal zulaydj, زليج, « petite pierre polie », soit du portugais ou de l'espagnol, azul, « bleu ». Cette étymologie pourrait sembler évidente puisque la couleur bleue est la plus fréquemment utilisée. Il s'agissait au départ d'imiter les mosaïques romaines, assemblages de « petites pierres polies ». Le mot « zellige », technique de revêtement utilisée en Afrique du Nord, a la même étymologie. Le mot « azulejo » viendrait du terme arabico-espagnol azzulaich ou azulaich, corruption du gréco-latin asarotum[2] comme le propose Glosario de voces ibéricas[3].
Le mot se prononce [aθu'lexo] en espagnol, et [azulæɨʒʊ] en portugais. Il est parfois francisé en azuleije[azulɛʒe].
La technique de l'émail stannifère opaque fut apportée par les Maures lors de leur occupation, et se développa dans toute la péninsule Ibérique. D'abord non figurative (interdiction de la figuration dans les préceptes de l'islam sunnite), la décoration des azulejos ne devint figurative qu'à partir de la fin du XVe siècle sous l'influence de la majolique italienne. Les premiers azulejos figuratifs sont peints à Séville vers 1500 par Francesco Niculoso, potier italien originaire de Pise. La chapelle de l'Alcazar de Séville ou le retable du monastère de Tentudia sont des exemples encore visibles de panneaux d'azulejo de Niculoso. Cet art du carreau de faïence décoré se développera ensuite dans toute l'Espagne, en particulier à Talavera de la Reina et dans le royaume de Valence, puis au Portugal.
En parallèle, l'usage de carreaux de faïence décorés s'est développé en Flandres, d'abord à Anvers autour de 1500[4], puis à Delft.
Si Séville, pour l'Espagne, possède de magnifiques panneaux d'azulejos, et si Mexico s'enorgueillit de sa Casa de los azulejos, cet art s'est ensuite particulièrement développé au Portugal et dans ses anciennes colonies, en particulier le Brésil et les comptoirs d'Asie (Macao et Goa). Les premiers azulejos fabriqués au Portugal au XVIIe siècle s'inspirent des productions hollandaises bleu et blanc qui imitent la faïence chinoise très à la mode à cette époque en Europe. Le bleu intense caractéristique de cette période est obtenu par utilisation du cobalt.
Plus modestement, des panneaux de plus petite taille sont couramment utilisés en Espagne et au Portugal pour des représentations religieuses ou à des fins signalétiques.
De nombreux ateliers artisanaux portugais et espagnols s'emploient à poursuivre leur adaptation à la modernité (voir en particulier les réalisations dans le métro de Lisbonne).
Les azulejos peuvent être non figuratifs, géométriques voire abstraits, mais aussi figuratifs. Ainsi, le couvent de São Vicente de Fora de Lisbonne possède 38 panneaux représentant les fables de La Fontaine.
Du point de vue de la vie quotidienne, on reconnaît aux azulejos un certain nombre de qualités : leur entretien et leur nettoyage sont faciles, puisque leur surface est plane ; ils protègent contre l’humidité en hiver et contre la chaleur en été (fortes chaleurs estivales dans la péninsule Ibérique)[5].
Terminologie
Alicatado : de l'arabe al-qataa, revêtement mural ou du sol. Céramiques lustrées coupés selon différentes tailles et formes géométriques à l'aide d'une tenaille.
Corde sèche : Technique du califat de Cordoue (Xe siècle) caractérisée par l'utilisation de corde pour la séparation des couleurs
Cuenca et arista : Technique du XVe siècle consistant à appliquer un moule sur la terre fraîche pour faire naître un relief
Majolique : Technique italienne permettant une peinture directe sur la pièce lustrée.
Galeries
Azulejos hispano-mauresques
Carreaux hispano-mauresques alicatado de l'Alhambra, vers 1350, Grenade (Espagne).
Carreaux hexagonaux alfardones, vers 1420, Manises (Espagne).
Détail d'une frise d'azulejos de la chapelle du Christ du Sang ou des Maestres. Œuvre d'Hernando de Valladares (1609), Église Saint-Isidore de Séville (Espagne).
↑Le Nouveau Petit Robert de la langue française 2010, Le Robert, , 2837 p. (ISBN978-2-84902-633-5), p. 202.
↑Compte rendu du troisième Congrès scientifique international des catholiques tenu à Bruxelles du 3 au 8 septembre 1894, Société belge de librairie, (lire en ligne)
↑(es) Francisco Javier Simonet, Glosario de voces ibéricas y latinas usadas entre los mozarábes, Est. tip. de Fortanet, (lire en ligne)
↑Claire Dumortier, Céramique de la Renaissance à Anvers. De Venise à Delft, Paris, Éditions Racine, 2002.
↑« Azulejos », photolisbonne.com (consulté le 16 mai 2019).
Comisão Nacional para as Comemorações dos Descobrimentos Portugueses. O azulejo em Portugal no século XX. Comisão Nacional para as Comemorações dos Descobrimentos Portugueses, Lisbonne, 2000. (ISBN972-787-009-0), sur les azulejos contemporains.
João Castel-Branco Pereira, Azulejos. Chefs-d'œuvre du musée national de l'Azulejo à Lisbonne, Paris, Éditions Chandeigne, 2009, catalogue des collections du Musée de Lisbonne.
José Meco, O Azulejo em Portugal, Lisbonne, Publicações Alfa, 1993, ouvrage sur les azulejos anciens et modernes.
Alfredo J. Morales, Francisco Niculoso Pisano, Diputación de Sevilla, Arte Hispalense, 1977, rééd. 1991.
Alexandre Nobre Pais et al., A arte do azulejo em Portugal, Lisbonne, Institut Camões, 2002 (ISBN972-566-223-7).
J. M. dos Santos Simões, Azulejaria em Portugal nos séculos XV e XVI: introdução geral, Lisbonne, Fondation Calouste Gulbenkian, 2e éd., 1990. L'ouvrage de référence sur la naissance des azulejos portugais.
Rioletta Sabo et Jorge Nuno Falcato, photographies de Nicolas Lemonnier, Azulejos du Portugal, Paris, Citadelle et Mazenod, 1998, sur les azulejos portugais des XVIIe et XVIIIe siècles, avec de belles photographies.